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Moby Dick

Fiche descriptive
Séquence didactique
Annexes
Moby Dick
MELVILLE, Herman
Par Jessy Rodrigue


Nationalité de l'auteur : Américaine
Genre : Roman
Courant :
Siècle :
Groupe d'âge visé : Premier cycle secondaire
Auteur de la séquence : Jessy Rodrigue
Date du dépôt : Hiver 2012


 

Justification du choix de l’œuvre

Les jeunes du secondaire portant un plus grand intérêt aux romans d’aventures et préférant les personnages courageux, audacieux et aventuriers[1], le choix de l’œuvre s’est arrêté sur l’un des récits d’aventures les plus populaires de tous les temps, soit Moby Dick d’Herman Melville. En plus d’initier les élèves aux grands classiques de la littérature, ce roman est tout désigné pour transmettre un legs culturel et une somme de connaissances relatives au passé. Devenu un classique de la littérature américaine, le livre choisi [2] propose la version abrégée du roman. Bien qu’elle retranche de longues descriptions, le texte préserve le style de l’auteur et permet de se centrer sur les rebondissements du récit.

 

Problèmes de lecture

En lisant Moby Dick, les lecteurs apprentis se butent à deux problèmes de lecture en particulier :

  • la compréhension d’un vocabulaire associé à un phénomène qui leur est inconnu – ou peu connu –, soit la chasse à la baleine au 19e siècle;
  • l’évolution du personnage d’Achab tout au long du roman, les élèves ayant l’habitude d’identifier dès le début le «bon» et le «méchant».

 

Les objectifs visés par l’enseignant qui propose la lecture de Moby Dick au premier cycle du secondaire sont les suivants.

  • Favoriser l’expérience de lecture d’un roman susceptible de rebuter les élèves par la complexité du vocabulaire. La résolution du problème de lecture a pour visée d’amener les élèves à approfondir leurs connaissances quant à l’univers dans lequel se déroule le roman afin d’être en mesure de mieux le comprendre et d’en tirer une interprétation la plus claire possible.
  • Prendre appui sur la familiarisation des élèves avec les genres narratifs, plus précisément les récits d’aventures, pour consolider leur connaissance. Les élèves prendront conscience que la perception qu’ils peuvent se faire d’un personnage, que ce dernier semble bon ou mauvais, peut changer au cours de la lecture d’une œuvre.

 

Les activités qui suivent rendent le roman plus accessible aux jeunes de 12 à 14 ans, donnant par le fait même des pistes pour l’enseignement de la littérature. Elles favorisent et enrichissent la compréhension et l’interprétation de Moby Dick et créent des situations d’acquisition et de maitrise [3] des compétences nécessaires pour comprendre et interpréter l’œuvre. Pour ce faire, les élèves devront avoir des connaissances préalables, dont la connaissance du schéma narratif et les types de narrateurs.

 

 

AVANT LA LECTURE

 

Activité 1 : Élaborer des attentes de lecture à partir des illustrations de couverture

Afin que les élèves apprennent à se constituer un horizon d’attente, l’enseignant les amène à interroger les illustrations de couverture. « Travailler le paratexte, c’est familiariser les élèves avec l’objet livre, leur apprendre à créer des indices à partir des signes dont il est porteur et à mobiliser les expériences et les savoirs dont ils sont eux-mêmes détenteurs » (Langlade, 2002 : 121). Pour ce faire, l’enseignant les invite à observer l’illustration de l’édition sur laquelle ils travaillent [4]. À l’issue d’une observation attentive, que peut-on attendre de la lecture de l’œuvre? Qu’est-ce que le décor révèle? Que peut-on dire des personnages? Les élèves sont invités à écrire leurs hypothèses dans un cahier d’écriture. Il s’agit de leur première tâche d’écriture dans le journal de bord [5]. Après la période d’écriture, l’enseignant les invite à partager leurs idées. Ce moment sera idéal pour confronter les différentes attentes des élèves. L’enseignant devra exploiter « celles qui sont les plus porteuses de sens, les plus favorables à l’entrée dans l’œuvre » (Langlade, 2002 : 126) : récit d’aventures maritimes, chasse à la baleine, 19e siècle, etc. Afin de pousser plus loin les hypothèses des élèves, il montre une deuxième couverture. Les élèves sont alors en mesure de faire allusion à la grosseur du mammifère et à ses blessures, à la violence de la chasse à la baleine, au danger qui guette les baleiniers, etc. Finalement, l’enseignant montre une dernière couverture sur laquelle on aperçoit le capitaine Achab et Queequeg le sauvage. Qui sont-ils? Ont-ils de l’influence dans le récit? Les élèves sont donc amenés à comprendre que les deux personnages auront un impact important sur l’histoire.

 

Élaborées comme telles, ces attentes de lecture doivent être mises au service d’une stratégie d’entrée dans Moby Dick. Les hypothèses issues de l’observation permettent de commencer la lecture du roman par le chapitre Les nattiers, qui contient, en effet, la confirmation d’un équipage près à chasser la baleine. À l’issue de cette lecture, « un retour sur ces illustrations permet d’apprécier celles qui étaient les plus riches, les plus porteuses d’hypothèses fécondes » (Langlade, 2002 : 128).

 

Activité 2 : Recherche préparatoire : vocabulaire et contextualisation de l’œuvre

Pour amorcer cette activité, l’enseignant fait appel aux connaissances des élèves. Que savent-ils de la chasse à la baleine et de la vie de marin? Connaissent-ils le vocabulaire relié aux bateaux? Puisque les élèves en savent peu sur le monde marin et que le vocabulaire utilisé tout au long du récit peut nuire à la compréhension de l’œuvre, l’enseignant les invite à remplir un glossaire auquel ils pourront se référer tout au long de leur lecture [6]. Pour ce faire, il divise la classe en groupes d’experts qui devront présenter les résultats de leurs recherches. Un premier groupe se concentre sur le lexique relié aux bateaux. Il doit trouver des images sur Internet et concevoir de courtes descriptions d’une dizaine de mots qu’ils auront à dicter à leurs camarades. Le deuxième groupe présente les créatures marines (léviathan, cachalot et calmar) en portant une attention particulière à leurs caractéristiques (grosseur, longueur, attributs, etc. [7]). Ce groupe d’experts veille également à expliquer et hiérarchiser les professions exercées en haute mer. Cette activité leur servira à identifier les membres de l’équipage du Péquod plus tard dans la séquence. Une feuille sur laquelle les élèves pourront noter des mots qu’ils n’ont pas compris et mettre en œuvre les stratégies d’acquisition de vocabulaire est également distribuée à tous. Deux groupes d’experts font une recherche sur la vie de chasseurs de baleines. Ils apprendront entre autres qu’elle était surtout pratiquée au 19e siècle et que la chasse au cachalot avait des visées économiques. Finalement, deux équipes sont amenées à trouver de l’information sur l’auteur afin de contextualiser l’œuvre. Ils sauront ainsi qu’il a lui-même chassé la baleine et que le récit est inspiré d’une histoire vraie. Le fait de mettre deux équipes pour chacun des deux derniers thèmes permet de s’assurer que les informations sont complètes.

 

Au terme de cette activité, les représentations empiriques des élèves qui étaient jusqu’alors incomplètes ou incertaines se verront confirmées et complétées. Ainsi, tous les élèves entament la lecture de Moby Dick avec les mêmes connaissances, qui sont directement investissables dans la construction de sens de l’œuvre à lire. Pour clore cette activité, l’enseignant demande aux élèves ce qu’ils pensent de la chasse à la baleine. Les réponses données pourront être réinvesties à l’activité 9. À la suite de ces discussions et afin de faire appel aux connaissances acquises tout au long de cette activité, le chapitre L’avocat sera lu par l’enseignant, chapitre dans lequel Ismaël explique à quoi sert la chasse à la baleine et qui confirme les informations trouvées lors de leurs recherches. Ce chapitre permet également de mettre en contexte le lexique étudié.

 

 

PENDANT LA LECTURE

 

Activité 3 : Lecture d’un extrait significatif de Moby Dick

L’élément névralgique choisi pour préparer la lecture est le chapitre Le gaillard d’arrière. Il s’agit de l’endroit dans le récit où on découvre la vengeance qui anime le capitaine Achab. Bien que ne se situant pas au tout début du roman, cet extrait convient parfaitement à une exploitation comme texte d’ouverture. La lecture analytique de ce chapitre pourra être précédée de quelques questions de préparation sur la vengeance : qu’est-ce que la vengeance? pourquoi se venge-t-on? est-ce que la vengeance peut être acceptable dans certaines situations?

 

En prenant appui sur les réactions des élèves, on pourra montrer que plus que la chasse à la baleine, ce texte est le récit d’un capitaine qui veut venger la perte de sa jambe. Pour ce faire, l’enseignant commence alors la lecture de l’extrait en prenant soin de souligner les passages qui prouvent qu’Achab a soif de vengeance. Puisque le chapitre choisi est majoritairement dialogué, l’enseignant en profite pour plonger les élèves au cœur de l’œuvre et demande à certains volontaires de camper les personnages du récit [8]. L’enseignant a le rôle du narrateur, ce qui lui permet d’interrompre la lecture à divers moments et de questionner les élèves.

 

Après cette lecture orientée, un retour est fait : pourquoi Achab désire-t-il se venger de Moby Dick? pourquoi certains membres de l’équipage semblent-ils appuyer le capitaine et d’autres non? À l’issue de cette troisième activité et en prenant appui sur les hypothèses qui avaient été émises lors de l’activité initiale, il est plus facile d’orienter la lecture de l’œuvre autour de la représentation que se font les élèves du capitaine Achab, représentation qui évoluera tout au long du roman.

 

Activité 4 : Lecture du début de l’œuvre

Après la lecture du chapitre Le gaillard d’arrière, l’enseignant pose des questions aux élèves à propos du statut du narrateur : qui est le narrateur? est-il un personnage présent dans le récit ou non? Les élèves émettent des hypothèses sans arriver à une réponse précise puisqu’aucun indice ne le révèle dans l’extrait. L’enseignant anime la discussion et entame la lecture de l’œuvre afin de bien camper le narrateur-personnage. Dès la première phrase, ils sauront qu’il est présent : « Appelez-moi Ismaël ». Comme la lecture à haute voix du début d’un texte fait par l’enseignant sert de lanceur à la lecture des élèves (Langlade, 2002 : 220), c’est lui qui lira les cinq premiers chapitres en prenant soin de les questionner à propos de la situation de communication. Ces chapitres servent également à réviser le lexique étudié à l’activité précédente et à camper le deuxième personnage apparaissant sur la dernière couverture qui leur a été montré, soit Queequeg le sauvage. L’enseignant prend la peine de questionner les élèves sur le registre de langue qu’a choisi l’auteur pour faire parler Queequeg. Pourquoi ce registre? Qu’apporte-t-il au personnage? Avant d’entamer le chapitre Biographie et afin de favoriser un va-et-vient dialectique, il invite les élèves à écrire une biographie de 100 mots sur Queequeg. Qui est-il? Pourquoi agit-il en sauvage? D’où vient-il? L’enseignant profitera des textes des élèves pour permettre « un véritable dialogue au sein du groupe-classe, c’est-à-dire un échange dans lequel chacun s’implique en tant que sujet porteur de valeurs culturelles, morales et esthétiques particulières » (Langlade, 2004 : 9). La lecture du chapitre Biographie confirmera les différentes hypothèses émises.

 

En devoir, les élèves auront à lire quatre chapitres (20 pages), soit de En brouette à Sa marque. Après en avoir fait la lecture, ils devront écrire leur impression, leurs hypothèses et leurs questionnements au sein de leur journal de bord pour ensuite les partager en classe. Il est important que l’enseignant fasse un retour sur ce qu’on apprend d’Achab dans le chapitre Le navire. Avec la description donnée, les élèves jugeront positivement le capitaine et pourront même ressentir une certaine pitié à son égard.

 

Activité 5 : Faire la connaissance des personnages

La lecture des chapitres Chevaliers et écuyers et Chevaliers et écuyers (suite) se fait en plénière. À l’aide des notes prises à l’activité 2, les élèves doivent placer de façon hiérarchique les protagonistes et prendre en note leurs caractéristiques [9]. L’enseignant les amène à faire des liens avec Le gaillard d’arrière et la réaction qu’avaient alors eue ces personnages. En feuilletant ce chapitre, ils s’aperçoivent que les harponneurs sont des sauvages païens qui appuient Achab, tandis que les seconds sont des chrétiens de race blanche n’adhérent pas à la proposition du capitaine. Cette activité permet de bien saisir les personnages, leurs valeurs et leurs réactions tout au long du roman (PFEQ, 2009 : 154), en plus de comprendre la relation qu’entretiendra Achab avec chacun d’eux.

 

Le chapitre suivant, Achab, approfondit ce que les élèves savent à propos du capitaine. Encore une fois, l’enseignant leur demande ce qu’ils retiennent de ce chapitre et de quelle façon ils perçoivent Achab. Ce faisant, l’enseignant fait du modelage : les élèves voient quels types de questions ils doivent se poser au cours de leur lecture. Par la suite, individuellement, les élèves lisent les chapitres Cétologie jusqu’à Gaillard d’arrière. Ce dernier chapitre ayant déjà été lu en classe, ils devront désormais le relire et écrire dans le journal de bord un commentaire sur le capitaine. Cette activité permet aux élèves de voir que plus la lecture avance, plus leur perception envers Achab change et évolue. En effet, la perception qu’ils ont de lui après la lecture de ce chapitre diffère de celle qu’ils avaient à l’activité 3, soit avant de lire le début du roman.

 

Activité 6 – La couleur blanche de Moby Dick

Avant de pousser plus loin les interprétations sur le capitaine, il est nécessaire d’en apprendre davantage sur le cachalot afin de comprendre les actions d’Achab. L’enseignant lit deux chapitres : Moby Dick et La blancheur du cachalot. La majorité des cachalots étant bleus, pourquoi Melville a-t-il choisi le blanc pour caractériser celui de son récit? « Construire du sens, ce n’est pas comprendre n’importe quoi dans un texte. Pour qu’un détail puisse être “signifié” en indice, encore faut-il qu’il soit “signifiable”. Or, ces détails “signifiables” ne se trouvent pas par un pur hasard dans un texte : ils sont nécessairement le produit d’une activité créatrice de l’auteur » (Langlade, 2002 : 52). Avant d’entamer la lecture de ce chapitre, l’enseignant demande aux élèves à quoi ils associent la couleur blanche. Des réponses à caractère mélioratif seront majoritairement suggérées : le mariage, la paix, la beauté, la pureté, etc. Melville veut-il attendrir l’image qu’on se fait du cachalot? Au cours du chapitre, Ismaël explique à quoi, lui, associe cette couleur : la terreur, les albinos, l’épouvante, les fantômes, etc. Les élèves sont ainsi amenés à percevoir l’opposition qu’a voulu créer l’auteur puis à l’interpréter dans le sens du problème soumis. « Pour véritablement placer les élèves en contexte de résolution de problème, l’enseignant […] pose des repères, de façon non organisée, pour que les élèves construisent leurs propres solutions » (Falardeau, 2004 : 93). Est-ce que Melville a voulu déconcerter les lecteurs? Ce faisant, ils prennent conscience que rien n’a été laissé au hasard par l’auteur et que ces deux chapitres amènent le lecteur à s’interroger sur Moby Dick : peut-être n’est-il pas aussi méchant qu’Achab le suggère?

 

Activité 7 – Journal de bord orienté et cercles de lecture

Pour le reste de la lecture du roman, les élèves doivent porter une attention particulière aux comportements d’Achab et émettre des commentaires à son propos. Ces commentaires portent sur les chapitres 1) La carte et Conjectures; 2) Les nattiers à Stubb tue un cachalot; 3) Le massacre des requins à Arrimage et nettoyage; 4) Jambe et bras; 5) Queequeg dans son cercueil à Le quart du cachalot; 6) Les chandelles à La bouée de sauvetage; 7) Le Péquod rencontre la Rachel; 8) La symphonie. L’enseignant oriente le journal de lecture en leur spécifiant de répondre, pour chacune des sections, à ces questions : quel est le comportement d’Achab? pourquoi agit-il ainsi? crois-tu que ce comportement est justifié et pourquoi? Chemin faisant, les élèves apprennent à se distancier de leur lecture et à réagir à un texte littéraire en justifiant leurs impressions (Lebrun & Coulet, 2003 : 104). Puisqu’à certains moments les élèves devront lire plusieurs pages avant d’écrire un commentaire, l’enseignant leur demande de résumer chacun des chapitres. La brièveté de ces derniers permet que le résumé n’ait qu’une seule phrase. Ainsi, pour répondre aux questions, ils pourront s’y référer afin de se remémorer leur lecture. À la fin de ces exercices, les élèves forment des cercles de lecture dans lesquels chacun a un rôle assigné par l’enseignant : animateur, preneur de notes et communicateur. Ensemble, ils discutent de l’évolution du capitaine Achab et se questionnent sur ce qui a bien pu le rendre aussi fou de vengeance. Ils mettent sur papier leurs interprétations et le porte-parole de chacun des sous-groupes est invité à faire part de leurs hypothèses.

 

Activité 8 – Écriture de la fin de Moby Dick

La lecture des chapitres La chasse. Premier jour et La chasse. Deuxième jour se fait en groupe. Avant d’entamer le dernier chapitre, La chasse. Troisième jour, et l’épilogue, l’enseignant demande aux élèves de faire une récapitulation du roman. Que s’est-il passé? Quelles actions ont été faites? En plénière, les élèves sont appelés à reconstruire le schéma narratif. Après s’être remémoré les épisodes du récit, ils écrivent le dénouement et la situation finale du roman. Qu’adviendra-t-il d’Achab et de Moby Dick? D’Ismaël, le narrateur-personnage? Et de tous les autres? Comment se terminera l’histoire de Melville? L’enseignant demande également aux élèves d’écrire un court paragraphe justificatif : pourquoi pensent-ils que l’histoire se terminera de la sorte? quels indices du récit les a poussés à écrire cette conclusion?

 

Après la période d’écriture, les élèves sont invités à se regrouper en équipe de cinq pour faire la lecture de leur texte et de leur justification. Ensemble, ils discutent et essaient de prédire laquelle des cinq versions est celle qui se rapproche le plus de la fin imaginée par Melville. Des modifications sont apportées à l’histoire, ils en viennent à une nouvelle version et un nouveau paragraphe justificatif est écrit. Par la suite, un représentant par sous-groupe fait la lecture de leur texte et la classe choisit celui qui leur semble être le plus porteur de sens. Pour valider le tout, l’enseignant leur fait écouter la chanson Moby Dick de Lak A Barth[10], chanson dans laquelle le récit est raconté et la situation finale explicitée. Par la suite, l’enseignant lit à haute voix la fin du roman et recueille les réactions des élèves par rapport à la mort du capitaine Achab, ainsi que leurs appréciations vis-à-vis du roman.

 

 

APRÈS LA LECTURE

 

Activité 9 – « Mon client n’est pas coupable, votre Honneur. »

Après avoir analysé l’œuvre littéraire, les élèves comprendront qu’un personnage peut évoluer dans un récit. Ainsi, un méchant peut devenir bon, un bon peut devenir méchant ou un statut peut ne pas changer tout simplement. L’enseignant leur fait prendre conscience que la perception qu’on se fait d’un personnage diverge d’un lecteur à l’autre, en raison des valeurs de chacun, mais principalement parce qu’il donne un sens à l’œuvre et en fait sa propre interprétation. La classe en vient donc à se poser une ultime question : qui est donc le méchant de l’histoire? Les points de vue diffèreront dans la classe : certains diront qu’il s’agit d’Achab, d’autres diront que c’est Moby Dick. L’analyse faite tout au long du roman permet aux élèves de porter un jugement sur les personnages et des arguments sont données pour chacune des positions : Achab a raison de vouloir se venger de Moby Dick, après tout le cachalot lui a amputé la jambe; Moby Dick a raison de s’attaquer à Achab, le capitaine étant dans son environnement, etc. Après ces quelques pistes, l’enseignant propose une activité « qui permettra de combiner les enjeux de la passion avec ceux de la raison et les valeurs de la participation psychoaffective avec celles de la distanciation critique » (Simard et coll., 2010 : 334) : pour l’espace d’un instant, chaque élève devient avocat et doit défendre un des deux personnages en Cour. Il devra tenter de convaincre le juge (l’enseignant) qui écoute son plaidoyer. La consigne est la suivante : « Tu dois préparer un plaidoyer dans lequel tu défends le capitaine Achab ou Moby Dick. Tu as deux minutes pour convaincre le juge que ton client n’est pas le coupable, c’est-à-dire qu’il n’est pas le méchant de l’histoire. Pour le convaincre, appuie-toi sur des informations tirées du roman. » Au bureau de l’enseignant ou dans le corridor, la courte présentation orale pourra se faire pendant que les élèves travaillent individuellement sur l’activité suivante ou pendant qu’ils font un travail individuel.

 

Activité 10 – Écriture d’une quatrième de couverture

La quatrième de couverture du roman est composée d’une note critique écrite par Albert Camus, ainsi que d’un commentaire qui permet de comprendre la popularité de l’œuvre. Aucun résumé de l’histoire n’est présenté aux lecteurs. Après avoir étudié Moby Dick et analysé les personnages, les élèves sont amenés à écrire un résumé de l’œuvre qui pourrait se retrouver au verso de la prochaine édition du roman. L’intérêt pour le résumé est engendré par le désir de vérifier l’hypothèse selon laquelle, pour comprendre l’œuvre, le lecteur doit s’en faire une représentation globale, représentation qui serait un résumé du roman (Giasson, 1990 : 81). « En résumant un texte, les élèves sont appelés à appliquer un certain nombre de processus de réflexion afin de combiner différentes interprétations, d’éliminer des détails moins importants et de condenser les principaux messages pour en arriver à l’essence du texte » (MEO, 2004 : 79). Le schéma narratif ayant été construit, les motivations et les intentions des personnages ayant été identifiées, les élèves doivent maintenant s’en inspirer pour écrire la quatrième de couverture [11]. La consigne est la suivante : « la collection Classiques abrégés désire rééditer Moby Dick d’Herman Melville. Elle t’a engagé comme écrivain et te demande de composer le résumé de l’œuvre qui se retrouvera en quatrième de couverture. Ton résumé doit compter 150 mots. Attention de ne pas divulguer la fin de l’histoire aux futurs lecteurs! » Cette activité permet de vérifier la compréhension des élèves et de clore la séquence didactique sur une note participative dans laquelle les élèves seront amenés à partager leur résumé.

 

 

Bibliographie

 

Livre à l’étude

Melville, H. (2010) Moby Dick. Paris : Classiques abrégés, l’école des loisirs.

 

Ouvrages de référence

Dufays, J.-L., Gemenne, L., Ledur, D. (2009). Pour une lecture littéraire. 2e édition. Bruxelles : Éditions De Boeck Université.

Falardeau, É. (2004). Pistes d’entrée pour la lecture de textes littéraires : la mise en place de situations-problèmes. Skholê, hors-série I, p. 91-98.

Giasson, J. (1990). « La compréhension en lecture ». Boucherville : Gaëtan Morin Éditeur.

Langlade, G. (2004). La lecture littéraire au risque de la « maîtrise des discours ». Actes du 9e colloque de l’AIRDF, Québec.

Langlade, G. (2002). Lire des œuvres intégrales au collège et au lycée. Toulouse : CRDP Midi-Pyrénées.

Lebrun, M., Coulet, C. (2003). Favoriser un rapport critique à la lecture/écriture littéraire en constituant la classe comme une communauté active de lecteurs et d’auteurs. Enjeux, p. 99-114.

Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (2005). Les profils de lecteurs chez les jeunes du secondaire. Action concertée pour le soutien à la recherche en lecture. Gouvernement du Québec.

Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (2011). Progression des apprentissages au secondaire. Français, langue d’enseignement. Gouvernement du Québec.

Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (2009). Programme de formation de l’école québécoise. Domaines des langues. Français, langue d’enseignement. Gouvernement du Québec.

Ministère de l’Éducation de l’Ontario (2004). La littératie au service de l’apprentissage. Rapport de la Table ronde des experts en littératie de la 4e à la 6e année. Gouvernement de l’Ontario.

Simard, D., Dufays, J.-L., Dolz, J., Garcia-Debanc, C. (2010). Didactique du français langue première. Bruxelles : Éditions De Boeck Université.

 

 

Annexes

Annexe 1 : Illustrations de couverture

Annexe 2 : Vocabulaire et membres de l’équipage

Annexe 3 : Comparaison du cachalot et de l’humain

Annexe 4 : Le gaillard d’arrière

Annexe 5 : Moby Dick, de Lak A Barth

Annexe 6 : Résumé de la séquence didactique

 

 

Annexe 1 : Illustrations de couvertures

1re couverture : Herman Melville, Moby Dick. Paris, Classiques abrégés, L’école des loisirs, 2010, 237 p.

Hyperlien : http://www.librairiedialogues.fr/livre/1258747-moby-dick-herman-melville-l-ecole-des-loisirs

 

2e couverture : Herman Melville, Moby Dick, Le livre de poche jeunesse, Paris, 2008, 315 p.

Hyperlien : http://www.livredepochejeunesse.com/IMG/arton320.jpg

 

3e couverture : Herman Melville, Moby Dick, Nathan, Bibliothèque des grands classiques, Paris, 2002, 194 p.

Hyperlien : http://www.noosfere.com/icarus/livres/niourf.asp?numlivre=2146576496

 

 

Annexe 2 : Vocabulaire et membres de l’équipage

« Tout le monde à bord! »

 

1. Amarre

 

2. Arrimer

 

3. Bâbord

 

4. Baleinier

 

5. Filin

 

6. Fondoir

 

7. Harpon

 

8. Hune

 

9. Mât

 

10. Palan

 

11. Pont

 

12. Saisine

 

13. Souquer

 

14. Tribord

 

 

 

Cartes d'embarcation

15. Armateur (coarmateur)

 

16. Capitaine

 

17. Harponneur

 

18. Officier

 

19. Second

 

20. Steward

 

 

 

Équipage du Péquod

 

Membre

Caractéristiques

Starbucks

 

Stubb

 

Flask

 

Tashtego

 

Daggoo

 

 

 

Mon glossaire personnel

Les indices qui me permettent d’attribuer un sens à un mot nouveau que j’ai rencontré dans Moby Dick [12].

 

Technique pour trouver le sens du mot inconnu :

- regarder le mot même;

- morphologie (affixe, racine);

- connaissances personnelles sur ce mot;

- regarder autour du mot;

- atmosphère générale;

- phrase ou expression.

 

1.

Mot inconnu :

 

Technique utilisée :

 

Définition :

 

 

 

2.

Mot inconnu :

 

Technique utilisée :

 

Définition :

 

 

 

3.

Mot inconnu :

 

Technique utilisée :

 

Définition :

 

 

 

 

 

Annexe 3 : Comparaison du cachalot et de l’humain

 

Hyperlien : http://leblog_lifeandheart.vip-blog.com/vip/article/4916661,Bient%C3%B4t-un-statut-de-personne-non-humaine-pour-prot%C3%A9ger-les-dauphins.html

 

 

Annexe 4 : Le gaillard d’arrière

 

Légende
Blanc : Ismaël, narrateur-personnage
Rose : Srubb, second
Vert : Starbuck, second
Jaune : Achab, capitaine
Cyan : tous les marins (tous les élèves)
Rouge : Tashtego, harponneur
Mauve : Daagoo, harponneur
Bleu, Queequeg, harponneur

 

LE GAILLARD D’ARRIÈRE

(Entre Achab, puis tous)

Le matin, peu après le petit-déjeuner, fidèle à son habitude, Achab monta sur le pont. C’est là que la plupart des capitaines font leur promenade à cette heure, comme les messieurs de la campagne, après le même repas, font quelques tours de jardin.

Bientôt, on entendit son pas d’ivoire régulier, tandis qu’il faisait de long en large sa vieille ronde sur des planches si accoutumées à sa démarche que, telles des pierres géologiques, elles étaient partout marquées par son pas singulier. Et si l’on fixait ce front tout aussi cabossé et marqué, on voyait également des empreintes, et plus étranges encore : les empreintes d’une pensée unique, toujours en marche, et qui ne dormait jamais.

Ce matin-là, ces marques paraissaient plus profondes ; de même, son pas nerveux creusait plus profondément le bois. Achab était si plein de cette pensée qu’à chaque identique demi-tour qu’il faisait tantôt au grand mât, tantôt à l’habitacle, on pouvait presque voir sa pensée tourner en lui quand il tournait, marcher en lui quand il marchait.

- Vous l’avez vu, Flask? murmura Stubb. Le poussin qu’il couve donne du bec dans la coquille. Il va pas tarder à sortir.

Les heures passèrent – soit Achab s’enfermait dans sa cabine, soit il arpentait le pont avec, sur la mine, le même intense fanatisme.

Le jour tirait à sa fin. Soudain, le capitaine ordonna à Starbuck de rassembler tout le monde à l’arrière.

- Monsieur! fit le second, surpris par cet ordre presque jamais ordonné à bord, sauf cas extraordinaire.

- Tout le monde à l’arrière, répéta Achab. Ho de la vigie, ho! Descendez!

Lorsque tous les hommes furent réunis, à le contempler avec des visages curieux et pas complètement rassurés, car il ressemblait fort à l’horizon quand le temps est à gains, Achab les transperça du regard.

- Hommes, que faites-vous quand vous voyez une baleine?

- On donne de la voix! répondit spontanément un chœur d’une vingtaine de marins.

- Bien! cria Achab sur un ton d’approbation farouche, en observant l’enthousiasme si magnétiquement soulevé par sa question inopinée.

- Hommes, que faites-vous ensuite?

- On met à la mer et on la poursuit!

- Hommes, sur quel air ramez-vous alors?

- Crève la baleine ou crève la baleinière!

- Vigies, vous m’avez déjà entendu donner des ordres au sujet d’un cachalot blanc. Maintenant regardez bien! Vous voyez ce doublon d’or espagnol? – et il éleva dans le soleil une grosse monnaie brillante. C’est une pièce de seize dollars, les gars! Vous la voyez? Monsieur Starbuck, passez-moi le maillet, là-bas.

Tandis que le second allait chercher le marteau, sans un mot, Achab frotta lentement la pièce d’or sur le plan de sa veste, comme pour en aviver l’éclat.

Recevant le maillet apporté par Starbuck, il marcha sur le grand mât, brandissant l’outil dans une main, l’or dans l’autre, et cria avec force :

- Quiconque d’entre vous me lèvera un cachalot à tête blanche, avec le front ridé et la mâchoire de travers, quiconque d’entre vous me lèvera ce cachalot à tête blanche avec trois trous dans la nageoire tribord – écoutez bien –, celui d’entre vous qui me lèvera ce même cachalot blanc, celui-là aura cette pièce d’or, mes enfants!

- Hourra! Hourra! hurlèrent les marins tout en faisant claquer des bâches pour saluer le clouage du doublon sur le mât.

- Un cachalot blanc, j’ai dit, reprit Achab en jetant le maillet sur le pont, un cachalot blanc. Arrachez-vous les yeux pour le voir, les gars.

Tashtego, Daggoo et Queequeg avaient assisté à toute la scène dans un intérêt, une surprise plus intense encore que les autres, et l’évocation du front ridé, de la mâchoire torve, les avait fait sursauter, comme s’ils avaient été touchés, chacun, par quelque souvenir personnel.

- Capitaine Achab, dit Tashtego, ce cachalot blanc doit être celui que certains appellent Moby Dick.

- Moby Dick? hurla Achab. Tu connais donc le cachalot blanc, Tash?

- Avant de plonger, il ne met pas un peu bizarrement sa queue en éventail, monsieur? demanda l’Indien d’un air entendu.

- Et il a aussi un drôle de jet, fit Daagoo, très épais, même pour un «chacalot», et drôlement rapide, capitaine Achab?

- Et lui avoir un, deux, trois – oh! beaucoup de fers dedans sa peau aussi, capitaine! s'écria Queequeg d’une voix hachée. Tous tortis… tortus… comme un… un…

Les mots lui manquaient, il bredouillait et, de la main, faisait le geste de visser et visser encore, comme pour déboucher une bouteille.

- Un tire-bouchon! s'exclama Achab. Oui, Queequeg, les harpons plantés en lui sont tout tortillés et tordus; oui, Daggoo, son jet est énorme; oui, Tashtego, il étale sa queue en éventail comme un foc déchiré dans la tempête. Enfer et damnation! Hommes, c’est Moby Dick que vous avez vu… Moby Dick… Moby Dick!

Starbuck, tout comme Stubb et Flask, avait jusqu’alors fixé son supérieur avec une surprise grandissante, mais à la fin il parut frappé d’une idée qui lui donnait la clef du mystère.

- Capitaine Achab, n’est-ce pas Moby Dick qui vous a pris votre jambe?

- Qui t’a dit ça? cria Achab, puis, après un silence: Oui, Starbuck, oui, vous tous, mes braves, c’est Moby Dick qui m’a démâté, Moby Dick qui m’a donné le moignon mort sur lequel je me tiens aujourd’hui. Oui, oui! hurla-t-il dans un sanglot bruyant, terrible, animal, celui d’un élan frappé en plein cœur. Oui, oui! c’est ce maudit cachalot blanc qui m’a démoli et qui a fait de moi pour toute l’éternité un pauvre béquillard emporté! – puis, levant au ciel ses deux bras pour une imprécation infinie, il hurla: Oui! oui! Je le poursuivrai par-delà le cap de Bonne-Espérance, par-delà le cap Horn, par-delà le maelström de Norvège, par-delà les flammes de l’enfer, avant de renoncer. Et c’est pour ça que vous avez embarqué, les gars! Pour chasser ce cachalot blanc jusqu’à ce qu’il souffre du sang noir et roule sur le flanc. Qu’en dites-vous, hommes, voulez-vous le jurer, main dans la main, à présent? Je vous trouve l’air de braves.

- Oui, oui! crièrent harponneurs et marins en se précipitant autour du vieil homme enflammé. Un œil affûté sur le cachalot blanc, une lance affûtée sur Moby Dick!

- Dieu vous bénisse! fit-il, mi-criant, mi-sanglotant. Dieu vous bénisse, les gars. Steward! Va tirer la grande mesure de grog. Mais pourquoi cette triste mine, monsieur Starbuck? Tu ne veux pas chasser le cachalot blanc! Tu n’es pas prêt pour Moby Dick?

- Je suis prêt pour sa mâchoire de travers et pour les mâchoires de la mort aussi, capitaine Achab, si elles se présentent à moi au cours du travail qui est le nôtre, mais je suis venu ici pour chasser es baleines, pas pour assouvir la vengeance de mon commandant. Combien de barriques te rapportera ta vengeance, à supposer que tu l’obtiennes, capitaine Achab? Tu n’en tireras pas grand-chose sur le marché de Nantucket. Se venger d’une simple bête! Qui ne t’a frappé que pour l’instinct le plus aveugle! Folie! S’enrager contre une bête, capitaine Achab, cela semble un blasphème.

- Écoute-moi bien. Homme, toutes les choses que l’on voit ne sont que des masques de carton, mais dans chaque événement – dans l’acte vivant, dans le fait incontestable –, là se laisse deviner une chose inconnue mais douée de raison cachée sous le masque de carton qui, lui, ne raisonne pas. Si l’homme veut frapper, qu’il frappe à travers le masque! Comment le prisonnier peut-il s’évader, sinon en perçant le mur? Pour moi, le cachalot blanc est ce mur dressé près de moi. Il m’arrive de croire qu’il n’y a rien derrière. Mais suffit. Il me met à l’épreuve, il m’accable, je vois en lui une force scandaleuse dans laquelle courent les nerfs d’une malveillance impénétrable. Cette chose impénétrable, c’est elle surtout que je hais et, que le cachalot blanc en soit l’instrument ou le principe, j’assouvirai sur lui cette haine. Et je ne me parle pas de blasphème, homme: je frapperais le soleil s’il m’insultait. Qui est au-dessus de moi? La vérité est sans limites. Te voilà qui rougis, qui pâlis: ma chaleur t’a fait fondre en lave de colère. De quoi s’agit-il? Songes-y. Juste d’aider à frapper une nageoire: ce n’est pas une prouesse extraordinaire pour Starbuck. La meilleure lance de tout Nantucket ne va sûrement pas reculer devant cette seule petite chasse, quand chaque matelot a empoigné sa pierre à aiguiser. Parle, mais parle donc! Oui, oui! Dont ton silence, lui, parle pour toi. (À part.) Starbuck est à moi maintenant: il ne pourra plus s’opposer à moi sans mutinerie.

- Dieu me garde!... Qu’il nous farde tous! murmura tout bas Starbuck.

Mais, dans sa joie d’avoir emporté le consentement envoûté et tacite de son second, Achab n’entendit pas cette invocation de mauvais augure, ni non plus le rire étouffé montant de la cale, ni les vibrations prophétiques du vent dans les cordages, ni le claquement des voiles battant contre les mâts. Ah, vous, avertissements et présages! Quand vous venez, pourquoi ne restez-vous pas?

- La mesure! la mesure! cria Achab.

Recevant le pot d’étain rempli à ras bord, il se tourna vers les harponneurs et leur ordonna de sortir leurs armes. Puis il les aligna devant lui, près du cabestan, harpons en main, ses trois seconds se tenant à ses côtés avec leurs lances et le reste de l’équipage faisant cercle autour du groupe, et il resta un instant à scruter chacun de ses hommes d’un œil inquisiteur.

- Bois et fais passer! dit-il en tendant la lourde cruche au matelot le plus proche. Avancez, seconds! Croisez vos lances devant moi.

Ce disant, bras tendu, il empoigna les trois lances brillantes à leur intersection et leur imprima une secousse brusque et nerveuse, tandis que son regard intense passait de Starbuck à Stubb, de Stubb à Flask. Il semblait désirer, par quelque inexprimable volonté intérieure, les électriser du choc brûlant et magnétique accumulé dans la bouteille de Leyde qu’était sa vie. Les trois seconds vacillèrent. Stubb et Flask tournèrent les yeux, l’œil honnête de Starbuck plongea droit vers le pont.

- Maintenant, seconds, je vous nomme tous trois échansons de mes trois alliés païens, mes vaillants harponneurs. Harponneurs, démanchez vos fers! Retournez-les, pointes en bas! Vous, échansons, avancez. Les fers! Tenez-les-moi pendant que je verse!

Aussitôt, passant lentement d’un officier à l’autre, il remplir le creux des harpons avec l’eau de feu contenue dans le broc d’étain.

- Buvez harponneurs! Buvez et jurez… Mort à Moby Dick! Que Dieu nous donne la chasse, si nous ne pourchassons pas Moby Dick jusqu’à sa mort!

Les longs gobelets d’acier barbelé furent levés et, au milieu des cris et des malédictions visant le cachalot blanc, l’alcool fut sifflé simultanément par tous. Starbuck pâlit, se détourna, frissonna. Et Achab se retira dans sa cabine.

 

 

Annexe 5: Moby Dick, de Lak A Barth

Lak A Barth est un groupe de chanteurs marins flibustiers de la baie de Quiberon, en Bretagne. Cette chanson provient de l’album Le Corsaire sans nom paru en 2011. L’extrait sonore de la chanson se trouve sur la radio Internet des chants de marins, Bordel de mer. Il s’agit de la deuxième chanson de l’épisode 126, du 19 février 2012: http://bordeldemer.com/chantsmarins/bordel-de-mer-episode-126/.  Pour écouter la chanson, il suffit de peser sur le triangle gris et avancer l’enregistrement : la chanson débute à 5:54 et se termine à 9:06.

 

Paroles de la chanson :

C'était un sacré fameux capitaine
Parti un jour pour chasser la baleine
Parti au fin fond des quatre océans
Pour y suivre et tuer le léviathan
Moi j'étais un matelot de clipper
Échoué à l'auberge du harponneur
Dans Nantucket je marinais ma peine
Pour un voyage de chasse à la baleine
Harponne-la, Queequeg
Blanche comme la neige
Moby Dick a pris le vent
Elle crache du sang par ses évents

Je me suis embarqué sur le Péquod
Sous les ordres du capitaine Achab
Parti pour chasser jusqu'aux antipodes
Le cachalot le plus impitoyable
Nous avons navigué plus d'une année
Forgeant et préparant harpons et lignes
Renseignés par les navires baleiniers
Nous l'avons suivie jusqu'en mer de Chine


Harponne-la, Queequeg
Blanche comme la neige
Moby Dick a pris le vent
Elle crache du sang par ses évents

C'est le harpon qui blessera la baleine
Ses tranchants sont trempés par le sang
C'est le harpon d'Achab notre capitaine
Sa folie, son orgueil nous perdant
Moby Dick a poursuivi son chemin
trainant Achab prisonnier de son filin
Le Péquod fut envoyé par le fond
La baleine blanche en avait eu raison.

Harponne-la, Queequeg
Blanche comme la neige
Moby Dick a pris le vent
Elle crache du sang par ses évents

 

 

Annexe 6 : Résumé de la séquence didactique Mody Dick

 

Résumé de l'oeuvre : Ismaël s’embarque sur le Pequod, un baleinier commandé par le capitaine Achab. Prêt à passer une saison de chasse à la baleine en haute mer, il est loin de se douter que le capitaine est obsédé par Moby Dick, un cachalot blanc qui lui a arraché la jambe et dont il veut se venger. Au péril de tous, Achab entraine son équipage dans une folle poursuite autour du monde.

 

Justification de l'oeuvre : Dans le but d’initier les élèves aux grands classiques de la littérature, le choix de l’œuvre s’est arrêté sur l’un des récits d’aventures les plus populaires de tous les temps. Ce roman est tout désigné pour transmettre un legs culturel et une somme de connaissances relatives au passé. Après en avoir fait la lecture, les élèves seront en mesure de reconnaitre, quand ils liront d’autres œuvres, les différentes références intertextuelles liées à Moby Dick.

 

Problèmes de lecture : En lisant Moby Dick, un lecteur du premier cycle du secondaire comprendra relativement bien le combat que mène le capitaine Achab envers Moby Dick, le cachalot blanc qui l’a amputé. Toutefois, les lecteurs apprentis se butent à deux problèmes de lecture en particulier :

  • La compréhension d’un vocabulaire associé à un phénomène qui leur est inconnu – ou peu connu –, soit la vie de baleinier et la chasse à la baleine au 19e siècle ;
  • L’évolution du personnage d’Achab tout au long du roman, les élèves ayant l’habitude d’identifier, dès le début de leur lecture, le «bon» et le «méchant».

 

 

Activités de la séquence

 

AVANT LA LECTURE

 

1. Élaborer des attentes de lecture à partir des illustrations de couverture

  • Trois couvertures: deux représentent la chasse à la baleine et l’autre illustre Achab et Queequeg.

 

2. Recherche préparatoire afin de bien comprendre l’œuvre et la chasse à la baleine

  • Groupes d’experts: 1) le lexique relié aux bateaux; 2) les créatures marines et la hiérarchisation des membres de l’équipage; 3) la chasse à la baleine; 4) l’auteur.

 

PENDANT LA LECTURE

 

3. Lecture d’un extrait significatif de Moby Dick

  • Amener les élèves vers un élément névralgique du texte qui leur permettra de mieux comprendre le récit.

 

4. Lecture du début de l’œuvre

  • Permet de camper le narrateur-personnage et d’identifier les éléments de la situation de communication.

 

5. Faire la connaissance des personnages

  • Permet aux élèves de comprendre la relation qu’a chacun des membres de l’équipage avec Achab.

 

6. La couleur blanche de Moby Dick

  • Pourquoi Melville a-t-il choisi la couleur blanche? À quoi associez-vous cette couleur? Pourtant…

 

7. Journal de bord orienté et cercles de lecture

  • Portez une attention particulière au comportement d’Achab et partagez vos impressions

 

8. Écriture de la fin du roman

  • Imaginer la situation finale, la justifier, la partager et choisir celle qui est la plus porteuse de sens.

 

APRÈS LA LECTURE

 

9. « Mon client n’est pas coupable, votre Honneur »

  • La lecture étant subjective, les élèves sont amenés à défendre le comportement d’Achab ou de Moby Dick.

 

10. Écriture de la quatrième de couverture

  • Comme la quatrième de couverture est une critique de l’œuvre, les élèves écrivent un résumé du récit.

 


[1] MELS, Les profils de lecteurs chez les jeunes du secondaire. Action concertée pour le soutien à la recherche en lecture, Gouvernement du Québec, 2005, p. 3.

[2] Herman Melville, Moby Dick. Paris, Classiques abrégés, L’école des loisirs, 2010, 237 p.

[3] Ce texte adopte l’orthographe rectifiée.

[4] Les illustrations de couverture et leurs hyperliens se retrouvent en annexe 1.

[5] Appelé journal de bord pour faire un lien avec la thématique de Moby Dick, cet outil est aussi appelé journal de lecture. Tout au long de la séquence didactique, l’enseignant invitera les élèves à y effectuer les activités d’écriture et à y partager leurs réactions (Dufays et coll., 2009 :182).

[6] Annexe 2.

[7] Par exemple, les élèves pourraient utiliser l’image de l’annexe 3 pour montrer à quel point le cachalot est gigantesque s’il est comparé avec l’humain.

[8] En annexe 4 se retrouve l’extrait dans lequel chacun des personnages est identifié par une couleur différente.

[9] Annexe 2.

[10] Un hyperlien de la chanson ainsi que les paroles se retrouvent en annexe 5.

[11] L’écriture d’une quatrième de couverture est suggérée par la Progression des apprentissages au secondaire pour les élèves du 1er cycle du secondaire (MELS, 2011 : 7).

[12] Schéma inspiré de celui de Jocelyne Giasson dans Compréhension en lecture (Giasson, 1990 : 206).


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