SÉQUENCE DIDACTIQUE SUR LE PASSEUR DE LOIS LOWRY
Introduction
La séquence didactique proposée porte sur Le passeur de Lois Lowry, un roman jeunesse s’inscrivant dans le courant dystopique, un sous-genre du roman d’anticipation. L’intérêt de travailler cette œuvre tient au fait qu’elle soulève des thèmes qui sont propres au genre de la dystopie (comme le libre arbitre, la liberté et la place des lois) tout en restant accessible à un public adolescent. L’œuvre permet aussi d’aborder le sujet du poids des souvenirs et des sentiments ainsi que de la mémoire collective.
Cette séquence s’adresse à des élèves de deuxième secondaire. Les élèves devront préalablement avoir abordé les notions de justification, puisqu’ils auront à réinvestir ces compétences dans plusieurs activités proposées dans la séquence. Ils devront en effet justifier leurs réponses en lien avec l’interprétation du texte, et ce, en utilisant des procédés justificatifs pertinents et les ressources de langue appropriées, telles que des phrases coordonnées ou des subordonnées exprimant la cause (MELS, 2011a). Les thèmes abordés sont adéquats pour des élèves de ce niveau, puisque la liberté et les enjeux liés à la place des lois en société sont des sujets au programme en deuxième secondaire dans le cours d’Éthique et culture religieuse (MELS, 2011b).
Objectifs :
- Replacer Le passeur dans son contexte culturel et comprendre son rôle dans l’histoire du courant de la dystopie.
- Faire des parallèles entre la société dépeinte dans le roman et notre société.
- Réfléchir sur le poids des souvenirs et des sentiments dans le roman et sur la place qu’ils occupent dans une société.
- Effectuer des inférences afin de comprendre les choix du personnage principal.
Avant la lecture
Activité 1 (1 période)
La première activité a lieu avant de commencer la lecture de l’œuvre et sert à la replacer dans son contexte culturel et à préparer les élèves à la lecture d’une œuvre dystopique. Pour ce faire, l’élève est amené à utiliser des stratégies de lecture qui lui permettront de faire ressortir les ressemblances entre plusieurs textes (quatrièmes de couverture) quant à leur thème et au message qu’ils transmettent (Falardeau, 2015a) et à développer ses compétences à « dégager, de la construction de l’univers et en comparaison avec d’autres œuvres, des caractéristiques de genres » (MELS, 2011a). Le problème de lecture travaillé se formule ainsi : qu’est-ce qui fait du Passeur une œuvre dystopique et quel rôle a joué cette œuvre dans ce courant littéraire?
Tout d’abord, on distribue aux élèves un cahier de lecture qui servira tout au long de la séquence (ANNEXE 1)[1]. À la page 2, on présente une série de définitions du mot « dystopie ». Selon la compréhension qu’en ont les élèves, il est possible de travailler sur le sens de ces définitions. On pourrait par exemple utiliser des stratégies de lecture pour dégager le sens des mots inconnus des élèves pour s’assurer que les définitions sont claires pour eux. Par la suite, les élèves sont amenés à travailler sur les pages 3 à 6 du cahier, qui présentent la quatrième de couverture de quatre romans : Le meilleur des mondes d’Aldous Huxley, Fahrenheit 451 de Ray Bradbury, 1984 de Georges Orwell ainsi que Le passeur de Lois Lowry. Les élèves devront aussi utiliser le tableau de la page 7, qui servira à noter leurs observations durant l’exercice. En équipe de 2 ou 3, les élèves doivent lire les quatrièmes de couverture et noter dans le tableau les éléments qui semblent communs aux résumés ou se rattacher aux définitions de la dystopie. Pour guider les élèves, les éléments à repérer ont été regroupés en catégories (lieux et époque, place de la culture et de la religion, liberté et système de lois ainsi que relations interpersonnelles et intimité). Lorsque les élèves ont complété l’exercice, l’enseignant effectue un retour en plénière. Les élèves partagent alors ce qu’ils ont trouvé et justifient leurs réponses en s’appuyant sur des exemples tirés des quatrièmes de couverture ou sur les définitions de la dystopie. Par exemple, les élèves pourraient avoir relevé le fait que, dans Le passeur, les cellules familiales sont constituées par un comité de sages et que les fonctions sociales de chaque individu sont aussi attribuées par ce comité, ce qui illustre la catégorie des relations interpersonnelles et de l’intimité.
Afin de faire des liens entre la culture littéraire et la culture des élèves, l’enseignant leur demande s’ils ont déjà lu des œuvres (ou vu des films) qui présentaient des caractéristiques semblables à celles qui viennent d’être abordées. Les élèves doivent expliquer quelles sont les caractéristiques qui leur permettent d’affirmer que l’œuvre qu’ils ont lue appartient bel et bien au courant de la dystopie. Selon ce qui est soulevé par les élèves, l’enseignant peut compléter le tableau en ajoutant des caractéristiques. Il peut aussi projeter des quatrièmes de couverture de romans jeunesse plus récents (comme Hunger Games de Suzanne Collins, Divergence de Veronica Roth ou Uglies de Scott Westerfeld[2]). On pourra encore une fois faire ressortir les éléments qui font de ces romans des œuvres dystopiques et les inscrire dans le tableau.
Pour conclure cette première activité, l’enseignant fait remplir aux élèves la ligne du temps de la page 8 sur laquelle ils doivent placer les romans travaillés dans le cadre de cette activité. On retrouvera donc Le passeur au centre de la ligne du temps avec, à sa gauche, Le meilleur des mondes, Fahrenheit 451 et 1984 (des romans adressés à un public adulte) et, à sa droite, Hunger Games, Divergence et Uglies (des romans jeunesse). Le but est ici de mettre en évidence le rôle charnière qu’a joué Le passeur dans l’histoire du courant de la dystopie. L’enseignant explique aux élèves que Le passeur est le premier roman dystopique adressé aux adolescents et que c’est cette initiative de Lois Lowry qui a donné le coup d’envoi à la publication des nombreuses œuvres dystopiques jeunesse que l’on connait aujourd’hui. Finalement, l’enseignant présente aux élèves la section du cahier de lecture où ils auront à noter différents passages du Passeur dans lesquels se manifestent des éléments de dystopie durant la lecture de la première partie du roman (pages 1 à 120). L’enseignant peut d’abord faire un modelage pour un élément qui caractérise l’univers dystopique afin que les élèves comprennent mieux comment procéder pour repérer les différents passages dans le roman. Ils pourront ainsi mettre en pratique leurs nouveaux acquis en faisant du repérage dans le texte, mais ces notes leur serviront aussi lors de la deuxième activité.
Pendant la lecture
Activité 2 (Lecture + 1½ période)
La deuxième activité porte sur les pages 11 à 120 du roman, soit du début jusqu’au moment où Jonas se prépare à recevoir sa première formation pour devenir le dépositaire de la mémoire. Les élèves devront donc avoir lu cette partie au moment de commencer le travail. Cette activité fait le lien entre le travail sur le genre amorcé dans l’activité 1 et une approche plus philosophique de l’œuvre. Le problème de lecture proposé aux élèves est le suivant : quelle réflexion sur la place des lois et du libre arbitre en société la lecture du Passeur permet-elle de faire? Ainsi, les élèves seront appelés à faire des liens entre la société dystopique dépeinte dans le roman et la société dans laquelle ils vivent. De plus, les élèves auront à utiliser des stratégies de lecture qui leur permettront d’expliquer et de justifier leurs réactions en établissant des ressemblances ou des différences entre la vision du monde proposée dans des textes et leur vision personnelle du monde (Falardeau, 2015b), et ce, en utilisant les procédés de justification adéquats (MELS, 2011a).
Pour réaliser cette activité, les élèves travailleront en équipes de 4 à 6 personnes et procéderont à une discussion dirigée (Falardeau, 2015b). Dans chaque équipe, ils devront désigner un meneur, qui gérera le droit de parole, un secrétaire, qui notera les réflexions de l’équipe, et un responsable du temps, qui s’assurera que l’équipe ait le temps de répondre à toutes les questions. Ce travail en sous-groupes permettra à tous les élèves d’échanger (contrairement au travail en grand groupe) et de bâtir une réelle réflexion en mettant en commun leurs différentes visions.
Les questions sont présentées à la page 13 du cahier de lecture. Les quatre premières sont plus générales et visent à faire réfléchir les élèves sur les concepts de lois, de liberté et de libre arbitre. Comme ce sont des notions qui sont abordées dans le cours d’éthique et de culture religieuse en 2e secondaire (MELS, 2011b), il pourrait être intéressant que ces quatre questions soient travaillées dans le cadre de ce cours. Les questions 5 à 7 portent exclusivement sur le roman. Les élèves sont appelés à analyser le roman sur le plan des trois concepts énoncés précédemment. Les questions 8 à 10 exigent des élèves qu’ils établissent des liens entre la société présentée dans Le passeur et celle dans laquelle ils vivent. Il est à noter que la question 8 pourrait poser problème aux élèves puisque, à ce stade de la lecture, ils n’ont pas encore pris connaissance de toute l’histoire de la communauté. C’est pour cette raison que cette question sera reprise lors de l’activité 3.
Les élèves disposent d’une période complète pour effectuer la réflexion en équipe. Ils devront utiliser leur roman et les notes prises lors de la lecture, particulièrement les caractéristiques du roman dystopique qu’ils auront associées à la catégorie « Liberté et système de loi ». L’élève qui tient le rôle de secrétaire devra noter les réponses de ses coéquipiers en vue du retour en classe. Lors d’une deuxième période, l’enseignant effectue un retour en plénière et invite les élèves à partager leurs réponses. L’enseignant agit à titre de médiateur : il questionne les élèves, les pousse à préciser leurs réponses et fait des liens entre celles-ci. Selon la direction que prendra la discussion, l’enseignant pourra poser des questions supplémentaires pour faire des liens entre notre société et celle dépeinte par Lois Lowry. Il pourrait, par exemple, demander aux élèves s’ils croient qu’un tel système pourrait un jour devoir être appliqué dans notre pays ou encore comment ils réagiraient s’ils devaient vivre sous un tel régime (Croyez-vous que la société fonctionnerait mieux si un comité de sage choisissait notre nom, notre famille, notre métier, notre conjoint, nos enfants, etc.?). Il sera finalement important que l’enseignant insiste pour que les élèves justifient leurs propos à l’aide d’exemples ou d’éléments du texte. Il s’agit ici pour les élèves de réinvestir des savoir-faire acquis antérieurement.
Activité 3 (Lecture + 1½ période)
La troisième activité porte sur les pages 121 à 261, c’est-à-dire à partir du moment où Jonas commence sa formation de dépositaire de la mémoire jusqu’au moment où il s’apprête à quitter la communauté. Cette activité se veut une continuité du travail de réflexion philosophique amorcé lors de la précédente activité et vise à amener les élèves à faire des inférences et à interpréter certains passages du texte afin de répondre au problème de lecture suivant : comment les souvenirs et les émotions sont-ils perçus dans l’univers du Passeur?
Tout d’abord, les élèves lisent la deuxième partie du roman. Une section du cahier de lecture (pages 14 à 17) est conçue pour que les élèves puissent résumer les différents souvenirs que le Passeur fait vivre à Jonas. Ils doivent donc prendre des notes au fil de leur lecture afin de garder des traces pour chacun des souvenirs transmis, cela facilitera le travail d’analyse en plus d’exiger des élèves de pouvoir montrer leur compréhension en synthétisant les informations.
Ensuite, en équipes, ils doivent créer des catégories dans lesquelles ils classent les souvenirs notés dans leur cahier de lecture. Ils doivent organiser ces catégories de façon à mettre en évidence les souvenirs qui ont eu le plus d’impact sur Jonas et ceux qui en ont eu le moins et les présenter sous forme de tableau ou de schéma à la page 18 du cahier de lecture. Ces classifications permettent aux élèves d’effectuer une première réflexion sur le poids des souvenirs, puisque cela leur permet d’observer que Jonas ne perçoit pas tous les souvenirs de la même façon, les souvenirs se rattachant aux sensations physiques l’affectant moins que ceux portant sur des émotions fortes, comme l’amour.
La période suivante, l’enseignant réalise une table-ronde avec les élèves. Celle-ci a pour objectif de faire discuter les élèves sur le poids des souvenirs et l’importance de la mémoire collective afin de les préparer à l’évaluation en lecture qui a lieu dans le cadre de l’activité 4. Le rôle de l’enseignant lors de cette discussion consiste à lire des extraits et poser des questions aux élèves afin de faire avancer leur réflexion. Les questions proposées dans l’Annexe 3 sont des pistes pouvant être exploitées par l’enseignant, mais celui-ci peut les ajuster en fonction des réponses des élèves. Les élèves, quant à eux, doivent répondre en justifiant leur propos à l’aide des procédés adéquats et d’exemples tirés du schéma ou tableau qu’ils ont produit.
Les premières questions posées par l’enseignant (Le choix de l’Identique) servent à effectuer un retour sur les thèmes abordés lors de l’activité 2 à la lumière de la lecture de la deuxième partie du roman. Cela permettra aux élèves de faire des liens entre les thèmes de la première activité et ceux portant sur le poids des souvenirs et des émotions durant le reste de la table-ronde. Par la suite, les questions portent sur le fardeau des souvenirs. Les élèves sont alors invités à réfléchir sur les raisons qui ont poussé les sages à éradiquer les souvenirs de l’Identique et à la place des souvenirs dans une société. Le troisième bloc de questions porte sur un extrait du roman dans lequel Jonas découvre l’amour et en parle à ses parents. On cherche ici à faire réfléchir les élèves sur les réactions de Jonas et sur la place des sentiments dans la société. Finalement, le dernier bloc de questions est en lien avec la solitude ressentie par Jonas, unique détenteur des souvenirs. Les élèves doivent ici réfléchir aux liens qui unissent souvenirs et émotions et à l’idée du partage des souvenirs. L’enseignant peut aborder la notion de mémoire collective avec les élèves.
Activité 4 (2 périodes)
La quatrième activité rassemble les trois problématiques de lecture énoncées précédemment, puisque les élèves auront besoin de saisir à la fois le concept de dystopie, la place des lois par rapport à la liberté et au libre arbitre et l’idée du poids des émotions pour arriver à comprendre la décision de Jonas. La première partie de l’activité porte sur les pages 262 à 288 du roman. Cette portion du livre pourra être lue à voix haute par l’enseignant, qui prendra des pauses aux moments clés pour questionner les élèves et interagir avec eux. Par exemple, il peut demander aux élèves, avant même de commencer sa lecture, s’ils croient que Jonas réussira à s’enfuir. Il pourrait ensuite s’arrêter au milieu de la page 263, juste avant que l’on ne sache ce qui a changé les plans de Jonas, pour demander aux élèves d’anticiper l’évènement qui poussera Jonas à quitter plus rapidement la communauté. Comme il s’agit ici de formulations d’hypothèses, il sera parfois difficile pour les élèves de justifier leurs réponses, mais l’enseignant peut les inviter à utiliser des éléments du livre, les caractéristiques du personnage de Jonas par exemple, pour appuyer leurs propos (Je crois que Jonas réussira à s’enfuir parce qu’il semble déterminé à mettre fin à la situation d’ignorance dans laquelle se trouvent les individus de la communauté).
La suite de l’activité 4 porte sur l’ensemble du roman. Lors de la période suivante, l’enseignant remet aux élèves un document sur lequel se trouvent deux questions auxquelles les élèves devront répondre par écrit, en équipes de deux ou trois : Quel évènement fait en sorte que Jonas remet en question le fonctionnement de l’Identique? Croyez-vous que Jonas a pris la bonne décision en quittant l’Identique pour que les souvenirs et les émotions puissent être partagés par tous les membres de la communauté? L’enseignant se servira de cette activité pour évaluer les élèves en lecture quant à leurs aptitudes à interpréter des textes littéraires et à réagir à ceux-ci, mais également pour faire l’évaluation formative, en écriture, de leur capacité à justifier leurs propos et à utiliser des éléments du texte pour appuyer leurs idées (MELS, 2006; MELS, 2011a). La justification de leurs réponses nécessitera que les élèves mobilisent des connaissances qui ont été rappelées lors de la première partie de l’activité 4.
Après la lecture
Activité 5 (2½ périodes)
La cinquième et dernière activité regroupe aussi les trois problèmes de lecture dans une visée d’intégration. L’enseignant propose aux élèves une tâche d’écriture qui consistera en une situation d’évaluation à la fois pour les compétences en lecture et en écriture. En se mettant dans la peau du personnage de Jonas, les élèves devront rédiger une lettre adressée à ses parents, dans laquelle ils devront justifier, en se basant sur leur compréhension du roman, pourquoi ils ont choisi de quitter l’Identique (J’ai choisi de quitter l’Identique parce que je souhaitais que tous les individus de la communauté connaissent les sensations physiques agréables comme la chaleur du soleil et les émotions comme l’amour et la joie. De plus, je ne voulais pas être le seul à supporter le fardeau des souvenirs douloureux comme celui de la guerre). De plus, ils auront à préciser ce que leur départ implique pour les individus de la communauté, c’est-à-dire qu’ils devront expliquer à leurs parents comment ils doivent s’y prendre pour faire face aux émotions et aux souvenirs.
L’enseignant pourra évaluer la capacité des élèves à recourir à des procédés justificatifs à l’écrit, d’autant plus que l’activité 4 leur aura donné l’occasion de recevoir une rétroaction par le biais de l’évaluation formative de cette composante de la compétence en écriture. L’évaluation porte sur les compétences des élèves à s’adapter à la situation de communication (se mettre dans la peau de Jonas, référer à l’univers du roman, etc.) et à écrire un texte cohérent (faire progresser efficacement les idées, justifier adéquatement ses propos, etc.) (MELS, 2006). Également, cette tâche d’écriture, qui implique une compréhension fine de l’histoire ainsi que des aptitudes relatives à l’interprétation d’un texte littéraire, pourra en plus servir d’évaluation en lecture (MELS, 2006).
Conclusion
Cette séquence didactique aura permis aux élèves de se familiariser avec les caractéristiques du roman dystopique, de comprendre la pertinence de pouvoir faire des liens avec d’autres œuvres pour mieux saisir les thèmes ou les concepts abordés, d’élargir leurs horizons culturels en se penchant sur des questionnements éthiques et philosophiques soulevés par une œuvre littéraire, d’utiliser des procédés de justification au service de la réflexion sur cette œuvre et, enfin, de réinvestir toutes ces connaissances et ce travail d’analyse au sein d’une production écrite. En plus d’offrir la possibilité d’une certaine multidisciplinarité, cette séquence intègre à la fois des apprentissages en lecture et en écriture ainsi qu’un travail sur la langue et constitue une occasion pour les élèves de faire des liens avec leur propre réalité. La présence d’articulation au sein de certaines des activités permet de rendre les apprentissages plus significatifs aux yeux des élèves, qui peuvent prendre conscience de l’utilité des savoirs et savoir-faire étant donné qu’ils sont amenés à les mettre au service les uns des autres.
Enfin, les thèmes de la liberté, du libre arbitre et de la place des lois ouvrent la porte à de multiples possibilités, notamment pour la tâche d’écriture, pour laquelle on aurait très bien pu demander aux élèves d’écrire une suite à l’histoire de Jonas ou encore de décrire ce que serait pour eux un monde idéal, par exemple.
Bibliographie
Bradbury, R. (2000). Fahrenheit 451. Paris, France : Gallimard.
Bradbury, R. (2011). Fahrenheit 451. Paris, France : Belin.
Collins, S. (2009). Hunger Games. Paris, France : Pocket jeunesse.
Falardeau, E. (2015a). Fiche pour l’enseignant — Composante : Je porte un jugement critique. [PDF]. Repéré à : http://media.wix.com/ugd/2facca_7422afc394114346a96df94b6a0f2256.pdf
Falardeau, E. (2015b). Fiche pour l’enseignant — Composante : Je construis du sens, Sous-composante : Je réagis à un texte. [PDF]. Repéré à : http://media.wix.com/ugd/2facca_5542fcdaf89b4616a4c42a15516c175b.pdf
Huxley, A. (2013). Le meilleur des mondes. Paris, France : Plon
Lowry, L. (1994). Le passeur. Paris, France : L’école des loisirs.
Ministère de l’Éducation, des Loisirs et des Sports, (2011a). Progression des apprentissages au secondaire. Français, langue d’enseignement. Repéré à : www.mels.gouv.qc.ca/progression/secondaire/
Ministère de l’Éducation, des Loisirs et des Sports, (2011b). Progression des apprentissages au secondaire. Éthique et culture religieuse. Repéré à :www.mels.gouv.qc.ca/progression/secondaire/
Ministère de l’Éducation, des Loisirs et des Sports, (2006). Programme de formation de l’école québécoise au premier cycle du secondaire. Domaine des langues. Français, langue d’enseignement. Repéré à : http://www1.mels.gouv.qc.ca/sections/programmeFormation/secondaire1/pdf/chapitre051v2.pdf
Orwell, G. (1972). 1984. Paris, France : Gallimard.
Roth, V. (2014). Divergence. Varenne, Québec : Éditions AdA Inc.
Westerfeld, S. (2011). Uglies. Paris, France : Pocket Jeunesse.
[1] Une version pour l’enseignant de ce cahier de lecture a été préparée (ANNEXE 2). On y trouve des pistes de réponses possibles, mais il ne s’agit pas d’un corrigé à proprement parler, puisqu’il s’agit essentiellement d’un travail d’interprétation et que plusieurs réponses peuvent être proposées.
[2] Le genre de la dystopie étant très populaire chez les jeunes ces dernières années, de nombreux romans sont publiés annuellement. L’enseignant peut donc adapter cette partie afin de sélectionner des œuvres plus récentes.
ANNEXE 3
Piste de questions pour guider la table ronde
1.
Le choix de l'Identique
p.158 :
« - Nous avons fait ce choix, le choix d'en venir à l'I
dentique. Avant moi, avant la génération pré
cédente, avant celle d'avant et ainsi de suite. Nous av
ons abandonné la couleur quand nous avons
abandonné le soleil et supprimé les différences.
Il ré
fl
échit un moment.
- Nous avons conquis le contrôle de beaucoup de choses. Mais
nous avons dû en abandonner
d'autres.
- Nous n'aurions pas dû! dit Jonas d'un ton farouche.
Le Passeur sembla saisi par la force de la réaction de
Jonas. Puis il eut un sourire désabusé.
- Tu es parvenu bien vite à cette conclusion, dit-il. Cel
a m'a pris de nombreuses années. Peut-être
ta sagesse viendra-t-elle plus vite que la mienne. »
p.170 :
« Parfois j'aimerais qu'ils fassent plus souvent appel à
ma sagesse; il y a tant de choses que je
pourrais leur dire, des choses que j'aimerais pouvoir cha
nger! Mais ils ne veulent pas de
changements. Leur vie est tellement ordonnée, telleme
nt prévisible, sans douleur. C'est ce qu'ils
ont choisi. »
Lors de votre discussion dans le cadre de l'activité 2, on vous posait la qu
estion suivante :
«
Les lois de l'Identique différent de celles de la société
dans laquelle nous vivons. Pourquoi
crois-tu que les lois de l'univers du
Passeur
ont été
cr
éées? »
À la lumière de ta lecture et de
la lecture des extraits précédents, ta réponse a-t-elle changé? Pourquoi c
rois-tu que l'Identique
a été
cr
éé?
Crois-tu que les habitants de la communauté de Jonas sont malheureux de la situ
ation dans
laquelle ils vivent? Crois-tu qu'ils souhaiteraient vivre dans une société comm
e la nôtre?
Pourquoi?
2. Le fardeau des souvenirs
pp
.185- 186 :
« - Mais pourquoi est-ce que les souvenirs ne peuvent pas être
à tout le monde? Je pense que ce
serait peut-être un peu plus facile si on les partageait. Vo
us et moi n'aurions pas à porter un tel
fardeau si tout le monde en avait un bout.
Le passeur soupira.
- Tu as raison, dit-il. Mais alors tout le monde devrai
t supporter ce fardeau et cette douleur. Ils ne
veulent pas de ça. Et c'est ça la vraie raison pour laque
lle le dépositaire leur est tellement vital et
qu'ils l'honorent tellement. Ils m'ont choisi - et toi a
ussi - pour les débarrasser de ce fardeau. »
Pourquoi Jonas et le passeur parlent-ils des souvenirs comme d'un fardeau?
Pourquoi crois-tu que les souvenirs ont été éradiqués de l'Identique?
À quoi servent les souvenirs dans une société? À quoi sert l'histoire?
Crois-
tu
, comme Jonas, que les souvenirs et les sentiments sont un fardeau dans n
otre société?
3
.
La découverte des sentiments
pp.
204-208 :
- J
’
ai vraiment aimé ce souvenir, pourtant. Je vois pourquoi c
’
est votre préféré. Je n
’
ai pas réussi
à saisir le nom du sentiment global, de l
’
émotion qui était si présente dans la piè
ce.
- L
’
amour, dit le Passeur.
Jonas répéta après lui. « L
’
amour. » C
’
était un mot et un concept nouveaux pour lui.
Ils se turent tous les deux un instant. Puis Jonas dit :
- Passeur?
- Oui?
- Je me sens très bête de dire ça. Très, très bête.
- Ce n
’
est pas la peine. Rien n
’
est bête ici. Fais confiance aux souvenirs et aux senti
ments qu
’
ils
te donnent.
- Eh bien, dit Jonas en fixant le sol, je sais que vous
n
’
avez plus ce souvenir puisque vous me l
’
avez transmis, alors peut-être que vous n
’
allez pas comprendre
...
- Je comprendrai. Il me reste une vague trace de celui-ci
et j
’
ai beaucoup d
’
autres souvenirs de
familles, de fêtes et de bonheur. D
’
amour.
Jonas lâcha d
’
un coup ce qu
’
il ressentait.
- Je pensais que
...
bon, je vois bien que ce n
’
était pas pratique de vivre comme ça, avec les
anciens au même endroit, et peut-être qu
’
on ne s
’
occupait pas aussi bien d
’
eux qu
’
on le fait
maintenant et que notre façon à nous de faire les chose
s est mieux organisée. Mais quand même,
je pensais, en fait je sentais, que c
’
était assez agréable à l
’
époque. Et que j
’
aimerais bien que ce
soit encore comme ça et que vous soyez mon grand-parent. L
a famille dans le souvenir avait l
’
air
un peu plus
...
Il s
’
arrêta faute de trouver le mot qu
’
il cherchait.
- Un peu plus complète? Suggéra le Passeur.
Jonas acquiesç
a.
- J
’
ai bien aimé l
’
amour, avoua-t-
il
–
il jeta nerveusement un coup d
’œ
il au haut-parleur pour vé
rifier que personne n
’
écoutait. J
’
aimerais bien qu
’
on l
’
ait encore, murmura-t-il. Bien sûr, ajouta-t-
il rapidement, je comprends que cela ne marcherait pas trè
s bien. Et qu
’
il vaut bien mieux être
organisé comme nous le sommes maintenant. Je vois bien que
c
’
était dangereux comme façon de
vivre.
- Que veux-tu dire?
Jonas hésita. En réalité il ne savait pas exactement
ce qu
’
il avait voulu dire. Il sentait que cela
impliquait une forme de risque mais il ne savait pas laquelle.
- Eh bien, finit-il par dire à court d
’
arguments, ils avaient du feu au milieu de la pièce. Et il y
avait des chandelles allumées sur la table. Je vois bien po
urquoi ces choses ont été interdites.
Quand même, dit-il doucement, presque en lui-même, j
’
aimais bien leur lumière. Et leur chaleur.
Pourquoi crois-tu que Jonas dit-il que «
c'
était dangereux » comme façon de vivre? Parle-t-
il
seulement des risques d'incendies?
Pourquoi Jonas a-t-il de la difficulté à exprimer ses inquiétudes selon toi?
- Papa? Maman? demanda timidement Jonas après le repas du
soir. J
’
ai une question que j
’
aimerais vous poser.
-
Qu
’
est-ce que c
’
est? demanda son père.
Il se forç
a
à prononcer les mots bien qu
’
il
se sentit rougir de gêne. Il les avait répétés pendant tou
t
le chemin du retour.
- Est-ce que vous m
’
aimez?
Il y eut pendant quelques instants un silence embarrassé. Pui
s Papa émit un petit gloussement.
- Jonas! Toi! Et la précision du langage, alors?
- Qu
’
est-ce que tu veux dire? demanda Jonas.
Une réaction amusée n
’
était pas du tout ce à quoi il s
’
attendait.
- Ton père veut dire que tu as utilisé un terme très génér
al, tellement dé
nu
é de sens qu
’
il est
pratiquement tombé en dé
su
étude, expliqua sa mère avec soin.
Jonas les regarda d
’
un air ébahi. Dé
nu
é de sens? Jamais auparavant il n
’
avait ressenti quelque
chose d
’
aussi riche de sens que ce souvenir.
- Et bien entendu notre communauté ne peut pas fonctionner c
orrectement si les gens n
’
emploient
pas un langage précis. Tu pourrais demander
:
« Est-ce que vous appréciez ma présence? » Et la
réponse est oui.
- Ou bien, suggéra son pè
re
:
« Est-ce que vous êtes fiers de mes réalisations? » Et la
réponse est
oui, de tout c
œ
ur!
- Est-ce que tu comprends pourquoi c
’
est impropre d
’
utiliser un mot comme « aimer »? demanda
Maman.
Jonas hocha la tête.
- Oui, merci, je comprends, répondit-il lentement.
Ce fut la première fois qu
’
il mentit à ses parents.
Pourquoi les parents de Jonas disent-ils que l'amour est « un terme dé
nu
é de sens »? Pourquoi
Jonas pense-t-il le contraire?Pourquoi Jonas ment-il à ses parents?Pourquoi crois-tu que les émotions ont été éliminées dans l'Identique?
À quoi servent les émotions?
4. La solitude
p.219 :
« Jonas se traîna jusqu'au banc qui se trouvait près de la c
abane et s'assit, submergé par un
sentiment de perte. Son enfance, ses amitiés, son insouci
ance - toutes ces choses semblaient lui é
chapper des mains. À cause de sa sensibilité nouvelle et ac
crue, autres riaient et criaient en jouant
à la guerre. Mais il savait qu'ils ne pouvaient pas comprendr
e pourquoi sans les souvenirs. Il é
prouvait tellement d'amour pour Asher et Fiona. Mais eux n
e pouvaient l'éprouver en retour sans
les souvenirs. Il éprouvait tellement d'amour pour Asher et
pour Fiona. Mais eux ne pouvaient l'é
prouver en retour sans les souvenirs. Et il ne pouvait pas le
s leur donner. Jonas savait certitude
qu'il ne pouvait rien changer. »
p.249 :
« -Ce qu'il y a de pire quand on détient les souvenirs, ce n'es
t pas la douleur. C'est la solitude
dans laquelle on se trouve. Les souvenirs sont faits pour êtr
e partagé
s.
»
Pourquoi Jonas se sent-il si seul?
Jonas dit que « les souvenirs sont faits pour être partagés ». Crois-tu qu'il e
st plus facile de
supporter certains souvenirs lorsqu'on les partage avec d'autres membres d'une
communauté?
Pourquoi?
Quel lien peut-on faire entre les souvenirs et les émotions?
Certains souvenirs sont-ils plus lourds à porter que d'autres pour Jonas? Le
s souvenirs lui
font-ils vivre les mêmes émotions?