Ce texte présente une séquence didactique construite à partir du roman Izo de Pascal de Duve. Ce récit original pose de nombreux défis, par sa forme difficile et son histoire éclatée. Il s’agit d’une œuvre intéressante à présenter, notamment parce qu’elle permet d’aborder la situation des littératures francophones périphériques par rapport à la littérature française, dans le deuxième cours de littérature au cégep par exemple.

Le premier problème soumis aux élèves est d’identifier ce qui fait d’Izo un être surréaliste. Le deuxième problème se formule ainsi : comment expliquer l’existence d’Izo en faisant un lien entre le rapport d’Izo à la mort et le développement de son identité ? Pour arriver à y répondre, les élèves devront d’abord définir le rapport qu’entretient Izo avec la mort, puis observer comment l’identité du personnage évolue pour en arriver à expliquer l’origine d’Izo. Ce problème a été, en partie, inspiré de l’article d’André Petitjean intitulé « Des récits étiologiques : les mythes d’origine du monde »¹ . En effet, Pascal de Duve crée réellement un mythe d’origine avec la naissance de son personnage.

Le premier outil à utiliser est le paratexte de l’œuvre parce que la couverture est un tableau de Magritte. Il faut faire parler les élèves et leur demander comment ils expliquent la signification de l’image. Les tableaux L’énigme de Narcisse de Salvador Dali et Le radeau de la Méduse de Géricault sont ensuite présentés, pour permettre aux élèves de distinguer les caractéristiques de représentations réelles ou surréelles. Les élèves lisent enfin une page du début de Thérèse Raquin où le personnage principal est décrit, puis la comparent au début d’Izo pour ressortir les caractéristiques de chacun. En établissant des liens entre les quatre œuvres, les élèves devront trouver eux-mêmes, par induction, les caractéristiques du réalisme et du surréalisme. Cette approche s’inscrit dans la même lignée que celle préconisée par Michèle Lusetti, c’est-à-dire « qu’on arrive par des essais de globalisation et de généralisation à une modélisation à partir de traits communs à plusieurs textes² ».

Pendant les semaines consacrées à la lecture, la question de l’identité belge et sa situation de périphérie par rapport à la France sera présentée aux élèves. Une histoire de « newfie » peut être une bonne entrée en matière pour expliquer que ce sont les Belges qui jouent ce rôle dans les histoires des Français. Après un court exposé magistral sur la problématique de l’identité des Belges, les élèves liront un extrait du Manifeste du surréalisme de Breton et en ressortiront les caractéristiques pour les comparer avec ce qui a été identifié auparavant à partir du tableau de Dali.

Dans un deuxième temps, la méthode présentée par Jean-Maurice Rosier dans son article « Le surréalisme de Belgique : un problème d’histoire littéraire ? » sera employée. Elle consiste à soumettre aux élèves différents types de textes, très courts, écrits par les surréalistes belges (surtout Nougé et Magritte)³ . À partir de ces textes, les élèves devront dégager les éléments de contradiction qui composent la problématique des écrivains belges : se rapprocher tout en s’éloignant. Le dernier exercice va se faire à partir d’un extrait du Petit Prince de Saint-Exupéry, celui où le Petit Prince visite les différentes planètes. Après l’analyse par équipe de cet extrait, les élèves devront le mettre en rapport avec l’extrait d’Izo où le personnage principal s’initie successivement à plusieurs religions. Ils devront s’exercer à mettre différents passages en relation pour être en mesure de dégager l’ironie et l’absurde qui existent dans les deux textes. La compréhension de ce passage est primordiale pour arriver à résoudre le problème d’identité de l’Izo.

Après la lecture du roman, les tableaux de Magritte évoqués dans le texte seront présentés aux élèves et ces derniers devront retrouver les passages où il en est question. Ils devront expliquer les agissements étranges d’Izo par rapport au cadre très réaliste dans lequel s’inscrit l’univers du roman. Le deuxième problème va être abordé par la présentation d’exemples de mythes d’origine : un extrait de la « Genèse », tiré de La nouvelle traduction de la Bible, et un autre tiré de la mythologie grecque . À partir de ces deux textes, les élèves dégageront les caractéristiques des mythes d’origine pour ensuite tenter d’expliquer le mythe d’origine contenu dans Izo. Ils devront aussi définir la construction de l’identité d’Izo et déceler l’élément déclencheur de sa mort en se référant à l’exercice effectué à partir du Petit Prince. La façon d’évaluer la compréhension des deux problèmes et la maîtrise des compétences se fera en deux temps. La première, formative, consistera en une création d’une quinzaine de lignes, à la manière de Pascal de Duve, dans laquelle les élèves expliqueront comment Izo s’est retrouvé à Paris (il s’agit d’un trou dans le récit). Enfin, tout le travail accompli en étapes successives trouvera son achèvement dans une rédaction dans laquelle les élèves seront invités à réfléchir sur le caractère surréaliste d’Izo.

---
¹ André PETITJEAN, « Des récits étiologiques : les mythes d’origine du monde », Pratiques, n^o51, septembre 1986, p. 86-111.
² Michèle LUSETTI, « L’aire du héros. Quelques obstacles à la compréhension d’une notion », Recherches, n^o19, 2e semestre, 1993, p. 33.
³ Jean-Maurice ROSIER, « Le surréalisme de Belgique : un problème d’histoire littéraire ? », Pratiques, n^o93, mars 1997, p. 94.
⁴ Jacques Desautels, Dieux et mythes de la Grèce ancienne, Québec, Presses de l’Université Laval, 1988.