L’œuvre et le problème de compréhension qu’elle pose aux élèves
Cette situation-problème porte sur le roman La fée carabine de Daniel Pennac. Le problème que pose la lecture de ce roman est la compréhension et l’interprétation du discours humoristique, problème qui se divise en cinq sous-problèmes. Trois d’entre eux sont relatifs à des éléments relevant de la compréhension globale du texte. Il s’agit de l’histoire, des personnages et de l’utilisation des stéréotypes du roman policier par l’auteur. Les deux autres relèvent d’éléments plus spécifiques du discours, à savoir les figures de rhétorique (de mot ou de pensée) et l’utilisation du registre de langue familier parisien. Cette séquence didactique vise à ce que les élèves puissent, lors de leur lecture et en fin de parcours, saisir l’humour qui relève de tous ces éléments.
La séquence didactique
Les activités d’apprentissage AVANT la lecture
L’humour qui relève de la compréhension globale du roman
Deux activités sont destinées à préparer les élèves pour qu’ils saisissent l’humour qui se dégage de la compréhension globale du roman. La première touche la compréhension de l’histoire qui est porteuse d’humour à deux égards. Elle est drôle en elle-même, et elle l’est doublement lorsqu’on connaît les conceptions personnelles de Daniel Pennac. C’est pourquoi les élèves regarderont une entrevue faite avec Daniel Pennac. Ensuite, ils participeront à une activité-synthèse au cours de laquelle ils seront appelés, en groupe, à construire un tableau intitulé « Les conceptions personnelles de Daniel Pennac ». Lors de la lecture du livre, cet outil leur permettra de faire des liens entre l’auteur et son texte et, à plus forte raison, de comprendre l’humour qui peut se dégager de ces liens.
La seconde activité a pour but de faire préparer par les élèves un outil qui leur permettra, lors de la lecture, de constater l’humour qui relève de l’utilisation que l’auteur fait des stéréotypes du genre policier (opposé, caricature, etc.). Après un remue-méninges en classe portant sur ces derniers, les élèves prennent en note ceux qui sont retenus afin de pouvoir les confronter, lors de la lecture, à l’utilisation que Pennac en fait. Effet collatéral intéressant, cet exercice permet aussi de faciliter la compréhension du texte puisque ce roman reproduit certains stéréotypes du genre policier avec lesquels l’élève est plus familier. Le reste du travail portant sur l’humour qui se dégage de la compréhension globale de l’histoire sera fait pendant la lecture.
L’humour qui relève de la compréhension d’éléments spécifiques du roman
Le principal travail de préparation porte sur la compréhension des éléments spécifiques du discours dans le roman. La première activité vise l’apprentissage par les élèves d’une stratégie pour construire le sens des mots difficiles, ce roman en possédant plusieurs. Cette stratégie (Giasson, 1990) amène l’élève à observer les indices que donnent le mot lui-même et son contexte avant d’en formuler une définition. L’élève, à partir des explications de l’enseignant, est d’abord invité à conceptualiser la stratégie. Il observe ensuite sa mise en œuvre par l’enseignant, s’approprie la stratégie par modelage pour finalement l’exercer sur un extrait. Parce qu’elle permettra aux élèves de comprendre les mots du texte, cette stratégie facilitera leur compréhension de l’apport humoristique des figures de rhétorique et de l’utilisation du registre familier parisien.
La deuxième activité vise à faire conceptualiser chez les élèves les cinq figures de rhétorique les plus présentes dans La fée carabine : la métaphore, la métonymie, la comparaison, l’hyperbole et l’ironie. Cette conceptualisation se fait par un travail sur un corpus d’exemples au cours duquel l’enseignant, par questionnement interactif, amène les élèves à se faire une représentation théorique d’une figure et à la définir pour finalement l’associer au métalangage qui s’y rapporte. L’enseignant s’assurera que les élèves comprennent bien l’effet créé dans chacun des exemples en discutant la question avec eux.
La troisième activité a pour but de faire constater aux élèves l’effet humoristique que crée l’utilisation du registre familier lorsqu’elle contribue à dédramatiser une situation. L’enseignant traduit, dans une langue soutenue et sur un ton neutre, un passage du roman où ce phénomène est saillant. En faisant comparer aux élèves sa production et l’extrait authentique, il les amène à déduire, en discutant avec eux, que l’effet humoristique provient de l’utilisation du vocabulaire qui dédramatise la situation. Il leur mentionne ensuite, puisqu’ils n’ont pas les outils pour le faire, que ce vocabulaire appartient à la langue orale, voire populaire, de Paris.
La dernière activité est une consolidation des acquis faits lors des trois activités précédentes. Six équipes travaillent sur six extraits différents de La fée carabine. Chaque équipe, après que chacun des membres a travaillé à ces tâches seul, relève et donne la définition des mots difficiles. De plus, elle identifie les mots du registre familier qui créent un effet humoristique et en discute l’effet. Finalement, elle repère, classifie et explique les figures de rhétorique. S’en suit une mise en commun où les élèves présentent au reste la classe le fruit du travail de leur équipe, et ce, en verbalisant les démarches qu’ils ont utilisées.
Les activités d’apprentissage PENDANT la lecture
Pendant la lecture du roman, les élèves ont cinq tâches à effectuer, chacune d’elles étant liée aux cinq sous-problèmes de lecture. Les tâches en lien avec la compréhension globale de l’histoire sont : faire la fiche descriptive des personnages ciblés, se prononcer sur la présence des stéréotypes dans le texte et faire un bref résumé de chacun des chapitres. Elles visent toutes, chacune à leur façon, à amener l’élève à synthétiser l’information, la seule voie par laquelle il pourra accéder à l’humour relatif à la compréhension globale de l’histoire.
Quant aux tâches liées à la compréhension d’éléments spécifiques, elles consistent, d’une part, à créer un lexique contenant des mots difficiles de même que des mots du registre familier qui créent un effet humoristique et, d’autre part, à faire un répertoire explicatif des figures de rhétorique humoristiques.
Tous les trois chapitres, les élèves se réunissent en groupe de discussion pour confronter leurs hypothèses de lecture relatives aux cinq sous-problèmes de départ. Cet exercice aide les élèves à ne jamais perdre de vue ces sous-problèmes et il leur permet de construire, graduellement, une réponse à chacun d’eux.
Les activités d’apprentissage APRÈS la lecture
À la fin de la séquence, après que les élèves ont eu le temps de formuler individuellement des réponses générales aux sous-problèmes, l’enseignant ferme la boucle sur chacun d’eux. Cela se fait dans le cadre d’une plénière où il laisse beaucoup de place à la discussion des élèves afin que ceux-ci confrontent et peaufinent leurs réponses.
La séquence se termine par une activité d’écriture créative pour laquelle l’élève doit choisir un extrait dans l’œuvre dramatique de son choix et le traduire en un passage humoristique. Dans ce réinvestissement, il doit utiliser des mots du registre familier pour alléger le dramatique d’une situation et utiliser toutes les figures de rhétorique étudiées dans la séquence.
______________________
1 Daniel Pennac, La fée carabine, Paris, Gallimard (Coll. Folio), 1996, 309 p
Bibliographie
GIASSON, Jocelyne, La compréhension en lecture, Montréal, Gaëtan Morin éditeur, 1990, 369 p.
PENNAC, Daniel, La fée carabine, Paris, Gallimard (Coll. Folio), 1996, 309 p.