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Prochain épisode

Fiche descriptive
Séquence didactique
Annexes
Prochain épisode
AQUIN, Hubert
Par Benoît Arcand


Nationalité de l'auteur : Québécoise
Genre : Roman
Courant :
Siècle : 20e siècle
Groupe d'âge visé : Collégial
Auteur de la séquence : Benoît Arcand
Date du dépôt : Hiver 2006


PRÉSENTATION DE LA SITUATION-PROBLÈME

 

Œuvre à la fois prenante et déconcertante, Prochain épisode offre une expérience esthétique et intellectuelle extrême. La multiplicité des voix présentes dans le roman permet d’aborder avec les élèves une quantité importante d’éléments constitutifs d’une œuvre littéraire (notions de genres, de champ littéraire, de narration) et de leur faire « reconnaître les caractéristiques de textes de la littérature québécoise[1] ». D’autre part, le défi cognitif que ce texte propose aux apprenants les amènera à porter sur leur culture première un regard nouveau, distancié.

 

OBJECTIF GÉNÉRAL :

 

Amener l’élève à interpréter le phénomène de l’intertextualité dans Prochain épisode.

 

OBJECTIFS PARTICULIERS :

 

   1 – Identifier et comparer les codes génériques présents dans l’œuvre.

   2 – Analyser les différentes voix qui entrent dans la composition du roman.

   3 – Intégrer les différents éléments suscités dans une activité de création littéraire.

 
AVANT LA LECTURE

 

Cours 1 : Amorce (activité d’écriture nº 1 : genres)

 

D’abord, établissons un élément formel : tout au long de cette séquence, les élèves seront amenés à travailler en sous-groupes de quatre afin de favoriser le partage d’informations et le dialogue. Pour la première activité, l’enseignant distribue à chaque groupe une fiche sur laquelle un genre particulier est indiqué de la manière concise : espionnage, policier, romance, voyage, fantastique, révolutionnaire, aventure, historique, etc. Puis, il demande à chaque groupe de composer l’introduction d’un texte de fiction narrative qui respecte le genre (il reste vague à ce propos) et inclut nécessairement quelques éléments, tels que : un personnage principal bien décrit, un décor et une situation problématique. Il demande ensuite aux groupes de faire la lecture de leurs extraits et, après chaque lecture, il laisse deux minutes aux groupes dont le texte n’est pas en jeu pour tenter de deviner le genre auquel il appartient. Le groupe qui réussit à deviner doit ensuite justifier son choix par quelques éléments de preuve tirés du texte que l’on note au tableau. On ajoute également d’autres éléments pertinents qui auraient pu apparaitre. L’activité permet de poser des questions-clés pour la compréhension des codes génériques.

 

Le reste du temps est occupé à discuter avec les élèves de leurs conceptions de ces genres (sont-ils nobles? éprouvons-nous un plaisir coupable à consommer une littérature de masse? et surtout : est-il possible de transcender ce clivage?).

 

On peut faire remarquer, par exemple, qu’il existe des contraintes de contenu et des contraintes formelles, des genres plus propices aux stéréotypes. On peut aussi tenter de distinguer, à partir des intuitions des élèves, deux types de littérature : celles à diffusion élargie (ou paralittérature) et restreinte (ou Littérature). De là, on fera les recoupements qui s’imposent avec le codage plus ou moins lourd de certains genres et leur appartenance à tel type de littérature.

 

Cours 2 : Contexte sociohistorique et visionnage du film Deux épisodes dans la vie d’Hubert Aquin 

 

Tout d’abord, l’enseignant fait une courte synthèse de ce que les élèves ont retenu de la dernière séance. Chaque groupe peut ainsi faire ressortir un élément de contenu après s’être concerté quelques minutes. Puis, l’enseignant présente brièvement le documentaire et ses auteurs Jacques Godbout et François Ricard. La présentation du film[2], une excellente introduction à l’univers fictif et référentiel d’Hubert Aquin, est suivie d’une plénière basée sur un court questionnaire distribué aux élèves avant le visionnage. Ce questionnaire concerne surtout le contexte sociohistorique. Le film devrait aider les élèves à apprécier divers éléments significatifs du contexte de création de l’œuvre littéraire, notamment les principaux évènements sociohistoriques. Il les mettra aussi en contact avec des témoignages sur la réception historique de l’œuvre et sur l’écriture d’Aquin ainsi qu’avec différents intertextes (par exemple : Borges) sur lesquels l’enseignant doit revenir en exposé après le visionnage.

 

PENDANT LA LECTURE

 

Cours 3 : Analyse du paratexte, horizon d’attente, incipit

 

Grâce à une activité qui exploite le paratexte, l’enseignant cherche à stimuler la production d’inférences par les élèves à partir des éléments explorés jusqu’ici. Pour ce faire, il demande à chaque équipe de faire un repérage aussi rigoureux que possible des indices présents sur la quatrième et la première page couverture[3]. Il insiste sur les indices donnant une indication sur le genre du texte et sur l’intrigue. Après un remue-méninge d’environ dix minutes au sein des équipes, chacune est invitée à dévoiler, dans le cadre d’une plénière, un indice qui a retenu l’attention de ses membres et l’interprétation qu’elle en fait (c’est-à-dire l’hypothèse de lecture qu’elle émet). Cette interprétation (hypothèse de lecture) doit évidemment être justifiée par des éléments tirés des cours précédents. Ces indices sont consignés au tableau par un membre de l’équipe et tous les élèves sont invités à les noter ainsi que les hypothèses de lecture qui en découlent.

 

Dans un second temps, l’enseignant invite les élèves à faire le même genre d’exercice à partir de la lecture du premier paragraphe du roman en notant tous les éléments qui confirment ou infirment certaines hypothèses émises, ainsi que ceux qui ouvrent de nouvelles pistes. On pourra subdiviser les éléments selon les différents niveaux de lecture : compréhension du récit, puis de la forme, et enfin le sens. Pour toutes ces questions entrainant leurs hypothèses, les équipes doivent évidemment justifier leurs propositions à partir d’éléments textuels ciblés. On pourra suggérer des pistes de compréhension et d’interprétation avant l’activité ou pendant si les élèves sont plus autonomes.

 

Cours 4 : Vérifications, explication des niveaux narratifs et autres

 

À ce stade, les élèves doivent avoir lu la moitié du roman. En début de période, chacun est invité à exprimer en un seul mot son expérience de lecture. L’enseignant consigne au tableau les difficultés de lecture qui sont exprimées à ce moment. Ensuite, les membres d’une même équipe sont invités à s’entraider dans l’élaboration de schémas narratifs, le découpage de l’action, la représentation des liens entre personnages, etc. La rencontre est divisée selon ces thèmes : les personnages, l’intrigue et le récit, la quête et les thèmes, le style et les genres. Chacune de ces divisions suit le même fonctionnement à chaque fois : dix minutes de repérage des éléments pertinents entre les membres de chacune des équipes, puis leur organisation; ensuite, en quinze minutes, exposition et explication en grand groupe des schémas et des hypothèses élaborés en sous-groupes (avec confrontation ou enrichissement, au besoin) et, enfin, début d’interprétation. Avant de terminer la séance, l’enseignant demande aux élèves de répondre (obligatoirement) à cette question pour la prochaine rencontre : à quelle autre œuvre – littéraire, cinématographique, picturale, musicale, etc. – Prochain épisode vous fait-il penser – de près ou de loin – et pourquoi?

 

APRÈS LA LECTURE

 

Cours 5 :  Théories et jeux de l’intertextualité

 

La lecture de l’oeuvre étant complétée, les élèves sont invités à répondre, un à un, à la question posée à la fin de la dernière classe. Chaque réponse, avec sa justification, est inscrite au tableau par l’enseignant selon des catégories (invisibles) aussi cohérentes que possible (selon le médium, le genre, l’époque…). Les élèves sont ensuite sollicités afin d’établir ces catégories selon leurs propres choix. Ces trouvailles sont laissées au tableau pour la suite du cours qui consiste en un remue-méninge[4] intertextuel plus général. Pour cette activité (qui se réalise mieux en grand groupe), l’enseignant demande aux élèves de donner d’autres exemples d’œuvres et d’histoires qu’ils connaissent et que l’ensemble de la classe est susceptible de reconnaitre. Pour ce faire, ils ont pour consigne de donner leur histoire à entendre sous une forme allusive et énigmatique qui commence par la devise typiquement québécoise : « Je me souviens… ». L’enseignant donne quelques exemples de son cru afin de réchauffer la classe. Le reste de celle-ci répond au meilleur de ses connaissances et les bonnes réponses sont insérées, par les élèves, au tableau dans les mêmes catégories ou selon de nouvelles catégories si nécessaire. Il est à noter que l’enseignant ne devrait pas trop préciser ses attentes pour ne pas diriger les élèves dans une case ou une autre de l’intertextualité. La responsabilité de l’enseignant sera plutôt d’écarter certaines réponses des élèves et d’insister sur d’autres, en justifiant pourquoi il le fait à chaque fois.

 

La dernière et la plus longue partie du cours sert à aborder la théorie. Cette partie plus magistrale n’empêche pas l’enseignant de solliciter la participation des élèves à tout moment. Par exemple, lorsqu’il donne la définition et l’explication d’une catégorie intertextuelle (citation, plagiat, référence, allusion), il demande aux élèves de reclasser certains éléments présents au tableau ou tout autre élément qu’il juge pertinent.

 

Cours 6 : Repérage des intertextes de Prochain épisode

 

La prochaine étape consiste à faire le repérage des différents intertextes présents dans l’œuvre à l’étude. Les élèves travaillent en sous-groupes, roman en main, à repérer un maximum de citations, allusions et références en expliquant les effets générés par celles-ci selon le moment de l’intrigue ou le niveau narratif. Les fonctions de ces intertextes doivent également être discutées et déterminées en équipe. Toutes ces informations sont prises en note, bien sûr, en vue d’une mise en commun au prochain cours. Bien avant la fin du cours, l’enseignant confie à chaque groupe une tâche de recherche particulière rattachée à un intertexte plus complexe qui dépend des découvertes de chacune d’entre elles. Il peut suggérer certaines pistes de recherche, au besoin. Des exemples de sujets de recherches pourraient être : le Château, Ferragus, Musset, la révolution cubaine, lord Byron, Zénon, Protée, le nouveau roman…

 

Cours 7 : Mise en commun des résultats de recherche et analyse-synthèse de l’intertextualité dans Prochain épisode

 

Après avoir accordé le temps nécessaire pour que les équipes mettent en forme les résultats de leurs recherches et les analysent, l’enseignant invite l’ensemble des équipes à relever les différentes marques d’intertextualité qu’elles ont découvertes, autant que possible dans l’ordre de leur apparition dans l’œuvre. Chaque équipe partage ainsi les résultats de son analyse avec l’ensemble du groupe. L’enseignant complète évidemment cette partie du travail en relevant d’autres pistes intertextuelles importantes dont il fait l’analyse. Cette partie peut servir d’amorce à une réflexion sur les limites de l’intertextualité (À quoi sert une allusion manquée?).

 

L’enseignant établit également une liste synthétique des connaissances générales et des habiletés procédurales acquises au cours de la séquence en sollicitant les élèves pour son élaboration, de sorte que ces derniers réalisent les aptitudes qu’ils ont jusque-là développées et qu’ils se sentent en maitrise lorsque viendra le moment de les mettre en application de manière autonome. Puis, finalement, l’enseignant remet et explique brièvement les feuilles de consignes pour le travail final et le débat de la semaine suivante.

 

Cours 8 : Analyse générale, conclusion, consignes et formation d’équipes

 

L’objectif de cette rencontre est d’organiser les différentes trouvailles et de dégager une interprétation générale du roman en comparant les analyses partielles faites en classes. En guise de conclusion officielle, l’enseignant, avec la participation des élèves, met les divers éléments étudiés (niveaux diégétiques, personnages, genres, intrigues, etc.) en relation avec les différentes interprétations de l’intertextualité élaborées aux derniers cours. L’interprétation de la fin du roman devra demeurer incertaine afin d’alimenter le débat du prochain cours.

 

Cours 9 : Débat (10 %)

 

La séance est entièrement consacrée au débat organisé autour de la question suivante : « En quoi la double voix narrative présente dans Prochain épisode exprime-t-elle un constat d’échec, à la fois pour le héros et le romancier? »

 

Cours 10 : Réécriture/écriture (30 %)

 

Pour cette séance, l’enseignant se met à la disposition des élèves pour l’amorce de l’activité d’écriture d’invention. Pour lancer l’activité, il invite les élèves à récupérer leur texte de la première séance et à le réécrire en le métissant avec des codes d’un second genre, puis en y insérant un intertexte de leur choix. Dans un second mouvement, des volontaires sont invités à donner leurs choix en exemple. L’enseignant peut suggérer quelques jeux de collage, de modification, de grossissement des codes génériques ou des intertextes pour inciter un peu plus les élèves à dépasser la simple insertion. Ce cours sert donc de laboratoire d’écriture et de tribune pour les échanges entre les élèves (en sous-groupes ou en grand groupe) et l’enseignant, lequel guide la démarche d’écriture pour la dernière fois. Le texte d’invention tient lieu d’activité-synthèse de la séquence.

 
 
BIBLIOGRAPHIE

 

AQUIN Hubert, Prochain épisode, Ottawa, le Cercle du livre de France, 1965, 174 p.

 

CANVAT Karl, Enseigner la littérature par les genres : pour une approche théorique et didactique de la notion de genre littéraire, Bruxelles, De Boeck Duculot (savoirs en pratique), 1999, 298 p.

 

DUFAYS Jean-Louis, GEMENNE Louis et LEDUR Dominique, Pour une lecture littéraire : histoire, théories, pistes pour la classe, Bruxelles, De Boeck (savoirs en pratique), 2005, 370 p.

 

DUFAYS Jean-Louis, LITS Marc et YERLÈS Pierre, Ces Mythes qui nous hantent… ces mythes qui nous tentent…, Louvain-la-Neuve, Unité de didactique du français, 1984, 66 p.

 

GIRARD René, Mensonge romantique et vérité romanesque, Paris, Grasset, 1961.

 

GODBOUT Jacques, Deux épisodes dans la vie d’Hubert Aquin, Montréal, ONF, 1979, 57 min.

 

GOIMARD Jacques, Critique des genres, Paris, Pocket (agora), 2004, 750 p.

 

De PIETRO Jean-François et al., « Un modèle didactique du débat : de l’objet social à la pratique scolaire », Enjeux, n° 39/40, 1996, p. 100-129.

 

SAMOYAULT Tiphaine, L’intertextualité : mémoire de la littérature, Paris, Nathan université (128), 2001, 128 p.



[1] Élément de compétence ciblé par le ministère de l’Éducation, des Loisirs et du Sport du Québec pour le troisième cours de la formation générale commune en français au collégial. En ligne à l’adresse suivante : http://www.meq.gouv.qc.ca/ens-sup/ens-coll/Cahiers/cours-comp/comp.asp?NoObj=0003

[2] Dont nous nous contenterons de diffuser la première partie (30 minutes), plus pertinente.

[3] À partir du paratexte original, auquel ils ont accès dans les annexes de la réédition par BQ.

[4] Nous nous inspirons directement de l’exercice des « lambeaux-énigmes », proposé par Jean-Louis Dufays et al. (1984), p. 36, lui-même inspiré du Je me souviens de Georges Perec (Paris, Hachette, 1972).


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