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La moustache

Fiche descriptive
Séquence didactique
Annexes
La moustache
CARRÈRE, Emmanuel
Par Julie Gagnon


Nationalité de l'auteur : Française
Genre : Roman
Courant :
Siècle : 20e siècle
Groupe d'âge visé : Collégial
Auteur de la séquence : Julie Gagnon
Date du dépôt : Automne 2006


Justification de l’œuvre choisie

 

La séquence didactique que je propose porte sur le roman La moustache d’Emmanuel Carrère. Si ce roman français pose un cadre référentiel facilement identifiable (description des personnages, actions, etc.), il n’en demeure pas moins que plus nous progressons dans notre lecture, plus les problèmes surgissent. Au début du roman, une action anodine est posée par le personnage principal : il se rase la moustache. Pourtant, son entourage ne remarque rien de nouveau et prétend même qu’il n’a jamais porté la moustache. Au départ, il se croit victime d’une mauvaise plaisanterie, mais peu à peu il commence à perdre ses certitudes. Ce débat mental qui fera osciller ce personnage est une mise en abyme de la principale difficulté rencontrée par le lecteur : soit celle de distinguer le vrai du faux dans le récit.

 

Voici les principaux objectifs d’apprentissage :

 

  • Se familiariser avec la narratologie
  • Découvrir certaines caractéristiques du fantastique
  • Procéder à un questionnement identitaire sur l’importance de « l’Autre » dans le processus de la reconnaissance

 

Choix des activités

 

Avant la lecture de l’œuvre principale à l’étude

 

1- Je tiens à ce que les élèves se familiarisent avec le fantastique et avec quelques notions de base en narratologie qui serviront ultérieurement de balises à La moustache.  Pour ce faire, je proposerai en début de session la lecture de la nouvelle Le Horla de Guy de Maupassant. Plutôt que de présenter la matière de façon schématisée aux élèves, je leur proposerai un petit questionnaire auquel ils auront à répondre. Nous y reviendrons tous ensemble par la suite. Voici quelques suggestions de question :

 

- Qui raconte l’histoire?

- Avons-nous accès aux pensées de plusieurs personnages?

- Le personnage principal visite plusieurs lieux.  Cependant, où éprouve-t-il de la crainte?

- Le protagoniste était-il seul ou accompagné lors des évènements inusités?

- De quoi (ou de qui) a-t-il peur?

 

2- Puis, la classe sera divisée en équipe. Chacune d’entre elles travaillera un extrait en particulier qui décrivait un évènement « surnaturel » tout en mettant en scène seulement le personnage principal. Voici quelques questions qui pourraient être proposées aux équipes : « Qu’est-ce que le personnage a cru voir ou entendre? Quelles explications propose-t-il pour expliquer ce phénomène? » Par la suite, un exercice de création leur sera présenté. Imaginons qu’un deuxième personnage ait assisté à la scène, mais qu’il n’ait rien noté de surnaturel. Les élèves se mettront dans la peau de ce personnage et raconteront de quelle façon le protagoniste agissait. Ce texte devra donc être écrit à la première personne du singulier et ne pourra rendre compte que du point de vue de ce second personnage. L’objectif principal est d’amener les élèves à découvrir que ce sont les pensées du personnage principal et son dialogue intérieur qui apportent l’aspect fantastique au texte.

 

3- Avant de commencer la lecture de La moustache, j’aimerais attirer l’attention des cégépiens sur certains éléments du paratexte, dont la page couverture du livre. On y voit un personnage portant une moustache qui se regarde dans un miroir. Cependant, son reflet est différent de ce qu’il est : il y a une tache qui recouvre le dessus de son nez jusqu’au menton, comme si quelqu’un avait effacé une partie du reflet. Nous discuterons ensemble de ce que cela peut signifier et ferons ressortir les indices qui nous sont révélés avant de commencer la lecture. Par exemple, le reflet ne nous dit pas si le personnage porte une moustache ou non. C’est un peu comme si le choix était laissé au lecteur, ce qui pourrait bien résumer tout le roman. Il me semble que les élèves doivent apprendre à prêter attention au paratexte : cette image a nécessairement été sélectionnée parmi d’autres et peut nous donner des indications qui nous guideront dans notre lecture. 

 

Pendant la lecture :

 

4- Au fil de notre lecture, j’attirerai l’attention des élèves sur certaines scènes qui présentent un intérêt particulier. Par exemple, lorsque Agnès prétend ne pas connaitre Serge et Véronique. Pourtant, le protagoniste soutient que ce sont leurs meilleurs amis. Je considère qu’il est important d’accompagner les élèves durant leur lecture afin de bien les guider, tout en leur permettant d’explorer leur propre avenue. Les étudiants seront parfois amenés à discuter en équipe, mais nous finirons toujours la discussion collectivement. Ces échanges ont pour but d’amener l’élève à approfondir sa compréhension du texte et à proposer ses réflexions, ce qui l’amènera à participer à la construction de son propre savoir. Cette approche est représentative de la didactique procédurale où les savoirs s’acquièrent dans l’action.  De plus, la contribution d’un élève nourrira les réflexions d’un autre, et vice versa. Ces échanges prendront différentes formes (tables rondes, discussions collectives et en équipe). Grâce à un tel contexte interactif, l’élève « apprend […] des interactions qu’il a avec les gens qui l’entourent, dans un contexte concret, et qui l’amènent à réexaminer ses propres connaissances, à les réarranger, pour qu’elles tiennent compte des nouvelles idées auxquelles il est confronté » (Larochelle, 2006, p. 18).

 

 

Après la lecture du texte

 

5- Tel qu’amorcé avec la nouvelle Le Horla, les élèves procèderont à un second exercice de création littéraire. Ils devront se mettre dans la peau du personnage d’Agnès et raconter en une page une scène en adoptant son point de vue. Cette activité a pour objectif principal de mettre en application ce qui a été vu afin que leurs apprentissages s’inscrivent dans une démarche concrète, tout comme les fiches de lecture qu’ils auront réalisées lors de l’analyse de certaines scènes. Les élèves expérimenteront les limites d’une seule focalisation, ce qui les amènera à réaliser que nous n’avons pas toujours l’information nécessaire pour juger une situation. Cet exercice s’inscrit dans notre questionnement concernant la formation de l’identité, mentionnée dans nos objectifs d’apprentissage. En effet, les élèves seront amenés à réfléchir sur l’importance de l’« Autre » pour valider qui l’on est et à prendre conscience qu’une identité ne se construit pas toute seule. 

 

6- Finalement, les élèves visionneront l’adaptation cinématographique de La moustache en dernière partie. Ce film ne leur sera présenté qu’à la fin de la séquence, car je ne voudrais pas que les différences qui existent dans le film viennent interférer avec leur compréhension du livre. Bien entendu, et c’est pour cela que cette activité est proposée, ce parallèle peut tout de même être très intéressant à faire, d’autant plus que c’est l’auteur qui a assuré la réalisation de cette adaptation.  Nous pourrions analyser ce qu’il a conservé, changé ou rejeté du roman. De plus, ce sera l’occasion pour les élèves d’observer les moyens visuels qui ont été mis de l’avant pour représenter le point de vue du personnage principal. Nous pourrions ajouter que cette activité sera un moyen d’initier les étudiants au cinéma français car, après tout, l’enseignant doit permettre à l’élève d’enrichir sa culture : « […] le maître devient alors héritier, critique et interprète d’objets de culture ou de savoir, autrement dit, celui qui crée des rapports » (MEQ, 2001, p. 38).

 

 

Bibliographie

 

CARRÈRE, Emmanuel (1986), La moustache, France, Éditions P.O.L., 182 p., (coll. « Folio »).

 

FALARDEAU, Érick (2006), « Quelle place pour les lecteurs dans nos classes de littérature? », Didactique du français au collégial 1 – Document d’accompagnement, Québec, Presses de l’Université Laval, p. F13 à F21

 

GAUTHIER, Théophile (1993), La morte amoureuse, Paris, Éditeur Alfil, 63 p., (coll. « Nouvelles et contes »).

 

Gouvernement du Québec (2001), La formation à l’enseignement.  Les orientations, les compétences professionnelles, ministère de l’Éducation, Québec, 191 p.

 

LAROCHELLE, Josée (2006), « Constructivisme et socioconstructiviste », dans L’éclairage socioconstructiviste pour l’apprentissage de la littérature au collégial assisté par une technologie de réseau, examen de doctorat soutenu en juin 2006 à l’Université Laval, p. 13-24.

 

OUELLET, Fernand, « Socioconstructivisme et enseignement collégial », Pédagogie collégiale, vol. 19, n°3, printemps 2006, p. 17-24.

 

SCHNEUWLY, Bernard (1995/2005), « De l’utilité de la “transposition didactique” », dans J.- L. Chiss, J. David J. & Y. REUTER dir. (1995/2005) Didactique du français. État d’une discipline, Paris, Nathan, p. 47-59.

 

STEINMETZ, Jean-Luc (2003), La littérature fantastique, Paris, Presses universitaires de France, 127 p., (coll. « Que sais-je »).

 

TODOROV, Tzvetan (1976), Introduction à la littérature fantastique, Paris, Éditions du Seuil, 188 p., (coll. « Points »).

 

 


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