JUSTIFICATION DU CHOIX DE L’OEUVRE
Cette séquence didactique s’adresse à des élèves de cinquième secondaire, c’est-à-dire à des jeunes d’environ 16-17 ans. Elle s’articule autour du roman Le pigeon de Patrick Süskind, l’auteur allemand qui a aussi écrit l’œuvre bien connue Le parfum. Nous avons choisi ce texte parce qu’il est facilement accessible grâce à son langage et son intrigue simples. De plus, il permet d’aborder une période marquante du XXe siècle, soit la Seconde Guerre mondiale.
LES PROBLÈMES DE LECTURE
Nos problèmes de lecture dans cette séquence sont : la reconstitution des évènements dans le temps et dans l’espace, cerner les caractéristiques qui déterminent le profil psychologique de Jonathan Noël et comprendre et identifier les différents modes de narration.
ACTIVITÉS
Avant la lecture
1- Questionnaire d’activation des connaissances[1]
L’activité qui suit a pour objectif de cerner les connaissances antérieures des élèves sur la période sociohistorique qui englobe le roman. Voici le questionnaire :
En quelle année la Seconde Guerre mondiale a-t-elle éclaté? Quelles sont les causes de cette guerre? Quels sont les cinq principaux pays impliqués? Qui est Adolph Hitler? Comment se nomme l’endroit où on déportait les Juifs, les homosexuels et les handicapés, entre autres? Où est situé le camp Drancy? En quelle année ce conflit s’est-il terminé? Qui sont les vainqueurs de cette guerre?
Une fois les questionnaires remplis, les élèves discutent en groupe de leurs réponses. De cette manière, l’enseignant peut déterminer sur quels éléments il sera important d’aller chercher de l’information supplémentaire.
2- Recherche des informations manquantes
Bien que les élèves possèdent déjà des connaissances de base sur cette période, ils devront approfondir leurs savoirs sur les sujets suivants : les causes de la Seconde Guerre mondiale, les pays impliqués dans le conflit, les camps de concentration et d’internement (Drancy et Auschwitz), l’évolution géographique tout au long de la guerre (l’acquisition des terres), les pertes humaines et économiques engendrées par le conflit, les bombardements de Hiroshima et Nagasaki.
Cette activité permettra aux élèves d’aborder la lecture du roman en ayant une meilleure connaissance des évènements relatifs la Seconde Guerre mondiale. Elle leur permettra également de « prendre conscience des facteurs qui peuvent influer sur la lecture ou la déterminer[2] ». Ils pourront faire des liens entre leurs savoirs sur le contexte sociohistorique de cette période et les caractéristiques qui définissent le personnage principal grandement touché par ce conflit.
3- Visionnage du film La moustache d’Emmanuel Carrère
Cette activité a pour but de faire une introduction avec le sujet abordé dans le roman Le pigeon que les élèves auront à lire. Le scénario du film La moustache est tiré d’un livre au même titre, mais nous croyons qu’il peut être plus intéressant de faire découvrir cette œuvre de manière cinématographique étant donné qu’ils auront une autre œuvre littéraire intégrale à lire à la suite de cette activité. Après le visionnage du film, les élèves discuteront en groupe de leur réaction par rapport au personnage principal et à l’intrigue. Cette activité sera utile pour le problème de lecture concernant les caractéristiques de l’évolution psychologique de Jonathan Noël, puisqu’à la lumière des échanges avec leurs camarades, les élèves prendront conscience de l’importance du thème de la trivialité dans l’évolution psychologique du personnage principal du film La moustache. Tout en leur laissant le soin de procéder à une lecture subjective, l’enseignant donne un repère pour la lecture du roman.
4- Conception du cahier de lecture
L’enseignant demande aux élèves d’apporter un cahier d’écriture vierge qu’ils sépareront en quatre sections distinctes : indices temporels, indices géographiques, évènements marquants dans la vie de Jonathan Noël et indices d’évolution psychologique de Jonathan Noël. De cette manière, l’enseignant donne des pistes interprétatives aux élèves. De plus, cette activité sera utilisée pour la préparation au débat interprétatif que les élèves feront plus loin dans la séquence.
Pendant la lecture
5- Cahier de lecture
Cette activité a pour objectif d’amener les élèves à construire le sens du texte en « consignant tous les écrits de travail[3] » dans un cahier de lecture. De cette façon, l’élève peut réfléchir sur le chapitre qu’il vient de lire, et ainsi, « garder des traces de ses lectures, de développer la lecture cursive, de développer des comportements de lecteurs critiques et autonomes et de développer l’argumentation critique[4] ». Ces notes leur serviront également lors du débat interprétatif, lorsqu’ils devront échanger sur leur lecture. Ils pourront reconstituer les évènements dans le temps et dans l’espace et cerner les caractéristiques qui déterminent le profil psychologique de Jonathan Noël[5]. Par la suite, ils vérifieront leur manière de lire en échangeant sur le contenu de leur cahier lors d’un débat interprétatif.
6- Lecture collective d’un chapitre du livre
L’activité qui fait prendre conscience des changements de narration a pour objectif d’éviter la confusion entre les modes de narration en faisant réaliser aux élèves que, dans Le pigeon, il y a deux narrateurs : soit il y a un narrateur absent qui raconte l’histoire de l’extérieur, soit il y a le personnage principal, Jonathan Noël, qui raconte ce qui se passe de son point de vue, qui fait part de ce qu’il ressent. Pour l’activité, l’enseignant et les élèves lisent ensemble le deuxième chapitre du livre. L’enseignant arrête la lecture aux passages sélectionnés préalablement dans lesquels les deux modes de narration sont présents et demande aux élèves d’identifier le narrateur. De la sorte, ils prendront conscience des changements de narration présents tout au long du roman. Le changement de narrateur peut altérer la compréhension des élèves. À la suite de cette activité, les élèves pourront continuer la lecture du livre sans que les changements de narrateurs leur en fassent perdre le fil.
Après la lecture
7- Le débat interprétatif
Le débat interprétatif a pour objectif de vérifier l’efficacité de sa manière de lire et d’exprimer sa réaction au texte. Après avoir complété leur cahier de lecture, les élèves discuteront du personnage principal, de l’histoire en général, de la chronologie des évènements. Par la suite, les élèves participent « à une table ronde en y tenant un rôle spécifique[6] » et « des rôles leur sont assignés afin d’organiser le débat et de rendre chaque élève acteur[7] ». Un carton, sur lequel sera inscrit un évènement particulier du livre, sera remis à chaque équipe. Chacune d’elle devra discuter de l’évènement, le situer dans la chronologie des évènements et dresser le profil psychologique du personnage principal, Jonathan Noël, à ce moment, ce qui amènera les élèves à « justifier leurs impressions de lecture[8] ». Par la suite, le porte-parole se présentera à l’avant du groupe afin d’exposer le point de vue de l’équipe sur l’évènement en question. Pendant ce temps, les autres élèves complèteront un résumé des évènements, sur une feuille lignée qu’ils sépareront en deux colonnes (une pour les évènements, l’autre pour le résumé). Maintenant qu’ils ont mis en commun leur perception du texte et qu’ils ont pu mettre en ordre les évènements, ils sont en mesure d’écrire la suite du roman de Patrick Süskind.
8- Atelier d’écriture
L’atelier d’écriture a pour objectif d’amener les élèves à créer un univers narratif à l’aide des informations qu’ils ont consignées dans leur cahier de lecture. Ils composeront un texte décrivant le lendemain du retour de Jonathan Noël à la maison. L’enseignant donnera quelques indications aux élèves : déterminer le point de vue du narrateur : totalement absent de l’histoire ou présent dans l’histoire (comme le fait Jonathan Noël à quelques reprises[9]), tenir compte du profil psychologique du personnage principal, utiliser les lieux déjà présents dans le roman, la longueur du texte doit être d’environ 250 à 300 mots, etc.
Cet atelier d’écriture permettra aux élèves de rédiger, de modifier, de réviser et de corriger un texte. Il permettra également de vérifier la compréhension des élèves sur le sens général du roman.
[1] Érick Falardeau, « Pistes d’entrée en littérature ou en lecture? », Enjeux, nº 58, déc. 2003, p. 83-94.
[2] Gouvernement du Québec, MELS, Le programme d’études, français, enseignement secondaire, 1995, p. 21
[3] MARTINEZ, Isabelle, Cahier de littérature ou carnet de lecture ?, [en ligne]. http://18b-gouttedor.scola.ac-paris.fr/IMG/doc/Cahier_de_litterature_ou_carnet_de_lecture_Passy.doc [site consulté le 15 mars 2007]
[4] COULET, Christine et Marlène LEBRUN, « Favoriser un rapport critique à la lecture/écriture littéraire en constituant la classe comme une communauté active de lecteurs et d’auteurs », dans Enjeux, no 57, septembre 2003, p. 100-114.
[5] Reconstituer les évènements dans le temps et dans l’espace et cerner les caractéristiques qui déterminent le profil psychologique de Jonathan Noël sont deux de nos trois problèmes de lectures.
[6] Christine Coulet et Marlène Lebrun, « Favoriser un rapport critique à la lecture/écriture littéraire en constituant la classe comme une communauté active de lecteurs et d’auteurs », art. cit., p. 101
[7] Id.
[8] Ibid. p.104
[9] Patrick Süskind, Le pigeon, op. cit., p. 20.