JUSTIFICATION DE LA PERTINENCE DE L’OEUVRE CHOISIE 

La séquence didactique qui suit a été construite autour d’un essai de Bernard Arcand (Abolissons l’hiver![1]) et elle s’adresse aux élèves de premier cycle étant donné que l’œuvre n’est pas très volumineuse et qu’elle est relativement facile à lire. Toutefois, elle présente quelques problèmes de lecture. Il faut, entre autres, apprendre aux élèves à dépasser le sens littéral.

SITUATIONS-PROBLEMES ET OBJECTIFS D’APPRENTISSAGE

L’objectif principal de la présente séquence est d’amener les élèves à dégager la thèse d’Arcand et à reconnaître les moyens qu’il utilise pour appuyer cette dernière. Voici les deux problèmes de lecture qui seront résolus à l’aide de cette séquence :

• Comprendre la thèse réelle de l’auteur, qui n’est pas celle du titre
• Comprendre que l’auteur ne fait pas de l’absurde, mais qu’il dénonce plutôt des pratiques absurdes par divers moyens

LA SEQUENCE

AVANT LA LECTURE

 

Activité 1 – Rédaction d’un texte dans lequel les élèves anticipent le contenu de ce qu’ils liront (à partir du titre seulement)

Afin que les élèves clarifient leurs attentes concernant la lecture de l’œuvre d’Arcand, ils écrivent un texte dans lequel ils doivent anticiper le sujet que l’auteur abordera et la manière dont il le fera. En fait, à partir du titre Abolissons l’hiver!, les élèves seront probablement certains que l’auteur tentera de les convaincre qu’il faut abolir l’hiver, ce qui n’est pas le cas. Voici une consigne pouvant être donnée aux élèves:

Après avoir pris connaissance du titre de l’œuvre à l’étude et après avoir vu sa couverture, rédigez un texte de 250 mots dans lequel vous dites quelles sont vos attentes concernant la lecture de cet essai. Vous pouvez vous inspirer des questions suivantes pour rédiger ce texte :

• De quoi croyez-vous qu’il sera question dans ce livre?
• Selon vous, quel sera le message de l’auteur?
• Qu’est-ce qui vous fait croire que vous avez raison?

Il est important que les élèves gardent une trace écrite de ces réflexions puisqu’elles seront réutilisées plus tard afin de vérifier si leurs prédictions étaient bonnes ou non. L’enseignant peut aussi exiger que les élèves trouvent des images (sur Internet) qui, selon eux, auraient pu faire la couverture de l’œuvre d’Arcand et qu’ils disent pourquoi ils croient cela. Ce serait une autre façon de les amener à verbaliser leur anticipation.

Lecture du premier chapitre : La lecture de ce chapitre confirme les hypothèses des jeunes et renforce leurs idées (ces derniers sont encore plus convaincus que le livre les amène là où ils croyaient).

Activité 2 – Recherche préparatoire sur Louis-Edmond Hamelin et Bernard Arcand

Cette activité se réalise seul, à la maison. C’est une brève recherche qui a pour but de faire connaître Louis-Edmond Hamelin, à qui Arcand dédie son œuvre. En apprenant qui est cet homme et quelles sont ses contributions à la société, les élèves sont en mesure de faire des liens entre cet homme et le sujet abordé par l’auteur. Ensuite, les élèves font la même recherche à propos de Bernard Arcand. L’enseignant propose des sources Internet et un questionnaire aux élèves :

• http://www.scom.ulaval.ca/Au.fil.des.evenements/1999/05.27/hamelin.html[2]
• http://www.editionsboreal.qc.ca/fr-bio.php?idContributor=465[3]

Questionnaire
1. Qui est Louis-Edmond Hamelin?
2. Qu’a-t-il fait de particulier?
3. Quel est son apport à la société?
4. Qui est Bernard Arcand?
5. Qu’a-t-il fait de particulier?
6. Quel est son apport à la société?

L’enseignant peut ensuite questionner les jeunes afin de savoir si leurs attentes sont toujours les mêmes maintenant qu'ils savent, par exemple, qu’Abolissons l’hiver! a été écrit par un anthropologue.

Activité 3 – Travail sur l’absurde

Le but de cette activité est de préparer les élèves à une bonne interprétation de l’œuvre en leur montrant que l’auteur ne fait pas de l’absurde, mais qu’il dénonce plutôt des pratiques qui sont absurdes et qu’il ne souhaite pas l’abolition de l’hiver, mais le changement de notre conception négative de ce dernier. Dans un premier temps, l’enseignant fait la lecture à voix haute d’extraits de l’œuvre d’Arcand où ce dernier utilise l’exagération et l’ironie et où il dénonce quelques pratiques absurdes de la société. L'enseignant émet ses commentaires en même temps qu'il lit, et ce, devant les jeunes. L’extrait choisi pour effectuer ce travail est intitulé Fini le travail en hiver! (pages 73 à 79). Voici un exemple de passage pertinent pour la réalisation de cette activité (un exemple de commentaire fait par l’enseignant suit l’extrait):

• «Tous savent que les propriétaires de vidéoscopes ont la fâcheuse habitude d’enregistrer des émissions mémorables qu’ils n’ont par la suite jamais le temps de regarder.»
  Tiens, c’est drôle, c’est vrai que beaucoup de gens font cela et que les cassettes s’accumulent parce qu’ils n’ont pas le temps de les regarder, en fin de compte. Bref, c’est une pratique absurde…

Dans un second temps, l’enseignant fait la même chose avec ces passages empreints d’humour :

• «Nous habitons un pays qui se transforme périodiquement, quelques mois par an, en gigantesque congélateur. Mais à force de génie, nous avons construit des maisons confortables qui sont des îlots de chaleur. Et à l'intérieur de ces demeures, nous plaçons des congélateurs qui luttent courageusement contre le chauffage central pour fabriquer des cubes de glace.» (page 56)
  Nous disons ne pas aimer l’hiver, nous pestons contre lui, mais c’est vrai que nous reproduisons ce qu’il peut nous donner : la glace. C’est absurde de combattre le froid quand nous en avons besoin.

Dans un troisième temps, l’enseignant distribue un extrait de L’étranger de Camus[4] (les pages 68 et 69) et en fait une lecture accompagnée aussi. En lisant, il doit émettre des commentaires qui mettent l’accent sur l’absurdité du comportement et des réactions du personnage principal.

Lecture du reste de l’œuvre : Maintenant que les élèves comprennent qu’Arcand ne souhaite pas abolir l’hiver, mais plutôt que la société change sa conception négative de l’hiver, ils sont plus aptes à détecter les stratégies utilisées par l’auteur afin de démontrer que cette société a des pratiques absurdes, et ce, dans tout le reste de l’œuvre.

Activité 4 – En groupes d’experts, analyse des moyens utilisés pour appuyer la thèse

L’enseignant forme des équipes de trois. Chaque membre de l’équipe choisit un chapitre différent (chapitre 2, 3 ou 4) dans lequel il doit repérer les moyens utilisés par Arcand pour appuyer sa thèse. Les élèves travaillent seuls pendant environ vingt-cinq minutes, puis ils forment des groupes d’experts, c’est-à-dire que tous ceux ayant analysé le chapitre 2, par exemple, forment un groupe pour confronter leurs réponses, les compléter et devenir experts du chapitre qu’ils ont choisi. Ensuite, les élèves retournent dans leur équipe initiale (de trois membres) et font part de leurs découvertes aux autres membres de leur équipe.

Activité 5 – Lecture et analyse de la préface (repérage de la thèse)

Les élèves doivent faire la lecture de la préface, qui peut être considérée comme une synthèse de ce que l’auteur a démontré tout au long de son œuvre. Les élèves doivent dégager la thèse du Père Noël et ses arguments. Ensuite, ils sont amenés à remarquer que, bien que la description que le Père Noël fait de son horaire soit réaliste, ce personnage n’est pas réel. Du coup, ils remarquent le paradoxe créé par l’auteur.

Activité 6 – Retour sur l’interprétation du titre et rédaction d’un pastiche

Ayant analysé les problèmes que posait la lecture de l’œuvre, les élèves sont maintenant capables de bien interpréter le texte et de le lire à un deuxième niveau. L’enseignant les fait donc relire le texte qu’ils avaient écrit au début de la séquence, lorsqu’ils avaient interprété le titre de l’œuvre. Ils s’aperçoivent alors que le titre de l’œuvre ne représente pas la thèse de l’auteur. Ensuite, les élèves rédigent un pastiche[5] dans lequel ils doivent convaincre le destinataire qu’il faut changer un des comportements qu’il a et qui est absurde et dommageable pour l’environnement. Les élèves doivent utiliser les mêmes procédés que ceux qu’ils auront trouvés à l’activité 4. Enfin, ils doivent coiffer leur texte d’un titre qui trompera le lecteur en s'opposant à la thèse développée. Voici ce à quoi pourrait ressembler la consigne d’écriture :

Rédigez un texte de 450 mots dans lequel vous tenterez de convaincre monsieur et madame Tout-le-Monde que les gens de notre société ont un comportement X qui est absurde et nuisible pour l’environnement. Appuyez votre thèse par les mêmes moyens qu’Arcand (statistiques, comparaisons, etc.) et rédigez un titre qui met sur une fausse piste, toujours à la manière de l’œuvre d’Arcand.

[1] ARCAND, Bernard (1999). Abolissons l’hiver! Montréal : Les Éditions du Boréal. 112 pages.

[2] Site consulté le 7 avril 2008.

[3] Site consulté le 7 avril 2008.

[4] CAMUS, Albert (1957). L’étranger. Paris : Les Éditions Gallimard. 185 pages.

[5] PETITJEAN, André (1984). «Pastiche et parodie : enjeux théoriques et pédagogiques ». Pratiques. 42. p. 6.