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Le visiteur

Fiche descriptive
Séquence didactique
Annexes
Le visiteur
SCHMITT, Eric-Emmanuel
Par Mélanie Labbé


Nationalité de l'auteur : Française
Genre : Théâtre
Courant : Postmodernité
Siècle : 20e siècle
Groupe d'âge visé : Deuxième cycle secondaire
Auteur de la séquence : Mélanie Labbé
Date du dépôt : Hiver 2008


JUSTIFICATION DE LA PERTINENCE DE L’OEUVRE CHOISIE

 

Cette séquence didactique porte sur l’œuvre théâtrale Le visiteur d’Eric-Emmanuel Schmitt et s’adresse aux élèves de quatrième et de cinquième secondaire. Puisque le théâtre s’avère parfois un genre oublié dans les classes de français ou méconnu par les élèves, il est pertinent de travailler sur une pièce d’un auteur dont la réputation n’est plus à faire et qui s’adresse autant aux filles qu’aux garçons. Cette séquence s’inscrit dans une approche culturelle de l’enseignement, puisqu’à travers la littérature, il s’avèrera[1] possible d’enrichir les connaissances historiques des jeunes concernant l’époque de la Seconde Guerre mondiale ainsi que de les sensibiliser aux diverses religions. En plus, elle met en scène des personnages historiques ayant existé, soit Sigmund et Anna Freud.

 

SITUATIONS-PROBLEMES

 

Pour amener les jeunes à saisir l’essentiel de l’œuvre, la présente séquence visera à résoudre les deux problèmes suivants :

 

1) Comprendre le message social véhiculé dans la pièce, c’est-à-dire la dénonciation par Schmitt de la persécution des juifs par les nazis;

2) Comprendre que l’œuvre constitue une réflexion sur l’existence de Dieu en opposant la foi à la raison.

 

 

AVANT LA LECTURE

 

Activité 1 – Questionnaire d'activation des connaissances

 

La première activité vise à activer les connaissances que les élèves possèdent sur le sujet du texte et ainsi leur faire prendre conscience qu’ils ne sont pas dépourvus de repères. Elle portera sur des « concepts clés ou sur des informations essentielles du texte à lire [2]» et permettra aux jeunes de se familiariser avec le contexte historique de la Seconde Guerre mondiale. L’enseignant remet d’abord un questionnaire aux élèves et ils y répondent individuellement.

 

Questionnaire :

1) Qui était Sigmund Freud? Un psychologue qui a eu recours à l’hypnose, le père de la théorie psychanalytique, etc[3].

2) Qu’est-ce qu’un athée? Une personne qui nie l’existence de Dieu, des divinités.

3) Qui était Hitler? Un homme politique allemand, chef d’un État dictatorial fondé sur l’élimination des opposants et le racisme pendant la Seconde Guerre mondiale, etc.

4) Qu’est-ce qu’un juif? Une personne qui adhère à la religion judaïque (judaïsme), qui ne croit pas que le fils de Dieu soit venu, qui attend toujours sa venue.

5) Selon vous, pourquoi les juifs ont-ils été persécutés? Ils ne correspondaient pas à la race aryenne, à cause de leur religion, en raison du racisme.

6) Qu’est-ce qu’un nazi? Une personne qui appartient à un mouvement nationaliste et raciste (certains ont persécuté les juifs).

7) Qu’est-ce que la Gestapo? La police politique sous le régime d’Hitler; les agents de la Gestapo arrêtaient les juifs, etc.

8) Selon vous, qui sera le visiteur dont nous parle le titre? Un membre éloigné de la famille du personnage principal, un malfaiteur, un bandit, un policier, etc.

 

 

Lorsque les élèves ont terminé, une mise en commun des réponses et des connaissances s’effectue sous forme de discussion et l’enseignant complète les informations manquantes, s’il y en a. Il s’assure alors que les élèves possèdent tous les éléments nécessaires pour commencer la lecture.



Activité 2 – À la découverte du théâtre

 

Cette activité a pour objectif de familiariser les élèves avec le genre théâtral et de voir quelques-unes de ses spécificités puisqu’il s’avère possible que certains jeunes n’aient jamais abordé le théâtre en classe. Il faut donc réaliser cette activité avant la lecture. Elle consiste d’abord en une discussion entre les élèves et l’enseignant, dans laquelle il essaie de savoir ce que connaissent les jeunes à propos du théâtre. Puis, pour les amener à comprendre la structure d’une pièce, l’enseignant établit des comparaisons avec le genre romanesque. Au cours de la discussion, les élèves doivent remplir un bref aide-mémoire fourni par l’enseignant, contenant les connaissances littéraires à maitriser pour effectuer une lecture adéquate de l’œuvre. En cas de problème, ils pourront s’y référer.

 

Les mots en caractère gras et souligné correspondent aux éléments à remplir.

 

Aide-mémoire sur le théâtre

  • Tout comme le roman, le théâtre a un univers qui comporte les éléments suivants : des personnages, une époque, des lieux et des thèmes.

 

  • Comparativement au roman qui comporte des chapitres, les pièces de théâtre comprennent des actes et des scènes. Les actes correspondent aux grandes séquences de l’histoire et les scènes constituent les subdivisions des actes.

 

  • Dans une pièce de théâtre, l’auteur peut manifester sa présence à travers les didascalies et les répliques des personnages.

 

  • Les didascalies représentent les parties du texte qui renseignent sur les lieux, les gestes et les attitudes des personnages.

 

Par la suite, pour bien guider les élèves et rendre l’apprentissage plus significatif, la lecture de la première scène s’effectue à haute voix[4]. Puis, l’enseignant mentionne aux élèves que le reste de l’œuvre se lira individuellement et il fixe une date à laquelle ils doivent être rendus à la sixième scène.

 

 

PENDANT LA LECTURE

 

Activité 3 – Lecture du dossier « Le racisme, au cœur du nazisme »

 

Cette activité a pour objectif d’aider les élèves à voir la dénonciation sociale de la persécution des juifs par les nazis et de développer leur culture historique[5]. Elle se réalise après la lecture des cinq premières scènes, ce qui permet à l’enseignant de vérifier si les jeunes comprennent la pièce jusqu’à maintenant. Pour commencer l’activité, il remet le dossier « Le racisme, au cœur du nazisme[6] » et sélectionne les textes les plus pertinents, soit « Un antisémitisme ancien et diffus », « L’infamie raciale » et « La doctrine nazie ». En groupe de trois, les élèves ont chacun un texte à lire et doivent trouver les éléments importants pour ensuite en faire part aux autres membres de l’équipe. Exemple d’une possible discussion :

 

 

Élève 1 : dans « Un antisémitisme ancien et diffus », on apprend qu’il y a de l’hostilité envers les juifs, des actes de violence. Ils sont vus comme des profiteurs ou des communistes dangereux. On colle des affiches haineuses à leur sujet.

Élève 2 : dans « L’infamie raciale », on montre qu’on persécutait les femmes juives en disant des propos malsains.

Élève 3 : « La doctrine nazie » est un discours d’Hitler. Il dit qu’il doit y avoir un peuple unique, de même sang, avec la même langue.

 

 

 

Lorsque le travail coopératif est terminé, l’enseignant leur demande d’établir des liens entre le dossier et l’œuvre de Schmitt, ce qui les fait cheminer vers la compréhension de la critique sociale. Exemples de réponses attendues :

 

Tout comme dans les textes, on tient des propos méchants envers les juifs, ils sont rabaissés et considérés inférieurs, on les bat à cause de leur race, leurs droits sont brimés, ils sont maltraités.

 

 

Activité 4 – anticipation et écriture

 

Pour préparer les élèves à la lecture de la deuxième partie de l’œuvre et les faire cheminer dans la découverte de la critique sociale, une activité d’anticipation est proposée. Ils pourront alors « établir des liens entre leurs connaissances et le texte[7] » et donc réfléchir à l’histoire de la persécution des juifs. L’activité commence par la lecture de trois extraits tirés de la pièce :

 

- Page 133 : Anna. Non, il n’y a pas de nazis viennois […] il faudrait inventer un nouveau terme pour l’immonde!

- Page 165 : Le nazi (rire gras). Pourquoi? […] Freud (très choqué). Pardon?

- Page 188 : L’Inconnu (doucement). On vous chasse, docteur Freud? […] se laver le cul avec ce que l’on hait?

 

 

L’enseignant propose ensuite aux élèves d’écrire un court texte d’environ 50-75 mots dans lequel ils émettent des hypothèses sur ce qui pourrait être arrivé à Anna depuis qu’elle a été emmenée par la Gestapo. Il lit le début de la page 168 avec eux :

 

L’inconnu. Il ment au sujet d’Anna. On ne l’interroge pas.

Freud (immédiatement inquiet). Anna! Que lui fait-on?

 

 

Exemples de réponses : certains écriront quAnna se fait maltraiter, car elle est juive, qu’on l’insulte en lui disant qu’elle ne vaut rien, qu’elle pue, qu’on menace de la tuer, de l’intoxiquer. D’autres, ayant effectué une lecture plus efficace, répondront qu’Anna se fait insulter, mais finit par revenir saine et sauve, car son père décide de signer le visa de sortie, etc.

 

Lorsque les productions sont terminées, les élèves lisent leur texte à leurs pairs. En entendant des obscénités et des propos malveillants envers les juifs, ils prennent mieux conscience de la façon dont les juifs ont été persécutés et que cela constitue la critique sociale que Schmitt inclut dans Le visiteur. Après la lecture complète de l’œuvre, l’enseignant revient sur les prédictions de ses élèves. Ils auront alors constaté qu’Anna, contrairement aux autres juifs, échappe aux camps de concentration et s’en sort saine et sauve, car son père a décidé de signer le visa de sortie.

 


APRES LA LECTURE

 

Activité 5 – Réflexion sur la foi en Dieu

 

 

L’objectif est de montrer aux élèves que par l’entremise des personnages de Freud et de l’Inconnu, Schmitt présente une réflexion sur l’existence de Dieu. L’activité se réalisera après la lecture de l’œuvre pour approfondir un aspect important de celle-ci, soit le doute de Freud à propos de l’existence de Dieu. Il s’agit d’un élément clé pour saisir l’essence du texte. Elle prend la forme d’une discussion en plénière menée par l’enseignant, dans laquelle il vérifie leur degré de compréhension[8]. Il pose les deux questions suivantes :

 

 

1) Comment qualifierez-vous la foi en Dieu de Freud ? Exemples de réponses des élèves : 1- Elle n’est pas forte, car lorsqu’on a vraiment la foi, on n’a pas besoin de voir un miracle. 2- Freud n’est pas croyant puisqu’il veut des preuves, ce qui relève de la raison. 3- Sa foi est ambigüe, il a envie de croire, car l’Inconnu connait tout de sa vie, mais il essaie de raisonner et se dit que si Dieu existait, il arrêterait le mal.

 

 

2) Selon vous, qu’est-ce qui peut expliquer que Freud se refuse à croire en l’existence de Dieu? Exemples de réponses des élèves : 1- Freud ne croit pas, car Dieu ne fait rien pour éviter que les juifs soient maltraités. 2- Il se refuse à croire, car le monde est rempli de souffrance et d’actes de violence. Si Dieu existait, la vie serait meilleure. 3- Freud a de la difficulté à croire, car lorsque sa fille voit l’Inconnu, Freud réalise qu’elle le connait. Il se demande alors si c’est véritablement Dieu qui s’est incarné dans un corps ou bien s’il s’agit d’un simple mortel. 4- Il ne veut pas croire, car cela embrouille l’esprit.

 

 

Les élèves comprennent alors qu’à travers la réflexion de Freud sur l’existence de Dieu, Schmitt véhicule son message social. Le discours de Freud montre effectivement qu’il ne veut pas croire en Dieu, car les juifs sont persécutés, ce qui est critiqué par Schmitt.

 

 

Activité 6 – écriture d’un extrait de théâtre


L’activité finale constitue une tâche d’écriture créative visant à développer la compétence scripturale des élèves tout en intégrant les apprentissages faits au cours de la séquence. Les élèves sont invités à produire un pastiche sous forme d’un extrait théâtral en poursuivant la dernière scène de la pièce (scène 17, p. 216), et ce, en équipe de deux. Dans leur production, ils devront réinvestir les connaissances apprises sur le théâtre (didascalies, actes, scènes…) et reprendre les thèmes abordés (critique sociale et réflexion sur l’existence de Dieu). Il s’agit là d’un « exercice susceptible de vérifier ou de consolider les acquis en matière de lecture et d’écriture [9]». Les élèves peuvent se servir de tout le matériel utilisé au cours de la séquence pour rédiger.

 

Consigne : Rédigez une dix-huitième scène d’environ 250-350 mots en imaginant ce qui pourrait arriver après le départ de l’Inconnu. Écrivez sous la plume d’Eric-Emmanuel Schmitt en respectant son style d’écriture. À l’intérieur de votre extrait théâtral, respectez les thèmes abordés au cours de la séquence. N’oubliez pas d’utiliser l’organisation textuelle propre au théâtre.

 


Possibles propositions des élèves : 1- faire intervenir un nouveau personnage qui discute avec Freud, par exemple le diable. 2- En quittant Vienne, Freud et Anna sont témoins de l’arrestation brutale d’un couple par la Gestapo. 3- Freud fait un monologue dans lequel il réfléchit à tout ce qui vient de se passer. 4- Anna et Freud discutent ensemble et il la convainc que Dieu n’est qu’une invention pour les esprits faibles, etc.

 

 

 

 

BIBLIOGRAPHIE

 

 


BOUREL, Guillaume et Marielle CHEVALIER, [dir.], Histoire 1re, Éditions Haitier,Paris, 2003.

 

CHAMBERLAND, Gilles Louisette LAVOIE et Danielle MARQUIS, 20 formules pédagogiques, Presses de l’Université du Québec, Sainte-Foy, 176 pages.

 

GIASSON, Jocelyne, Les textes littéraires à l’école, Gaëtan Morin Éditeur, Montréal, 2000, 271 pages.

 

 

GIASSON, Jocelyne, La lecture. De la théorie à la pratique, Gaëtan Morin Éditeur, Montréal, 2000, 398 pages.

 

HUFFMAN, Karen, Mark VERNOY et Judith VERNOY, Psychologie en direct, Modulo Éditeur, Québec, 2000, 492 pages.

 

 

PETITJEAN, André, « Pastiche et parodie : enjeux théoriques et pédagogiques », dans Pratiques, no 42, 1984.

 

 

 

SCHMITT, Eric-Emmanuel, Théâtre: La nuit de Valognes / Le visiteur / La Bâillon / L’école du diable, Albin Michel, 1999, 242 pages.

 

 

 

SIMARD, Denis, « Comment penser aujourd'hui la nature et le rôle de l'école à l'égard de la formation culturelle des élèves?», dans D. Simard et M. Mellouki [dir.], L'enseignement: profession intellectuelle, Québec, PUL, 2004.

 


[1] Ce texte adopte l’orthographe rectifiée.

[2] Jocelyne Giasson, La lecture. De la théorie à la pratique, Gaëtan Morin Éditeur, 2003, p. 95.

[3] Les enseignants désirant en connaitre davantage sur Sigmund Freud pourraient consulter le manuel suivant. Karen Huffman, Mark Vernoy et Judith Vernoy, Psychologie en direct, Modulo Éditeur, Québec, 2000.

[4] Gilles Chamberland, Louisette Lavoie et Danielle Marquis, 20 formules pédagogiques, Presses de l’Université du Québec, Sainte-Foy, p.75.

[5] Denis Simard, « Comment penser aujourd’hui la nature et le rôle de l’école à l’égard de la formation culturelle des élèves? », dans D.Simard et M. Mellouki [dir.], L’enseignement : profession intellectuelle, Québec, PUL, 2004

[6] Les enseignants peuvent trouver ce dossier dans le manuel d’histoire suivant. Guillaume Bourel et Marielle Chevalier [dir.], Histoire 1re, Éditions Haitier, Paris, 2003, p. 254.

[7] Jocelyne Giasson, op.cit., p. 95.

[8] Gilles Chamberland, Louisette Lavoie et Danielle Marquis, op.cit., p. 135.

[9] André Petitjean, « Pastiche et parodie : enjeux théoriques et pédagogiques », dans Pratiques, no 42, 1984, p. 6.

 




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