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Des fraises en janvier

Fiche descriptive
Séquence didactique
Annexes
Des fraises en janvier
DE LA CHENELIÈRE, Évelyne
Par Marie-Christine Joseph


Nationalité de l'auteur : Québécoise
Genre : Théâtre
Courant : Postmodernité
Siècle : 20e siècle
Groupe d'âge visé : Deuxième cycle secondaire
Auteur de la séquence : Marie-Christine Joseph
Date du dépôt : Hiver 2008


Justification de la pertinence de l’oeuvre choisie

 

Ma séquence didactique porte sur la pièce de théâtre Des fraises en janvier[1] d’Évelyne de la Chenelière, une jeune auteure qui fait partie des figures marquantes de la dramaturgie québécoise actuelle. L’intérêt d’étudier cette pièce avec des adolescents réside d’abord dans l’un des thèmes qu’elle aborde, c’est-à-dire les relations amoureuses, qui permet de rejoindre les jeunes, puisqu’il s’agit là d’une dimension de leur vie qui prend de plus en plus de place. Ensuite, la forme que prend la pièce, soit celle d’une intratextualité constante qui se rapproche du théâtre dans le théâtre, représente un défi de lecture intéressant et permet d’initier les élèves à ce procédé d’écriture.

 

Objectifs d'apprentissage et situations-problèmes

 

L’objectif général de cette séquence est d’amener les élèves à construire le sens du texte à partir de leurs connaissances, de réseaux de textes, d’exercices pratiques et à l’aide de notions théoriques. L’ensemble de la séquence vise à amener les élèves à réaliser que, par la mise en abyme, la forme d’un texte qui se dédouble peut révéler une clé de lecture de son contenu, que l’utilisation du théâtre dans le théâtre n’est pas fortuite, mais qu’elle a bel et bien été pensée et qu’elle sert un but particulier, ici brouiller la frontière entre la réalité et la fiction, entre la vérité et le mensonge. De plus, l’un des objectifs secondaires de la séquence est de développer, par l’étude du genre théâtral, l’esprit critique des élèves face à la représentation théâtrale en leur faisant expérimenter la mise en scène.

Cette séquence cherche à résoudre quatre problèmes de lecture:

 

  • Faire ressortir l’opposition être/paraître dans les relations amoureuses présentes dans différents extraits de pièces de théâtre pour ensuite analyser celle de la pièce;
  • Comprendre les notions de métathéâtre, de mise en abyme et de théâtre dans le théâtre ainsi que les effets que ces procédés créent;
  • Interpréter les liens entre la forme non traditionnelle de la pièce et le traitement du thème de l’amour (l’opposition être/paraître);
  • Interpréter la scène finale de la pièce qui laisse le lecteur/spectateur sur un quiproquo afin de trouver des pistes de réponses sur le sens de la pièce.

 

 

LA SEQUENCE



AVANT LA LECTURE

 

Activité 1 Étude de l’opposition être/paraître dans les relations amoureuses au théâtre

 

L’objectif spécifique de cette activité est d’activer les connaissances des élèves au sujet des relations amoureuses et de les amener à reconnaître et à comprendre l’opposition être/paraître dans trois extraits de pièces.

 

- L’enseignant demande aux élèves d’élaborer en équipe une brève définition de ce qu’est l’amour pour eux.

 

- L’enseignant donne à lire trois extraits de pièces qu’il contextualise préalablement : les scènes du bal et du balcon de Roméo et Juliette[2], la scène du baiser de Cyrano de Bergerac[3] et les scènes de travestissement du Jeu de l’amour et du hasard[4]. Les élèves doivent faire ressortir l’opposition être/paraître, présente ou non dans chacun des extraits.

 

Réponses possibles :

  • Dans Cyrano de Bergerac, Cyrano est amoureux de Roxanne alors qu’il ne le laisse pas paraître. Christian, quant à lui, est amoureux de Roxanne et le laisse paraître. De plus, Roxanne n’est pas réellement amoureuse de Christian. Elle est amoureuse de son apparence.
  • Dans Le Jeu de l’amour et du hasard, on envoie le message que lorsqu’il est question d’amour, les êtres ne montrent pas leur vraie nature, qu’ils se montrent sous un meilleur jour, donc qu’il faut se méfier des apparences.

 

- terminer, l’enseignant demande aux élèves de confronter leur conception des relations amoureuses à celles présentées dans le corpus d’extraits, à savoir si elles leur permettent de modifier leur définition de départ, s’ils sont en accord ou en désaccord avec celles des extraits et les raisons qui justifient leur opinion.

 

 

Activité 2 Initier les élèves au métathéâtre, à la mise en abyme et au théâtre dans le théâtre.

 

Cette activité a pour objectif de faire découvrir les notions de métatextualité, de mise en abyme et de l’œuvre dans l’œuvre et les effets de leur emploi à partir de deux extraits de Neige noire d’Hubert Aquin.

 

- L’enseignant demande aux élèves de lire les extraits de Neige noire[5] et d’annoter le texte en fonction de ce qui leur semble étrange sur le plan de la forme et du contenu.

 

Réponses possibles :

  • C’est étrange. Au début du premier extrait, on dirait qu’on est dans un roman et, par la suite, on dirait qu’on nous décrit un film. Il y a des paragraphes qui décrivent des images à insérer dans la scène. De plus, on parle de « ce qui est visible à l’écran », on décrit une scène flash-back et dans quelles conditions la tourner. (p. 5-6)
  • Entre parenthèses, il y a des commentaires sur le scénario et sur Hamlet. (p. 8)
  • Dans le deuxième extrait, Nicolas est l’auteur d’un scénario qu’il veut tourner dans lequel il y a un personnage qui s’appelle Nicolas et dans lequel Nicolas fait des commentaires sur Hamlet. (p. 206-208)

 

- À partir des observations des élèves, l’enseignant aborde les notions de métathéâtre, de mise en abyme, de théâtre dans le théâtre et d’effet d’étrangeté dans un exposé magistral[6].

 

 

Activité 3 Initier les élèves aux langages du théâtre

 

L’objectif de cette activité est de doter les élèves d’outils nécessaires à la réalisation d’une mise en scène.

 

À partir de ce que les élèves croient être des langages théâtraux, l’enseignant complète et présente les dix langages du théâtre en mettant l’accent sur le fait qu’ils émettent des significations dénotatives et connotatives : la parole, le geste, le mouvement, la mimique faciale, le maquillage et la coiffure, le costume, les accessoires, le décor, l’éclairage, la musique et le bruitage[7].

 

 

Activité 4 Mettre en voix la première scène

 

Dès le début de la pièce, la forme que prennent les dialogues rend sa lecture difficile. Cette activité a donc pour but d’aider les élèves à comprendre ce qui se passe dans la pièce dès le départ par sa visualisation.

 

L’enseignant demande à trois élèves de préparer cette scène afin d’en faire une mise en voix devant la classe, avec mise en espace et travail corporel.

 

 

PENDANT LA LECTURE

 

Activité 5 Le journal de lecture

 

Cette activité a pour objectif de permettre aux élèves d’intégrer les notions vues auparavant, de les appliquer au texte analysé et d’interpréter le texte de façon personnelle tout en confrontant et comparant leur vision à celles de leurs pairs et de l’enseignant.

 

- L’enseignant propose aux élèves d’analyser quatre extraits de leur choix de la pièce Des fraises en janvier en fonction des nouveaux savoirs qu’ils viennent d’acquérir. Pour s’assurer que chacun des élèves puisse percevoir l’évolution de la thématique ainsi que celle de la forme du texte, les élèves doivent choisir leurs extraits de la façon suivante : un extrait dans les scènes 1 à 4, un dans les scènes 5 à 8, un dans les scènes 9 à 12 et un dans les scènes 13 à 16.

 

- L’enseignant donne une période de temps en classe pour effectuer le journal après chaque bloc d’extraits ainsi que des pistes d’analyse pour baliser cette dernière.

 

Pistes d’analyse :

  • - Pourquoi as-tu choisi cet extrait?
  • - Y retrouve-t-on l’opposition être/paraître?
  • - Y retrouve-t-on le procédé de la mise en abyme, du théâtre dans le théâtre ou du métathéâtre?
  • - Quel(s) effet(s) crée l’utilisation de ces procédés sur toi, en tant que lecteur, ainsi que sur le sens du texte?
  • - Peux-tu faire un lien entre cet extrait et ceux présentés dans les activités de préparation?
  • - Selon toi, que signifie cet extrait?
  • - Dans cet extrait, y a-t-il des éléments qui te surprennent, qui te déstabilisent, qui te dérangent, qui te semblent étranges?

 

- Après la rédaction de chaque journal, l’enseignant demande aux élèves de s’échanger leur journal pour qu’ils commentent l’analyse de deux de leurs pairs afin de l’enrichir, de questionner les choix de l’élève et d’y confronter leur point de vue. L’enseignant, quant à lui, récupère les journaux après le premier et le troisième bloc et guide les élèves pour les aider à approfondir leur réflexion et les lancer sur des pistes auxquelles ils n’avaient pas pensé.

 

Exemples de ce qui pourrait être analysé par les élèves :

Scène 1

Étude de la forme : L’histoire racontée par François qui prend vie à l’intérieur de la pièce de théâtre et avec laquelle il interagit. – Les questions que posent Robert qui concordent avec celles que François pose à Sophie dans l’histoire qu’il raconte. – Qu’est-ce qui fait partie de la réalité? Qu’est-ce qui fait partie de la fiction?- La dernière réplique de François qui ressemble à une didascalie. Brouillage des limites entre la réalité et la fiction.

Étude de la conception de l’amour de Sophie qui se situe dans l’être et non dans le paraître.

 

-L’enseignant termine cette activité en posant aux élèves la question suivante :

 

En vous basant sur l’analyse de la pièce que vous avez faite dans le journal de lecture, dites en quoi la forme particulière que prend la pièce de théâtre Des fraises en janvier correspond à la thématique qu’elle exploite : l’opposition être/paraître dans les relations amoureuses?

 

 

APRÈS LA LECTURE

  

Activité 6 Jouer et mettre en scène pour mieux comprendre

 

Cette activité a pour objectif d’initier les élèves à la spécificité du théâtre, la transformation du texte littéraire en texte spectaculaire, et d’influencer l’analyse de la pièce en permettant aux élèves d’en avoir une meilleure compréhension grâce à l’action du jeu et de la mise en scène.

 

- L’enseignant demande aux élèves de former des équipes de 3-4 personnes dans lesquelles une personne sera en charge de la mise en scène avec la collaboration des 2-3 autre élèves qui, eux, seront les comédiens.

 

- L’enseignant distribue les scènes à jouer aux différentes équipes : scènes 1-2, 3-4, 5, 7, 10, 12-13, 15, 16. De plus, il spécifie aux élèves qu’ils devront faire des choix cohérents en tenant compte de leur analyse de la pièce qui se trouve dans les journaux de lecture, et ce, à l’aide des langages théâtraux suivants : la parole, le geste, le mouvement et la mimique faciale.

 

- Lorsque les mises en scène sont prêtes, les différentes équipes les présentent à l’ensemble du groupe.

 

- À la suite de cette expérience, l’enseignant invite les élèves à réviser leur journal de lecture fin de revoir leur analyse, d’ajouter des réflexions qu’ont fait naître les mises en scène ou simplement de commenter la mise en scène d’un extrait qu’ils avaient analysé et dire en quoi elle rejoint ou non leur analyse.

 

 

Activité 7 Interpréter la scène finale

 

Cette dernière activité vise le réinvestissement par les élèves de tout ce qui a été vu auparavant dans la construction du ou des sens de la pièce.

 

- L’enseignant fait lire la dernière scène (scène 17) en groupe.

 

- Ensuite, l’enseignant donne la consigne suivante aux élèves et l’écrit au tableau :

 

Après avoir lu la scène finale de la pièce Des fraises en janvier, comment interprétez-vous le fait que François répète la didascalie de la pièce intégralement? Croyez-vous qu’il nous indique que la pièce que nous venons de voir est son scénario ou non? Quel message envoie-t-il sur le sens de la pièce?

 

En équipe de quatre, discutez de ces questions en vous inspirant de vos journaux de lecture afin de déterminer votre position. Vous devrez illustrez vos arguments d’extraits du texte qui prouvent ce que vous avancez.

 

Réponse possible :

Nous croyons qu’il pourrait s’agir du scénario de François en construction, car ce dernier ne cesse de porter des commentaires sur le déroulement de la pièce qui influence son déroulement (scène 1, scène 5, scène 7, scène 10, scène 15, scène 16). De plus, il existe un lien étroit entre l’histoire qui est racontée dans la pièce et le scénario que François écrit dans la pièce, puisqu’un extrait s’y retrouve (la scène de la rupture entre Sophie et François)(Scène 5)

 

- Pour terminer, l’enseignant invite les différentes équipes à présenter à l’ensemble de la classe le résultat de leurs interprétations et à échanger sur celles-ci.

 

 

 

BIBLIOGRAPHIE

 

Œuvres étudiées

 

AQUIN, Hubert, Neige noire, Bibliothèque québécoise, Montréal, 1997, p. 5-10 et p. 216-217.

DE LA CHENELIÈRE, Évelyne, « Des fraises en janvier », Théâtre, Fides, 2003, p. 7-67.

MARIVAUX, Le jeu de l’amour et du hasard, Acte I, scènes 2 et 4, Hachette, Paris, 1993, p. 16-21.

ROSTAND, Edmond, Cyrano de Bergerac, Acte III , scènes 6-7, Beauchemin, Montréal, 2002, p. 146-161.

SHAKESPEARE, Roméo et Juliette, Acte I, scène 5 et Acte II, scène 2, Garnier-Flammarion, Paris, 1979, p. 169-174 et p. 177-182.

 

Ouvrages de référence

 

GIRARD, G. (et al.), « Les langages du théâtre », L’univers du théâtre, PUF, Paris, 1995, p. 33-93.

PAVIS, Patrice, « Métathéâtre », « Mise en abyme », « Théâtre dans le théâtre », « Effet d’étrangeté », Dictionnaire du théâtre, Armand Colin, Paris, 2002, p. 203-204, p. 209, p. 365 et p. 114.

 

Articles de périodiques

 

BOISCLAIR, Isabelle, « Marier le littéraire et le spectaculaire », Québec français, été 98, no 110, p. 81-83.

BRILLANT-ANNEQUIN, Annick, « La lecture de spectacle théâtral dans l’enseignement secondaire », Enjeux, no 51/52, juin-déc. 2001, p. 31-51.

DE PERETTI, Isabelle et al., « Bourreaux et victimes : des élèves de lycées professionnel, polyvalent et général face à l’univers tragique », Actes du colloque Littérature et pratiques d’enseignement apprentissage : difficultés et résistances. Aix-en-Provence : 20-22 octobre 2005. http://www.fse.ulaval.ca/litactcolaix/auteurs/symposium1.pdf

L’HÉRAULT, Pierre, « Imaginer pour vérifier », Spirale, no 194, janv.-fév. 2004, p. 26-27.

WILHELM, Frank (sous la dir.), Le théâtre dans le théâtre, le cinéma dans le cinéma, Lansman Éditeur, Carnières-Morlanwelz, 1998, p. 11- 21 et p. 165-182.

 



[1] Évelyne de la Chenelière, Théâtre, Fides, 2003, p, 7-67.

[2] Shakespeare, Roméo et Juliette, (I, 5 et II, 2), Garnier-Flammarion, Paris, 1979, p. 169-174 et p. 177-182.

[3] Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac, (III, 5-7), Beauchemin, Montréal, 2002, p. 146-161.

[4] Marivaux, Le jeu de l’amour et du hasard, (I, 2 et 4), Hachette, Paris, 1993, p. 16-21.

[5] Hubert Aquin, Neige noire, Bibliohtèque québécoise, Montréal, 1997, p. 5-10 et p. 206-208.

[6] Pour une bonne définition de ces notions, voir celles que propose Patrice Pavis dans son Dictionnaire du théâtre (Armand Colin, Paris, 2002).

[7] On peut trouver une excellente synthèse descriptive de ces différents langages au chapitre II intitulé « Les langages du théâtre » de l’ouvrage suivant : GIRARD, G. (et al.), L’univers du théâtre, PUF, Paris, 1995, p. 33-93. De plus, l’enseignant peut présenter des extraits vidéo de représentations théâtrales qui illustrent divers emplois possibles de ces langages.


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