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Alice au pays des merveilles

Fiche descriptive
Séquence didactique
Annexes
Alice au pays des merveilles
CARROLL, Lewis
Par Samira Ben Messaoud, Anny Demers


Nationalité de l'auteur : Anglaise
Genre : Contes et récits
Courant : Autres
Siècle : 19e siècle
Groupe d'âge visé : Deuxième cycle secondaire
Auteur de la séquence : Samira Ben Messaoud, Anny Demers
Date du dépôt : Hiver 2009


 

Justification de l’œuvre à l’étude

 

Aborder un conte pour enfants, tel qu’Alice au Pays des Merveilles, avec des élèves de secondaire cinq peut sembler, au premier abord, inopportun, puisque les élèves de ce niveau sont, d’ordinaire, amenés à voir, et ce, en priorité, les genres de textes de type argumentatif. Certes, mais rien n’indique, du moins au Québec, que les autres types de textes ne peuvent également venir enrichir leur expérience culturelle.

 

Problèmes à résoudre

 

Le fait que ce soit un texte qui était, à l’origine, destiné aux enfants, rend la lecture de ce conte accessible à tous, les plus petits comme les plus vieux. Or, pour en arriver à faire une lecture qui dépasserait le simple niveau de sens littéral, il faut en somme résoudre ces deux problèmes que pose le texte :

 

1) un problème d’ordre typologique :

c'est qu'Alice, qui devrait s'inscrire naturellement dans le genre du conte pour enfants, dépasse largement la typologie qui est propre au merveilleux. En fait, Carroll a ajouté un élément au merveilleux qui est peu fréquent dans les contes folkloriques: le rêve.

 

2) un problème de l’ordre de la représentation elle-même :

la représentation de l’enfant que nous donne Carroll à travers la petite Alice ne cadre pas avec celle qu’on avait de l’enfant au XIXe siècle. En fait, c'est qu'Alice se permet, de par ses audaces, de transgresser la morale établie, ce qui va à l'encontre de l'idée même que l'on attendait d'un conte à cette époque. 

 

Objectifs

 

Les élèves pourront réaliser qu’Alice, même si, à l’origine, n’était qu’un texte destiné aux enfants, est plus qu’un conte enfantin : il s’agit d’un texte qui a marqué l’histoire de la littérature elle-même. Davantage, ce que Carroll nous a donné avec Alice, c’est une redéfinition des bases de la littérature pour enfants en mettant, notamment, l’imagination au service de l’enfance. En somme, l’idée est de montrer que Carroll est l’un des premiers à avoir soustrait de la littérature de jeunesse sa visée didactique et religieuse.

 

LA SÉQUENCE

 

AVANT LA LECTURE

 

Activité 1 - Ce que représente l’enfance pour vous

 

Avant d’entrer dans la lecture de l’œuvre ainsi que dans son étude, il est à notre sens essentiel de discuter de ce que représente l’enfance pour les élèves. Cette entrée en matière devrait permettre aux élèves de voir que l’idée qu’ils ont de l’enfance n’est pas celle qu’on en avait seulement un siècle plutôt.

 

Activité 2 - Recherche sur la représentation de l’enfance au XIXe siècle

 

Une fois que nous avons circonscrit ce que représente la période de l’enfance pour des élèves du XXIe siècle, une recherche s’impose.  Sur le site de la bibliothèque nationale de France, on  trouve un dossier intitulé Babar, Harry Potter et cie. Livres pour enfants d’hier et d’aujourd’hui qui devrait nous donner une idée de ce que pouvait représenter l’enfance aux yeux des hommes du XIXe siècle. En effet, à partir des informations trouvées sur ce site, les élèves pourront voir que cette idée de l’enfance était à l’origine idéalisée : le livre pour enfants visait non pas à développer la dimension imaginative qui est si caractéristique à cette période, mais bien à instruire de la morale et des bonnes conduites à adopter en société.

 

PENDANT LA LECTURE

 

Activité 3 - Lecture accompagnée de l’œuvre 

 

Les élèves ont maintenant une certaine représentation de l’époque dans laquelle prend vie l’œuvre à lire : ils peuvent donc commencer leur lecture. Or, cette lecture ne saurait être efficace sans que l’on aide les élèves à porter leur attention sur des éléments en particulier, des éléments, en fait, qui sont en lien avec nos deux problèmes à résoudre.  En effet, rien ne nous indique que les élèves peuvent par eux-mêmes effectuer ce que l’on peut considérer comme une lecture de deuxième niveau. C’est pourquoi, en ayant en mains une série de questions qui serviront à accompagner leur lecture, les élèves pourront mieux repérer les éléments de l’œuvre qui sont porteurs de sens. Voici les éléments que nous aimerions qu’ils remarquent. 

1. Comment Alice réagit-elle face aux éléments merveilleux qu’elle rencontre?

2. Si Alice, au début de l’histoire, devait tomber pour se rendre au pays des merveilles, comment fait-elle pour le quitter à la fin?

3. Lors de la partie de croquet, comment Alice réagit-elle quand la Reine s’adresse directement à elle? De quelles natures sont ces répliques, mais aussi comment réagit-elle face à ses propres répliques?

4. Outre Alice, nommez un personnage central de cette œuvre et pourquoi nommez-vous celui-là?

5. Est-ce que la Reine a une véritable autorité sur son royaume?

 

Activité 4 - L’apport du genre pour la compréhension de l’œuvre

 

La question du genre est d’une importance capitale pour bien comprendre pourquoi Alice peut interagir de façon désinvolte (parfois) et de façon audacieuse (souvent) avec les personnages qu’elle rencontre, alors que cette conduite est tout à fait contraire à ce que l’on attendait d’une petite fille de cette époque. L’idée est donc de faire voir aux élèves que seul le genre littéraire «choisi» par Carroll permet cette transgression. Pour ce faire, les élèves devront commencer par comparer le conte du Petit Chaperon rouge de Perrault avec Alice de Carroll, à partir des critères mentionnés ci-dessous qui ne visent pas à faire entrer les élèves dans les définitions strictes du genre, mais bien à leur donner une idée générale des grands traits qui caractérisent le genre du conte merveilleux pour enfants.

  • Les contes peuvent animer les animaux et les végétaux, tout comme les choses inertes.
  • Dans les contes, seules les lois physiques (exemple, un lapin qui parle, Alice qui grandit et rapetisse) sont transgressées. Donc, si des lois morales sont transgressées, cette transgression fera par la suite l’objet d’une punition, ce qui n’est pas le cas pour les transgressions physiques.
  • Les contes se terminent toujours par une morale à retenir, que cette dernière édifie ou non le personnage de l’histoire.[1]

 

Cette mise en relief devrait avoir permis aux élèves de voir qu’avec Alice nous ne sommes pas en présence d’un conte traditionnel. Mais, dans ce cas, à quel genre doit-on dire que le «conte» de Carroll correspond? En fait, c’est que Carroll a ajouté au merveilleux un élément qui est peu fréquent dans les contes pour enfants : le rêve. Il s’agira donc de demander aux élèves de relever dans le texte autant d’éléments qui relèvent de la structure onirique. Pour ce faire, l’enseignant, à priori, devra avoir indiqué aux élèves qu’Alice, du fait qu’elle rêve, peut se permettre tout ce qu’elle veut du moment qu’elle en exprime le désir. Par exemple, la petite fiole, sur laquelle est écrit «Bois-moi», apparait au moment où Alice pense, que si elle était petite, elle pourrait ouvrir la petite porte et traverser vers le jardin. Du coup, ils devraient comprendre que c’est parce qu’Alice rêve qu’elle peut transgresser la morale établie et, conséquemment, transgresser la représentation de l’enfance qui était de mise au XIXe siècle.

 

APRÈS LA LECTURE

 

Activité 5 - Comparaison du film de Disney et de l’œuvre de Carroll

 

Le film Alice au pays des merveilles est une réécriture de l’œuvre de Lewis Carroll par Walt Disney. Les élèves comprendront que Disney[2] n’a pas inventé cette œuvre, mais bien qu’il propose sa propre vision de celle-ci. Lors du visionnement du film en classe, les élèves devront noter les passages du film qui diffèrent du livre. En effet, des scènes de l’œuvre de Carroll ont été supprimées ou modifiées dans la version proposée par Disney. De plus, certains éléments, comme les multiples chansons, ont été ajoutés.

 

Grâce aux observations que les élèves mentionnent, ils seront à même de constater que, malgré les changements que Disney a faits, le film s’inscrit dans l’univers de Lewis Carroll. Les personnages de Disney respectent la douce folie de Carroll et le plus important est qu’Alice garde son caractère curieux et qu’elle questionne constamment les gens, les animaux, les plantes et toutes les créatures qu’elle rencontre sur son chemin. Avec ce constat, les élèves sont prêts à faire la prochaine activité. 

 

Activité 6 - Le pastiche

 

L’activité du pastiche permettra aux élèves de venir consolider leurs acquis en regard d’une représentation de l’enfance qui peut transgresser un certain stéréotype, mais aussi en regard d’un genre qui dépasse les limites du merveilleux : c’est ainsi que les élèves devront, en fait, terminer le rêve d’Alice. En effet, dans le «conte», le rêve se termine plutôt brusquement, comme n’importe quel rêve. Mais, comme dans n’importe quel rêve aussi, Alice aurait très bien pu continuer à rêver… Les élèves devront donc continuer le rêve d’Alice en respectant, d’une part, la structure onirique du «conte» (donc, rêve et merveilleux) et, d’autre part, en respectant la personnalité d’Alice, une personnalité qui est souvent libérée des conventions admises.

 

Conclusion

 

Cette séquence didactique devrait avoir permis aux élèves d’aborder Alice au pays des merveilles avant, pendant et après leur lecture de l’œuvre. Par leur recherche sur la représentation de l’enfance dans les œuvres littéraires du XIXe siècle, mais aussi, par leur travail sur la question du genre atypique, les élèves auront probablement pris conscience de l’importance de considérer sous plusieurs angles un texte si l’on veut être à même d’en juger son contenu, d’une part, et sa forme, d’autre part. Cette séquence didactique devrait ainsi avoir été une occasion pour les élèves d’entrer en contact avec un des pans de la culture occidentale, soit sa littérature enfantine. En effet, c’est en comparant, par exemple, deux contes différents (Le petit chaperon rouge et Alice), que les élèves auront pu inscrire un texte dans une tradition littéraire et, ainsi, en mesurer toute sa spécificité. En somme, les élèves devraient avoir réalisé que tous les contes merveilleux pour enfants ne sont pas moralisateurs et qu’Alice, de par la représentation d’une enfant qui peut, du fait qu’elle rêve, tout se permettre, et ce, sans jamais être punie, démontre assez bien qu’un texte peut sortir des standards attendus et, ainsi, innover.



[1] Critères inspirés de Jean Gattégno, dans Lewis Carrol, Paris, Librairie José Corti, 1970, pp.86-90. Mais aussi, ce texte critique nous a servi è monter l'activité 4.

[2] L’enseignante peut mentionner au passage que d’autres films de Disney tels que Blanche-Neige et Cendrillon sont des réécritures de contes folkloriques.

 

Références

Bibliothèque nationale de France. Exposition virtuelle intitulée Babar, Harry Potter et cie. Livres pour enfants d’hier et d’aujourd’hui, section «Livres à feuilleter». Adresse : http://expositions.bnf.fr/

Gattégno, Jean, Lewis Carrol, Paris, Librairie José Corti, 1970

Perrault, Charles, Contes de Perrault, Bourges, Éditions Garnier Frères, 1967, pp.113-115.

Studio Disney (réalisation), Alice au pays des merveilles, États-Unis, 1951 (réédition de 2004), en DVD, 75 minutes.



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