Justification de l'oeuvre

Notre choix s’est arrêté sur le roman Marmotte, de Bryan Perro, d’abord pour son déroulement narratif et ses particularités stylistiques. De plus, le caractère dérangeant des contenus interpellera surement les élèves. Considérant l’extrémisme des idées et des mœurs du roman, notre séquence didactique s’adresse idéalement aux élèves de 5e secondaire.  Nous trouvions intéressant de faire lire aux élèves un roman d’un auteur qu’ils connaissent, mais qui déroge complètement du style qu’ils lui connaissent, le fantastique.

Problèmes à résoudre

Le récit de Marmotte présente des difficultés rendant le choix de ce roman intéressant. Ainsi, on vise par cette séquence à: amener l’élève à voir au-delà des jeux de langue et de comprendre le but de leur utilisation; tracer l’évolution psychologique de Marmotte; comprendre le point de vue moral de l’auteur. Notre démarche vise, à travers différentes activités, à aller au-delà de ces problèmes et à faciliter la compréhension de ce roman. Finalement, nous espérons que les élèves vivront la lecture de ce roman comme quelque chose d’enrichissant sur le plan personnel.

LA SÉQUENCE

AVANT LA LRCTURE

Activité 1 - Présentation de l’auteur et de son projet

Afin de préparer les élèves à la lecture de ce roman, l’enseignant leur présente, en guise d’introduction, une courte biographie portant sur l’auteur de Marmotte, Bryan Perro. Comme beaucoup d’élèves connaissent déjà cet auteur par le phénomène Amos Daragon, la présentation n’a pas besoin d’être exhaustive, cependant l’enseignant est invité à parler de ses œuvres et de son cheminement. Aussi, un univers d’attentes aura peut-être été créé lors de cette présentation et l’enseignant pourra le détruire en présentant rapidement le roman à l’étude.

Activité 2 - Le forum

La lecture du roman se fait à la maison, mais demeure orientée par l’enseignant à l’intérieur d’un forum de discussion sur Internet. Il s’agit d’une version électronique du journal dialogué présenté par Monique Lebrun, par lequel les élèves sont invités à faire part de leurs impressions sur la lecture et des problèmes rencontrés.  Ainsi, les élèves pourront répondre à leurs questions entre eux et si besoin est, l’enseignant répondra ou proposera de nouvelles pistes de réflexion. Lorsque la lecture sera complétée, toutes les interventions pertinentes sur le forum seront imprimées et données aux élèves avant l’étape de réinvestissement. Ils pourront alors joindre ce document aux autres activités réalisées au cours de cette séquence et s’en servir pour leur activité finale d’écriture.

Activité 3 - Le lexique

La lecture de ce roman est rendue difficile pour les élèves par l’utilisation d’un langage et d’expressions qui sont propres à Marmotte, le personnage principal. Afin de sensibiliser les élèves à ces difficultés et de faciliter leur compréhension du roman, ils auront à construire un lexique qui compilera les problèmes rencontrés. L’enseignant questionne alors les élèves sur ce qu’est un calembour et leur explique que le roman qu’ils liront en contient plusieurs, de difficultés différentes.
Il leur explique ensuite qu’ils devront, tout au long de leur lecture, compléter un tableau sur le lexique du texte. Ce dernier compilera toutes les difficultés rencontrées, ainsi que le sens réel de l’expression et l’explication des stratégies mises en place pour arriver à cette réponse. Pour les aider dans leur compilation, l’enseignant fournit un modèle de tableau aux élèves. S’il arrive que l’élève rencontre des mots dont le sens lui est totalement inconnu, il pourra utiliser le forum pour y écrire son questionnement.

Activité 4 - Les personnages

A) Réseau social : Tout au long du récit, le jeune Marmotte interagit avec plusieurs personnages aux personnalités différentes. Ces derniers ont tous une influence sur les gestes de Marmotte et sur sa personne. Les élèves sont ici invités à mettre en lumière le réseau social de Marmotte. À l'aide de ces différents liens, les élèves seront en mesure de mieux comprendre le jeune narrateur.
Les élèves doivent donc, tout au long de la lecture, développer un « réseau de concepts » représentant toutes les relations interpersonnelles qu'entretient le personnage principal. Pour tous les personnages, les élèves doivent identifier trois éléments : nom, statut et information. Ce schéma, qui sera en constante évolution plus la lecture avancera, servira d'assise à l'élément central de cette activité: le portrait psychologique de Marmotte.

B) Portrait psychologique : L’enseignant explique la 2e partie de cette activité : tracer le portrait psychologique de Marmotte. La consigne pour cette activité est la suivante: l'élève, après sa lecture des chapitres I à XI, doit écrire un texte descriptif de 300 mots. Ce texte doit tracer le portrait du personnage principal du roman, à partir des informations obtenues. Ensuite, l'élève peut reprendre sa lecture jusqu'au chapitre XXV. À ce moment, on demande à l'élève de s’arrêter à nouveau et d'écrire un nouveau texte traçant le portrait psychologique de Marmotte. Finalement, il reprend sa lecture jusqu'à la fin du roman et quand il l'aura terminé, il composera son troisième texte, sur le même sujet. Il est important d'expliquer aux élèves qu'il s'agit de trois textes distincts et qu'à chaque fois, ils doivent recommencer un texte, comme si c’était le premier. Une fois ces trois portraits terminés, les élèves joindront leurs textes pour en faire un nouveau qui tracera l'évolution du jeune personnage. Ils n'auront qu'à ajouter une courte introduction et une courte conclusion à ces textes, pour les compléter. L’enseignant doit rappeler aux élèves que le schéma fait en A), ainsi que les activités précédentes représentent de très bons outils pour la réalisation de cette activité.

APRÈS LA LECTURE

Activité 5 - Digressions ou passages réflexifs

Perro présente, dans son roman, un point de vue moralisateur sur la vie. Afin que les élèves prennent conscience de ce message, l’enseignant proposera une activité sur les digressions et les passages réflexifs de Marmotte. En premier lieu, l’enseignant explique aux élèves ce qu’est la digression. Ensuite, l’enseignant utilisera des passages précis du roman pour illustrer ce procédé. L’activité prendra la forme d’une discussion ouverte entre les élèves et l’enseignant. Le travail se fait ici avec les mêmes sections que celles utilisées pour l’activité précédente. Dans l’analyse de la digression/réflexion, une liberté interprétative est laissée à l’élève puisque le roman ne répond pas toujours textuellement à ces questions. Cette liberté, encouragée par l’enseignant, pourrait conditionner le déclenchement d’un sentiment d’appartenance au livre. L’enseignant peut guider la discussion à partir de ces thèmes :

1) Vision de Marmotte à travers le regard qu’il porte sur son père (Ch. I à XI) : À partir de votre compréhension du rapport de Marmotte à son père dans ces chapitres, commentez cette réflexion de Marmotte :« Il parait qu’il faut passer beaucoup de temps à la taverne pour comprendre le langage des cochons. J’aimerais bien être un vrai cochon un jour. Ils sont toujours heureux. Ils crient, ils chantent, ils boivent de la bière et ils se tapent sur la gueule. C’est pour ça que je mange comme un cochon et que je regarde sous la jupe de la reine d’Angleterre. »

2) Conséquences comportementales de sa vision particulière (déformée) et de l’influence du père (ch. XII à XXIV) : Dans ces chapitres, la compréhension de certaines valeurs universelles évolue chez Marmotte, notamment par sa relation avec Rintintin : « L’amour, c’est quand il y a quelque chose qui bouille en dedans et qui, tout à coup, explose dans la figure de quelqu’un d’autre. L’amour, c’est l’envie de prendre quelqu’un dans ses bras pour mieux l’étouffer. » Considérant cette digression, montrez, à l’aide d’un exemple tiré des ces chapitres, comment Marmotte met en action sa définition de l’amour.

3) Prise de conscience de Marmotte (Ch. XXV à XXX) : « Dans la vie, il faut mourir pour évoluer. » Montrez, en vous appuyant au besoin sur des exemples tirés des premiers et derniers chapitres, ce qui permet à Marmotte de créer un rapprochement entre la mort et le fait d’évoluer.

Activité 6 - Discussion intertextuelle

Le concept du narrateur-enfant n’est pas unique à Perro. Afin de faire prendre conscience de la richesse et de la variété d’utilisation de ce procédé narratif aux élèves, l’enseignant leur propose une activité portant sur le sujet. Ainsi, sur une même feuille, l’enseignant mêle deux passages, tirés de textes mettant en scène un narrateur-enfant, à un passage de Marmotte. Les nouveaux extraits peuvent être tirés de L’avalée des avalés, de Réjean Ducharme ou du Petit Nicolas, de Sempé. Dès lors, l’enseignant crée des sous-groupes et distribue aux équipes une feuille où les extraits sont différents pour chaque équipe. Les élèves sont ici amenés à constater qu’un narrateur-enfant peut entretenir plusieurs types de discours. L’objectif de la discussion est de faire ressortir quelques éléments, de forme ou de fond, qui nous font comprendre les différences narratives et les spécificités qu’entretiennent les trois auteurs.

Activité 7 - Écriture

La lecture de Marmotte est maintenant terminée et l’essentiel du travail d’analyse qui peut être fait avec les élèves est complété. Cette dernière activité vise à permettre aux élèves d’intégrer l’ensemble de leurs nouvelles connaissances dans un travail d’écriture narrative, le pastiche. Il est ici demandé à l’élève de pasticher Marmotte en choisissant l’une des 2 situations suivantes : écrire le premier chapitre de la suite de Marmotte ou composer un dialogue entre Rintintin et Marmotte suite aux évènements de la page 142. Pour réaliser cette activité, l’enseignant remet aux élèves le document produit à partir des entrées du forum et mentionne aux élèves qu’ils peuvent utiliser tous les documents produits lors de cette séquence d’enseignement-apprentissage.

Bibliographie
AMOS DARAGON. Les livres, [en ligne]. [http://www.amosdaragon.com/] (8 avril 2009).
BARTHES, Roland. Le plaisir du texte, Paris, Éditions du Seuil, 1973, 105 p.
BRYAN PERRO. Biographie, [en ligne]. [http://www.bryanperro.com/] (12 avril 2009).
GENETTE, Gérard. Palimpsestes. La littérature au second degré, Seuil, 1982, 467 p.
LEBRUN, Monique. «Un outil d’appropriation du texte littéraire : le journal dialogué», Pour une lecture littéraire II. Actes du colloque de Louvain-la-Neuve, 1995, Bruxelles, De Boeck-Duculot, p.272-281.
PENNAC, Daniel. Comme un roman, Paris, Gallimard, 173 p.
PERRO, Bryan. Marmotte, Shawinigan, Glanures, 1998, 161 p.
PONTBRIAND, Jean-Noël. Les mots à découvert, Québec, Les Éditions de la Huit, 2004, p. 120.
SEMPÉ, Jean-Jacques. Le petit Nicolas, Paris, Gallimard, Folio junior, 1999, 176 p.
SIMARD, Claude. « Le choix des textes littéraires une question idéologique », Québec français, hiver 1996, numéro 100.