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Ne blâmez jamais les bédouins

Fiche descriptive
Séquence didactique
Annexes
Ne blâmez jamais les bédouins
DUBOIS, René-Daniel
Par Audrey Lizotte


Nationalité de l'auteur : Québécoise
Genre : Théâtre
Courant : Postmodernité
Siècle : 20e siècle
Groupe d'âge visé : Collégial
Auteur de la séquence : Audrey Lizotte
Date du dépôt : Hiver 2009


 

Pertinence du texte choisi

 

 D’un point de vue littéraire, l’œuvre semble représentative du théâtre postmoderne, particulièrement effervescent dans les années 1980 au Québec. Ainsi, une séquence didactique centrée sur la pièce Ne blâmez jamais les bédouins permet de revisiter un texte important de la littérature québécoise tout en observant de quelle façon il s’inscrit dans la postmodernité en transgressant les normes de genre littéraire et en ne respectant pas les règles classiques du théâtre.

 

D’un point de vue didactique, l’œuvre de René-Daniel Dubois possède un caractère foncièrement ludique par son écriture atypique. En effet, des trois personnages principaux, deux n’ont pas le français pour langue maternelle (une Italienne et un Allemand) et le texte transmet l’accent particulier de ces deux personnages. Par ses préoccupations stylistiques, le texte de Dubois est tout à fait unique en son genre.

 

Problème à résoudre et objectifs

 

La séquence didactique que nous proposons ici est centrée sur la pièce Ne blâmez jamais les bédouins, qui est abordée dans le but de résoudre une situation-problème orientée vers la compréhension des particularités du théâtre postmoderne. Avec cette situation-problème, nous visons trois objectifs spécifiques. D’abord, la séquence didactique est créée dans le but que l’étudiant puisse, à la fin de son parcours, analyser l’effet de l’usage de stéréotypes dans l’œuvre. Ensuite, les étudiants auront à analyser l’impact des niveaux de langue et des particularités langagières dans la littérature québécoise. Finalement, les étudiants devraient être capables d’identifier les particularités de l’hybridation générique propre à la postmodernité.

 

LA SÉQUENCE

 

AVANT LA LECTURE

 

Activité 1 - Les genres littéraires 

 

Afin de familiariser les étudiants avec les caractéristiques des divers genres littéraires, la première activité permettra de vérifier les connaissances préalables des étudiants quant aux genres littéraires. Cette activité a lieu au tout début de la séquence puisqu’elle permet à la fois de faire ressortir les préconceptions des étudiants par rapport aux règles propres à chacun des genres littéraires et de réactiver leurs connaissances antérieures. Les étudiants se placeront en petites équipes (3-4 personnes) et l’enseignant leur distribuera différents extraits de textes qu’ils devront classer par genre. L’enseignant veillera à proposer des texte respectant les caractéristiques génériques (par exemple, des extraits de Madame Bovary de Flaubert, des Fleurs du mal de Baudelaire, de L’Avare de Molière et des Essais de Montaigne) ainsi que des extraits présentant un caractère ambigu (poèmes en prose par exemple) ou mélangeant divers genres littéraires (par exemple : À Rebours de Huysmans, La traversée des langages d’Armand Gatti, Les petits traités de Pascal Quignard et Scènes d’enfants de Normand Chaurette). Par la suite, chaque équipe devra expliquer les raisons qui justifient le classement qu’elle a fait des œuvres. Lorsque le tour de table se terminera, l’enseignant demandera aux équipes de se créer une définition des caractéristiques propres à chaque genre littéraire identifié. Les étudiants seront par la suite appelés à partager leurs définitions et à vérifier si tous les textes entrent clairement dans une catégorie. C’est alors que l’enseignant pourra expliquer aux étudiants la notion d’hybridation générique, caractéristique que les étudiants retrouveront aussi lors de la lecture de Ne blâmez jamais les bédouins.

 

Activité 2 - Caractérsitiques génériques des textes dramatiques

 

La seconde activité proposée vise à s’assurer que les étudiants comprennent bien les particularités des textes dramaturgiques. Toujours en équipe, les étudiants devront reprendre les textes qu’ils avaient classés dans le genre théâtral à l’activité précédente. Ils auront à remplir un tableau des convergences entre les différents textes. Ainsi, les étudiants dresseront un portrait des caractéristiques communes aux textes de théâtre qu’ils auront étudié. L’enseignant demandera par la suite à un étudiant dans chacune des équipes d’écrire, sur un acétate, un point convergent entre les textes. L’enseignant fera un retour avec les étudiants sur les caractéristiques relevées et s’assurera alors que les étudiants ont repéré toutes les caractéristiques du genre théâtral (didascalie, aparté, etc.) et présentera celles qui n’auront pas été nommées par les étudiants. Lorsqu’il fera le retour sur les points qui ne sont pas communs à tous les textes, l’enseignant questionnera les étudiants afin de vérifier si les caractéristiques recensées sont réellement propres au genre théâtral ou non. Ainsi, les étudiants posséderont les notions théâtrales de base et verront, dans le texte de Dubois, où se trouve l’hybridation générique.

 

Activité 3 - Les stéréotypes contemporains

 

L’avant-dernière activité faite avant la lecture vise à faire prendre conscience aux étudiants de l’omniprésence des stéréotypes dans la société contemporaine. Pour ce faire, l’enseignant demandera aux étudiants d’écrire le portrait de divers personnage : un Allemand, une chanteuse d’opéra et un étudiant modèle. Les étudiants devront  rédiger un portrait physique, psychologique et social de chacun des personnages en environ 150 mots en respectant les clichés propres à chacun des personnages. Par la suite, les étudiants se réuniront en équipe de 6 personnes et liront à leurs coéquipiers les textes qu’ils ont écrits dans le but de les comparer et de partager les points communs avec le reste de la classe. Il devrait en effet y avoir une bonne part d’homogénéité dans les descriptions données par chacune des équipes. Lorsque ce sera fait les étudiants auront à discuter entre eux des diverses catégories de stéréotypes présentes dans le monde contemporain (sociaux, sexuels, ethniques, etc.) et de les inscrire dans un tableau. On leur présentera par la suite diverses publicités télévisuelles (par exemple, une publicité de bière, une publicité de pizza, une publicité d’automobile, etc.) où les étudiants devront déterminer s’il y a un stéréotype et, si c’est le cas, de quel ordre est ce stéréotype. Finalement, les étudiants devront trouver un exemple personnel de chacune des catégories de stéréotypes. Ils travailleront de manière individuelle, puis, après une dizaine de minutes, partageront leurs réponses en équipe afin de compléter le document. Cette façon de faire favorisera le partage de connaissances entre les étudiants et leur permettra de compléter leur tableau. Cette activité, placée en début de parcours, se veut une introduction à la notion de stéréotype ayant pour but de sensibiliser les étudiants, ce qui leur permettra de les repérer plus aisément lors de leur lecture de Ne blâmez jamais les bédouins.

 

Activité 4 - Lecture à voix haute 

 

Une des grandes difficultés de lecture que les étudiants risquent de rencontrer à la lecture de la pièce de René-Daniel Dubois est la compréhension de la langue. En effet, l’écriture au son que présente l’auteur est très difficile à lire au départ. Les étudiants, qui auront à lire la version solo de la pièce (l’édition contient la version solo et la version pleine distribution), doivent donc être préparés à lire un texte atypique. Nous croyons qu’il est pertinent d’amorcer la lecture en classe, afin de montrer aux étudiants que le texte, lu à voix haute, n’est pas aussi compliqué qu’il a l’air. L’enseignant lira donc le début de la pièce, soit les pages 31 à 37. Ainsi, les étudiants pourront prendre plaisir à écouter l’histoire leur être racontée, ils pourront prendre « le temps d’écouter un texte, d’être touchés[1] ». À la suite de la lecture, les étudiants seront invités à reformuler verbalement ce qu’ils ont compris de ce qui se passe. Si certaines portions du texte ou certains mots ont été moins bien compris par certains étudiants, l’enseignant et les étudiants tenteront de suggérer des pistes d’interprétation du texte. Cette activité est placée tout juste avant la lecture parce qu’elle constitue une bonne introduction au texte situé au cœur de cette séquence didactique en plus de présenter efficacement le travail opéré sur la langue, qui sera approfondi avec la lecture du texte et avec la poursuite de la séquence didactique.

 

 

PENDANT LA LECTURE

 

           

Activité 5 - Portraits des personnages et stéréotype 

 

Les étudiants auront à lire en devoir les pages 38 à 62 (les pages 31 à 37 ayant déjà été lues en classe le cours précédent). Pour cette activité, les étudiants se placeront en équipes de trois ou quatre. L’enseignant assignera alors un des trois personnages principaux (Weulf, Michaella, Flip) à chaque équipe, qui devra en faire un portait littéraire et pictural aussi précis que possible. On leur demandera ensuite d’expliquer si le personnage qu’ils avaient à analyser a un caractère stéréotypé et si c’est le cas, de relever les indices qui le prouvent. Par la suite, il y aura une mise en commun des portraits faits par les étudiants. Lorsque les groupes présenteront les personnages sur lesquels ils n’ont pas travaillé, les étudiants seront invités à prendre des notes afin d’avoir un portrait complet des personnages. Par la suite, les étudiants devront, de façon individuelle, inventer un personnage basé sur un stéréotype. Ils en dresseront le portrait en environ 300 mots de manière à avoir une image assez précise du personnage. Cette activité est importante, car elle constitue la base de la dernière activité de la séquence didactique, l’activité d’évaluation où les étudiants pratiqueront l’écriture créative. Le personnage qu’ils auront ainsi créé leur sera donc utile au terme de la séquence.

 

Activité 6 - Niveaux de langue et style d'écriture 

 

La lecture à voix haute faite à l’activité quatre avait pour but d’apprivoiser la langue utilisée par René-Daniel Dubois dans sa pièce. Maintenant que les étudiants ont lu la moitié de la pièce et qu’ils sont habitués au style d’écriture de l’auteur, il est primordial qu’ils prennent un recul par rapport à l’écriture particulière de l’auteur et se questionnent sur les conséquences de cette écriture qui imite les accents des personnages et qui ne respecte pas les règles de la langue française. Le seul personnage principal québécois de la pièce déjoue aussi les normes du français correct en employant le joual et plusieurs anglicismes. Toutefois, le personnage narrateur utilise un langage soutenu. L’objectif de cet exercice est donc de se questionner sur les effets du niveau de langue et du style d’écriture de Dubois sur la perception du lecteur. Lors d’un court exposé magistral, l’enseignant présentera les divers niveaux de langue aux étudiants. Par la suite, ceux-ci se regrouperont en équipes de trois ou quatre étudiants et l’enseignant distribue à chacune des équipes un extrait de texte différent provenant de différents registres de langue (par exemple, nous pourrions utiliser un extrait d’une pièce de Michel Tremblay, un extrait d’un roman de Céline, un extrait d’un roman de Proust et un extrait d’une pièce de Wajdi Mouawad). Chaque équipe aura pour consigne de lire l’extrait qui lui a été confié et de le réécrire en modifiant le niveau de langue. Si l’on choisit un texte en argot français (l’extrait du roman de Céline, par exemple), les étudiants auront le choix de le réécrire dans un registre plus soutenu ou de le réécrire en joual. Lorsque chaque équipe aura terminé, l’enseignant amènera les étudiants à se demander si les deux textes leur laissent la même impression ou si le changement du registre de langue change leur perception du texte. Cette activité sera suivie d’une mise en commun des réflexions à ce sujet. Si les étudiants le souhaitent, ils pourront lire la version originale et la version réécrite de leur extrait. Finalement, les étudiants seront questionnés sur ce que, selon eux, l’écriture particulière de Dubois apporte à l’histoire. Ils seront invités à exprimer leur opinion sur la question et à proposer des hypothèses sur les raisons qui ont pu motiver l’auteur à utiliser cette stratégie d’écriture.

 

Activité 7 - Analyse du rôle du narrateur

 

pour accomplir la septième activité de la séquence, les étudiants devront avoir lu la pièce jusqu’à la page 83. Cette activité vise à fournir aux étudiants certains outils facilitant la compréhension de la pièce de René-Daniel Dubois. Plus précisément, nous souhaitons que les étudiants soient capables d’analyser le rôle du narrateur dans la pièce et de comprendre les effets de l’hybridation générique dans la pièce. Pour ce faire, chaque étudiant se verra assigner un des trois monologues du narrateur de Ne blâmez jamais les bédouins. Il devra répondre à un questionnaire concernant cet extrait du texte. Le questionnaire comportera quatre questions :

  • 1) Quel est le rôle du narrateur dans un roman?
  • 2) Est-ce que le rôle du personnage-narrateur semble le même dans la pièce de Dubois que dans le roman?
  • 3) De quoi parle le monologue du narrateur?
  • 4) Le monologue est-il lié avec l’histoire de la pièce? Si oui, de quelle façon?

 

Lorsque chaque étudiant aura répondu à son questionnaire, des équipes seront formées. Chaque équipe devra comprendre un étudiant ayant travaillé sur chacun des textes. Après avoir partagé leurs réponses aux différentes questions, les étudiants auront à discuter du rôle du narrateur et de l’appartenance de ces monologues au genre théâtral et, par la suite, à en discuter avec le reste du groupe. À la fin de cette activité, les étudiants seront invités à terminer la lecture de la pièce et à garder en tête les grandes lignes de la discussion sur le personnage du narrateur afin de voir si le rôle du narrateur change au cours de la pièce.

 

 

APRÈS LA LECTURE

 

           

Activité 8 - Retour réflexif et appréciatif sur l'oeuvre

 

La dernière activité avant l’évaluation sommative se veut un retour réflexif et appréciatif sur l’œuvre étudiée et sur les activités de la séquence. L’activité, qui prendra la forme d’une discussion informelle, a pour objectif de préparer les étudiants à exprimer un point de vue articulé et réfléchi sur une production littéraire, ce que les étudiants auront à rédiger dans le commentaire réflexif à propos de leur travail de création, lors de l’évaluation sommative clôturant cette séquence didactique. La discussion sera encadrée par les questions de l’enseignant, qui toucheront à tous les sujets abordés au cours de la séquence. On pourra par exemple demander aux étudiants : Selon vous, l’usage de stéréotypes dans Ne blâmez jamais les bédouins sert-il de critique sociale? Les personnages ont-ils plus de traits communs que de caractéristiques les différenciant? Quel personnage vous a le plus touché? Pourquoi? Que signifie, selon vous, la fusion des personnages se produisant à la toute fin de la pièce? Quel est l’apport de l’hybridation textuelle dans ce texte? Selon vous, quelles sont les nouvelles possibilités liées à la postmodernité? Avez-vous aimé le travail fait sur la langue dans la pièce? Est-ce un plus-value ou un obstacle à la lecture? En plus de permettre aux étudiants de s’exprimer sur le texte dans une ambiance conviviale, cette activité, puisqu’elle est située en fin de parcours, permet de faire une synthèse des notions acquises au fil de la séquence didactique en vue de l’évaluation finale.

 

           

Activité 9  (évaluation sommative) - Écriture créative : commentaire réflexif

 

Pour conclure cette séquence didactique et vérifier l’acquisition des éléments de compétence et des objectifs ciblés par la situation-problème, nous proposons un travail d’écriture créative, « un exercice susceptible de vérifier ou de consolider les acquis en matière de lecture et d’écriture[2]». La consigne remise aux étudiants sera la suivante : « En vous inspirant de la pièce Ne blâmez jamais les bédouins, de René-Daniel Dubois, vous écrirez un texte d’environ 800 mots mélangeant deux genres littéraires distincts. Le personnage principal de votre histoire sera le personnage stéréotypé créé à l’activité 5. Le langage du personnage devra être travaillé en fonction d’un accent particulier, que vous choisirez. Par la suite, vous écrirez un commentaire réflexif de 300 mots portant sur votre création. Vous y expliquerez de quelle manière vous avez procédé pour répondre à la consigne et vous justifierez vos choix de personnages, d’accent et de genres littéraires. » Le commentaire réflexif, favorisant la métacognition chez l’étudiant, permettra de vérifier que sa démarche d’écriture est consciente et éclairée[3]. En plus de vérifier la maîtrise de l’expression écrite de ses étudiants, l’enseignant pourra évaluer par le texte créatif l’acquisition des notions d’hybridation générique, de stéréotypie et le travail sur les accents et l’oralité du langage.

 

 



[1] CHABANE, Jean-Charles, « La lecture avant la lecture », dans Le français aujourd’hui, mars 1998, 117, 88-98, p. 88.

[2] PETITJEAN, André, « Pastiche et parodie : enjeux théoriques et pédagogiques », dans Pratiques, no 42, 1984, p. 6.

[3] [3] TAUVERON, Anne-Marie, « Le commentaire justificatif après l’écriture d’invention ou travailler la prise de distance avec son texte », Pratiques, no 127, 2005, p. 113-132.


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