Se connecter
 Retour à la page précédente
Sans coeur et sans reproche

Fiche descriptive
Séquence didactique
Annexes
Sans coeur et sans reproche
Proulx, Monique
Par Angéline Cyr


Nationalité de l'auteur : Québécoise
Genre : Nouvelles
Courant :
Siècle :
Groupe d'âge visé : Collégial
Auteur de la séquence : Angéline Cyr
Date du dépôt : Hiver 2011


 

Justification du choix de l’œuvre

J’ai choisi de construire ma séquence didactique autour de l’œuvre Sans cœur et sans reproche, de Monique Proulx. Ce recueil de nouvelles s’insère dans le troisième cours de littérature au collégial, soit Littérature québécoise, pour des étudiants d’environ dix-neuf ans. Sans cœur et sans reproche serait étudié dans cet ensemble en fin de trimestre, et un nombre de dix cours (vingt heures) est prévu pour résoudre la problématique fixée.

 

Ses sujets (drogue, sexe, famille, relations amoureuses) rejoignent toujours les jeunes d’aujourd’hui. Le fait que les personnages ne se nomment que Benoît et Françoise apporte une touche de complexité et peut porter à confusion pour certaines nouvelles. Comme le recueil commence par la naissance et se termine par la mort, avec des étapes de vie importantes entre les deux, nous retrouvons aussi un certain fil conducteur que les étudiants pourront exploiter dans le but de dénouer la problématique entourant le recueil. Enfin, je voudrais initier les étudiants à la nouvelle et au recueil, car bien que les nouvelles diffèrent, il faut comprendre le tout qu’est le recueil, qui peut apporter un sens supplémentaire à l’ensemble de l’œuvre. Cette dernière contient aussi du matériel pertinent pour une analyse littéraire avec les procédés langagiers utilisés, les divers points de vue et la forme de certaines nouvelles, dont l’une écrite dans le style d’un journal intime. Ainsi, je pense que Sans cœur et sans reproche permettra aux étudiants d’élargir leur savoir culturel, de s’approprier les concepts littéraires ciblés et de développer leurs gouts et leur habitude à lire des textes littéraires.

 

 

Avant la lecture

 

Amorce, problème et objectif

Je fais tout d’abord la présentation d’un extrait du film Babel. Cette amorce introduit la nouvelle littéraire de manière originale. En effet, elle permet aux étudiants de comprendre le lien pouvant exister entre trois histoires complètement différentes. Les étudiants ont sans cesse à faire des liens dans leur vie, que ce soit entre les éléments d’un même cours, entre plusieurs cours, et même pour monter des projets touchant à des compétences de plusieurs cours. Ainsi, le problème qu’ils devront résoudre au cours de cette séquence didactique est le suivant : quelle est la cohésion entre les nouvelles? Y en a-t-il une ou pas? Ce problème permet d’atteindre les objectifs poursuivis dans ma séquence, lesquels sont : développer l’analyse, développer l’esprit critique et apprécier le recueil de nouvelles littéraires.

 

Activité 1 – Préparation des étudiants

J’active les connaissances antérieures des étudiants en plénière, à l’aide de questions, au sujet du recueil de nouvelles, des caractéristiques de la nouvelle littéraire et des difficultés rencontrées lors de la lecture de ce genre. J’enchaine avec une présentation sommaire de l’auteur et de l’œuvre. Ensuite, nous discutons en grand groupe des horizons d’attentes, puis des stratégies de lecture que les étudiants utilisent habituellement. Au besoin, je leur en suggère d’autres pour maximiser l’efficacité de leur lecture comme le résumé de chapitre, l’écriture de mots-clés en marge, etc. Pour finir, je distribue l’échéancier de lecture et des directives : les étudiants doivent noter les problèmes de compréhension qu’ils auront rencontrés ainsi que leurs questionnements et les éléments qui les auront surpris. Une période de deux heures est prévue pour cette activité.

 

Activité 2 – Caractéristiques de la nouvelle littéraire

La première partie du cours est consacrée à une activité destinée à démystifier la nouvelle littéraire. Je forme des équipes de quatre et je leur distribue des nouvelles de genres différents [1] (réaliste, fantastique, policier, science-fiction, historique) pour qu’ils en ressortent les caractéristiques; chaque équipe travaille sur un texte. En équipe, les étudiants doivent synthétiser ces notions dans un tableau. Par la suite, ils forment de nouvelles équipes, lesquelles sont composées d’étudiants qui ont travaillé sur chacun des textes présentés. Ils peuvent ainsi comparer les caractéristiques qu’ils ont relevées dans leur nouvelle respective et regrouper ces caractéristiques pour définir le genre de la nouvelle littéraire. Je procède ensuite à une mise en commun du travail des équipes afin de consolider les connaissances nouvellement acquises. Je prévois environ une heure et demie pour cette activité. La dernière demi-heure du cours est consacrée à une présentation interactive sur la nouvelle. J’aborde plus précisément son histoire au Québec (quand a été écrite la première nouvelle littéraire, dans quel contexte, ses caractéristiques).

 

 

Pendant la lecture

 

Activité 3 – Début d’analyse de Sans cœur et sans reproche

Cette activité dure deux périodes de deux heures. À chacune des périodes, les étudiants discutent en équipe de leurs problèmes de compréhension et de leurs réactions par rapport aux nouvelles lues. Je leur demande de décrire les personnages et de résumer l’action (ils ont aussi fait un résumé de chacune des nouvelles, en plus d’avoir à remplir le tableau des Benoît et Françoise), de discuter du type de relation décrit dans chaque nouvelle et de repérer les liens d’une nouvelle à l’autre. Je leur propose aussi de débattre des effets des éléments relevés, ce qui leur permet d’entamer le processus d’interprétation. Environ une heure est consacrée à ce travail en équipe.

 

Les deux cours consacrés à la lecture de l’œuvre sont ponctués par un exposé magistral et divers exercices. La deuxième partie du premier cours d’analyse est destinée à un exposé magistral interactif sur le contexte sociohistorique de Sans cœur et sans reproche, soit les années 1980. Je présente, entre autres, l'échec du référendum, la vie durant ces années, dont quelques repères culturels, les problèmes de la jeunesse québécoise et sa vision du monde. Le but de cet exposé est de permettre aux étudiants de comprendre l'influence qu'ont exercées les années 1980, et d'estimer quels thèmes sont abordés dans les différentes nouvelles pour faciliter leur analyse.

 

Pour débuter le deuxième cours, les étudiants travaillent le langage de personnages, qui est plus problématique pour deux nouvelles : le langage de Françoise dans Derrière le soupirail, et celui de Benoît dans La fée des étoiles [2]. Ils étudient la dépersonnification de Françoise en chat, et relèvent le champ lexical et les indices qui le prouvent. Ils discutent aussi du comportement de Françoise, des hypothèses qui y sont liées, de même de la confusion à la fin de la nouvelle, à savoir si l’auteur évoque Françoise ou son chat, Bleu, car les deux êtres semblent se confondre. Pour ce qui est de Benoît, les étudiants ressortent les néologismes qu’il utilise et leur trouvent des significations. Ils se questionnent à savoir ce qu’apporte le langage de ce personnage sur sa vision des autres et son travail. Je circule d’une équipe à l’autre pour m’assurer qu’aucune d’entre elles ne se leurre dans ses interprétations.

 

 

Après la lecture

 

Activité 4– Partage des hypothèses

La première période de cours est consacrée à de la théorie sur le recueil de nouvelles : comment le tout influence les parties et comment les parties permettent de comprendre le tout. J’aborde aussi la signification du titre du recueil, qui provient de « sans peur et sans reproche » du preux chevalier. Il est maintenant pertinent d’en discuter en plénière, puisque les étudiants ont terminé la lecture. Ils sont alors en mesure de mieux saisir la dynamique du recueil, et peuvent donner aux nouvelles qu’ils ont lues une réinterprétation, en les replaçant dans un tout où les textes se répondent. Pour terminer, je parle de la nouvelle éponyme aux étudiants et de sa position dans le recueil (elle est située au centre). Je leur demande aussi de s’interroger sur le fait qu’il s’agit de la seule nouvelle où se rencontrent Benoît et Françoise. Les étudiants débattent, et soumettent des hypothèses et des interprétations à cet effet.

 

Les étudiants travaillent ensuite en équipe de la même façon qu’aux cours précédents. En plus de leur donner les mêmes tâches à réaliser, je leur demande d’émettre des hypothèses d’interprétation sur l’œuvre entière en leur posant la question suivante : « Selon vous, les indices de temps montrent-ils que les nouvelles se passent toutes à la même époque, ou y a-t-il une évolution? » Par la suite, je fais une mise en commun avec le groupe entier. Nous discutons de la compréhension globale et des pistes d’interprétations des étudiants, et je prends soin de les noter pour la suite de l’analyse. Cinquante minutes sont nécessaires à cette activité.

 

Activité 5 — Présentation du film Réellement l’amour

Je présente aux étudiants le film Réellement l’amour après avoir donné aux étudiants les directives sur les notes qu’ils doivent prendre : relever les liens entre les personnages des différentes histoires, les types de relations avec l’amour, et le rapport des personnages avec ce sentiment. Le visionnement de ce film permet aux étudiants de consolider les apprentissages sur le recueil de nouvelles (même structure) et de comprendre comment s’organise le processus d’analyse pour faire des liens entre plusieurs histoires et personnages. Il donne également des pistes pour répondre au problème demandé [3], à savoir s’il existe une cohésion entre les nouvelles de Monique Proulx.

 

Activité 6 – Analyse de deux nouvelles

Lors du septième cours, je fais un retour en plénière sur le film et nous discutons des éléments que les étudiants ont relevés. Je consacre environ une demi-heure à cette discussion.

 

J’ai l’intention de poursuivre le cours avec une analyse en grand groupe d’Impressions de voyage I et II, la première et dernière nouvelle du recueil. Nous étudions comment la première et la dernière nouvelle se répondent, se font échos. Nous ressortons les procédés langagiers communs et les termes utilisés (reliés au cosmos, à l’univers). Enfin, nous comparons la naissance et la mort, les thèmes abordés dans ces deux nouvelles. Nous discutons de la quête de sens et des liens entre ces deux événements importants de la vie.

 

La deuxième heure de cours est consacrée à l’analyse des liens à trouver dans les nouvelles de Sans cœur et sans reproche. Les étudiants doivent faire un relevé des éléments pertinents pour l’analyse.

 

Activité 7 — Débat sur les Benoît et les Françoise

Comme les étudiants ont rempli le schéma résumant toutes les nouvelles, de même que le tableau comparatif des Benoît et des Françoise, je demande aux équipes de ressortir les liens qu’ils voient entre les nouvelles afin de trouver des indices, de les grouper, les classer, de tisser des liens avec d’autres personnages, et de faire des hypothèses quant à l’identité des personnages principaux. La classe est ensuite divisée en deux pour un débat. Je pose aux étudiants la question suivante : Benoît et Françoise sont-ils les mêmes d’une nouvelle à l’autre ou pas? Pourquoi? La moitié de la classe doit être pour et l’autre, contre. Chacun doit ressortir des arguments issus des divers tableaux et schémas complétés, et des passages tirés du recueil. Une heure est prévue pour cette activité.

 

Activité 8 – Fin de l’analyse de Sans cœur et sans reproche

Pour cette partie de l’analyse, je ressors les hypothèses qui ont été émises par les étudiants aux cours 5 et 7 que j’ai prises en note. Les étudiants sont invités à retourner dans le texte pour valider ou réfuter ces hypothèses. Je fais ensuite une mise en commun et je valide les conclusions des étudiants. Cette validation sert à synthétiser l’analyse de l’œuvre en consolidant les connaissances littéraires, en comblant les lacunes et en corrigeant les erreurs d’analyse. L’étape de la validation prendra environ une heure.

 

Par la suite, je donne aux étudiants des notions sur le pastiche afin de les préparer à la rédaction qu’ils réalisent au cours suivant. J’appuie ces notions par des exemples tirés d’exercices de style sur le site de l’OuLiPo. À la fin de la séance, le groupe classe choisit les thèmes pour le pastiche afin qu’ils puissent s’y préparer adéquatement et faire quelques recherches. Chaque équipe se choisit une période de vie (dans les choix que nous retrouvons dans le recueil de Monique Proulx) et un personnage, soit Benoît ou Françoise. Selon la période de vie qu’ils ont choisie, ils doivent respecter la personnalité du personnage et lui inventer une nouvelle aventure.

 

Activité 9 (sommative) — Rédaction d’un pastiche de nouvelle en équipe

Toute la séance du cours est consacrée à la rédaction d’un pastiche de nouvelle littéraire en équipe de 2 ou 3 étudiants. J’invite chaque équipe à écrire cette nouvelle sur l’un des thèmes déterminés au dernier cours. Le pastiche compte 900 mots, puisqu’il s’agit de la dernière œuvre qui est étudiée dans le cadre du cours Littérature québécoise. Par la rédaction de ce pastiche, je suis en mesure d’évaluer de façon sommative l’atteinte de mes objectifs et la maitrise des caractéristiques de la nouvelle littéraire. Ainsi, je voulais amener les étudiants à développer leur analyse et leur esprit critique, en plus d’apprécier le genre de la nouvelle. L’écriture d’un pastiche leur permet de transférer leurs connaissances dans un autre contexte. Ils devront le terminer à la maison.

 

 


 

[1] Les nouvelles littéraires sont : La demoiselle d’honneur (Nadine Bismuth), Le réveille-matin (Roch Carrier), Eaux troubles (Patrick Senécal), une nouvelle de science-fiction de Denis Côté, Angus (Michel Tournier), L’enfance de l’art (Monique Proulx), Pyrotechnie ou La commémoration (Michel Tournier).

 

[2] J’ai décidé de faire travailler les étudiants sur ces nouvelles après qu’ils aient reçu la théorie sur le contexte d’écriture de l’œuvre. Le langage des personnages traduit la vision du monde des jeunes adultes des années 1980.

 

[3] Utiliser le même raisonnement pour dénouer l’intrigue du film et l’appliquer à l’analyse du recueil de nouvelles.

 

Bibliographie

AUBRIT, Jean-Pierre, Le conte et la nouvelle, Paris, Armand Colin/Massion, 1997, 191 p.

FALARDEAU, Érick, « La préparation à la lecture pour améliorer les compétences des élèves en littérature » dans Pédagogie collégiale, octobre 2002, 16(1), p. 6-11.

FALARDEAU, Érick et Louis-Philippe CARRIER, « Exploiter l'interactivité d'internet avec les enseignants en formation dan sla production de séquences didactiques » dans Recherches, 44, 2006.

GROJNOWSKI, Daniel, Lire la nouvelle, Paris, Nathan (Lire), 2000, 210 p.

LANGLADE, Gérard, « Sortir du formalisme, accueillir les lecteurs réels » dans Le français d'aujourd'hui, 2004, 145, p. 85-96.

PROULX, Les aurores montréales, Montréal, Les Éditions du Boréal, 1996, 238 pages. 

PROULX, Monique, Sans coeur et sans reproche, Montréal, Québec Amérique, 1983, 247 p.


---
© 2024, Université Laval
Ce texte est protégé par la loi sur les droits d'auteur. Il peut cependant être utilisé à des fins éducatives. Nous vous prions d'en indiquer la source lors d'une éventuelle utilisation.


À propos | Aide | Contactez-nous