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Bel-Ami

Fiche descriptive
Séquence didactique
Annexes
Bel-Ami
MAUPASSANT, Guy de
Par Isabelle Bouffard


Nationalité de l'auteur : Française
Genre : Nouvelles
Courant : Réalisme
Siècle : 19e siècle
Groupe d'âge visé : Collégial
Auteur de la séquence : Isabelle Bouffard
Date du dépôt : Hiver 2005


Situation-problème, sous-problèmes de lisibilité et objectifs d’apprentissage proposés :

Au terme de la séquence didactique proposée pour le cours Ensemble 2, les apprenants doivent être en mesure de saisir que Maupassant livre une critique virulente de la société de son temps par le biais de son personnage principal, Georges Duroy. Cependant, certains sous-problèmes de lisibilité se posent :

1-Il est d’une grande nécessité de baliser l’horizon d’attente des élèves par un travail sur le contexte sociohistorique et culturel d’émergence de l’œuvre, c’est-à-dire de relater les faits marquants de l’histoire de la France au XIXe siècle, de décrire la société française de cette époque ainsi que de présenter les caractéristiques du courant auquel Bel-Ami est rattaché.

2-Avant la lecture, il est important de favoriser une certaine distanciation chez les apprenants en leur signifiant que Georges Duroy est un antihéros, qu’il incarne la figure même de l’arriviste, type d’individu très répandu dans la littérature du XIXe siècle, donc que l’œuvre remet en question un certain comportement social.

3-L’enseignant/e doit amener les élèves à avoir une compréhension minimale du texte de Maupassant pour que soit possible un travail interprétatif. Cette démarche fort éclairante amènera les élèves à comprendre que l’œuvre fait preuve d’une puissante ironie en hissant un aventurier sans scrupule au sommet et permettra de proposer une hypothèse de lecture qui sera évaluée, discutée et validée.

Avant la lecture :

Cours 1 :

Il s’agira, dans un premier temps, de favoriser l’échange sur la critique sociale dans les arts en général par la tempête d’idées. L’enseignant/e demandera d’abord aux élèves de livrer leur définition de ce qu’est une critique sociale et de puiser dans leurs connaissances pour donner des titres de films, de chansons, d’œuvres picturales et de productions littéraires québécoises où l'on retrouve une critique très forte de notre société actuelle. Comme exemple, l’enseignant/e présentera une scène des Invasions barbares de Denys Arcand dans laquelle le cinéaste dénonce la barbarie de notre système de santé. Ensuite, il/elle fera écouter de la chanson La tête à Papineau des Cowboys fringants aux élèves : ceux-ci pourront échanger sur les différents faits de société qui y sont contestés. Dans un deuxième temps, il s’agira de citer certaines stratégies discursives chez plusieurs auteurs qui ont été utilisées pour livrer une critique sociale (la satire chez Molière; l’ironie verbale chez Voltaire; la transgression des tabous chez les féministes, etc.). De cette manière, l’enseignant/e pourra présenter, de façon très générale, le réalisme. Dans un troisième temps, l’enseignant/e invitera les élèves à lire en classe un extrait de la préface de Pierre et Jean (1888), sorte d’écrit théorique sur le roman dans lequel Maupassant définit la volonté des auteurs réalistes. S’ensuivra une brève synthèse des propos de l’auteur.

Cours 2 :

D’abord, il s’avère important que les élèves connaissent quelques faits marquants de l’histoire de la France au XIXe siècle. En saisissant que la Révolution française a profité principalement à une bourgeoisie préoccupée d’enrichissement, les élèves seront plus en mesure de comprendre les profondes mutations qui sont survenues dans la seconde moitié du siècle et le contexte dans lequel a pris racine le réalisme. Ces informations seront transmises magistralement. Ensuite, comme les réalistes livrent une étude morale et sociale dans leurs oeuvres, il est une nécessité que les apprenants connaissent bien la société française pour la période qui s’étend de 1848-1890. Les élèves travailleront donc en équipe d’experts pour s’approprier cette matière. Ils devront former des équipes de cinq personnes et se diviser la lecture de textes ayant comme propos les sujets suivants : les valeurs de la bourgeoisie, les ouvriers, le colonialisme, la condition des femmes et le positivisme. Si l’activité précédente se déroule bien, l’enseignant/e peut présenter un court extrait d’une adaptation cinématographique d’une oeuvre de Zola, question de donner une idée à toute la classe des divers changements qu’a apportés la révolution industrielle (ex : Germinal)

Cours 3 :

Le réalisme sera présenté de façon plus concrète par une analyse, en table ronde, d’un réseau de textes (un du Père Goriot de Balzac, l’incipit de L’éducation sentimentale de Flaubert et celui de Bel-Ami de Maupassant). En les comparant, ils essaieront intuitivement de déceler les caractéristiques formelles du réalisme. S’ensuivra, par le biais de l’exposé magistral, une présentation de la vie de Maupassant. En connaissant le passé de l’écrivain, les apprenants seront amenés nécessairement à découvrir quelles étaient ses préoccupations, donc à mieux appréhender la vision du monde déployée dans son oeuvre. Finalement, il est nécessaire de créer un horizon d’attente pour empêcher une trop grande identification du lecteur au personnage principal. Il s’agira de définir la notion de stéréotype et de présenter le type d’individu qu’incarne Georges Duroy par le biais d’extraits de textes de Zola : un de Pot-Bouille et un autre de Nana. Après cette lecture, les élèves dégageront en équipe les caractéristiques rattachées au type de l’arriviste. Une rétroaction suivra immédiatement l’activité proposée.

Pendant la lecture :

Cours 4 :

Il s’agira d’une période-atelier au cours de laquelle les élèves, en équipe de deux, seront amenés à avoir une vision globale des composantes de Bel-Ami à l’aide de deux grilles de lecture. La première présentera deux rubriques : une sous laquelle il s’agira de colliger les différentes allusions à des faits sociaux et politiques réels dans l’œuvre et une autre sous laquelle il faudra décrire comment Maupassant traite ces événements. Ainsi, les élèves parviendront à voir qu’il y a dans le roman un portrait négatif de la société française. La seconde grille de lecture est, quant à elle, fort utile pour amener les élèves à se figurer la logique interne de l’œuvre. À l’aide d’un tableau comportant deux colonnes, ils auront à cerner d’abord le principal événement narratif pour chacun des chapitres de la deuxième partie, puis les conséquences des actions posées par Duroy. Une fois leur travail terminé, il leur sera demandé de définir ce que Maupassant a choisi de décrire : il s’agit, en fait, d’un cheminement en constante progression, d’un parcours toujours en ligne droite sans aucun revers de fortune, d’un triomphe chez Duroy. L’enseignant/e posera la question suivante à la classe : quelle intention a Maupassant en faisant réussir totalement Duroy?

Pour donner des éléments de réponse à cette question, l’enseignant/e pourrait donner son interprétation du titre du roman comme étant le révélateur de la posture ironique de l’auteur et amener les élèves à saisir qu’il y a un double discours dans le texte de Maupassant. Mais, pour que les apprenants saisissent qu’il y a de l’ironie dans Bel-Ami, il est très important de clarifier ce concept. Il s’agira ensuite de familiariser les élèves avec cette clé de lecture en les faisant travailler sur le chapitre trois de Candide de Voltaire, chapitre où l’auteur décrit les horreurs de la guerre en feignant d’adhérer à la philosophie optimiste. Une fois la notion d’ironie comprise, une analyse en classe du passage où Duroy est comparé au Jésus du tableau Jésus marchant sur les flots pourrait être très significative pour comprendre que, à côté de l’univers sémantique donné au premier degré (la réussite du personnage, sa supériorité apparente) se cache un univers sémantique inversé, qui n’est pas explicitement révélé, c’est-à-dire son échec (il a détruit complètement madame Walter). Ainsi, l’enseignant/e sera en mesure de proposer l’hypothèse de lecture suivante : la réussite de Duroy correspond à un échec sur le plan personnel.

Cours 5 :

Au cinquième cours, afin de valider l’hypothèse de lecture avancée, l’enseignant/e fera, dans un premier temps, un exposé magistral sur le pessimisme propre aux écrivains réalistes.

Dans un deuxième temps, il/elle fera lire aux élèves les dernières pages d’un autre roman de Maupassant, Une Vie, qui ne dit rien d’autre que la lente déception et déchéance de son héroïne. Après cette lecture, les élèves auront à répondre, en plénière, à la question suivante : le dénouement de Bel-Ami ressemble-t-il à celui d’Une Vie? Cette discussion permettra d’esquisser un rapprochement entre les deux finales et d’enrichir l’interprétation qui a été proposée au départ : Bel-Ami est un roman de l’échec personnel, parce que le personnage se dégrade tout au long du roman. Par la suite, l’enseignant/e deviendra l’expert/e qui s’interroge sur l’hypothèse de lecture avancée : à haute voix, il/elle tentera de mettre en relief la dégradation personnelle de Duroy en faisant l’analyse des relations amoureuses du personnage (l’amour conduit à une perte de vérité, à un renoncement à soi). Dans un quatrième temps, ce sera aux élèves de valider l’hypothèse de lecture en travaillant, en équipe, trois extraits à l’aide d’un questionnaire (extraits : le voyage à Canteleu, le discours de Norbert de Varenne et les quatre premières pages du chapitre VII de la deuxième partie). Finalement, à la toute fin du cours, l’enseignant/e et les élèves reprendront l’hypothèse de lecture et la valideront selon les idées trouvées dans les extraits (il y a échec personnel parce qu’il y a renoncement à soi-même, inconscience de la réalité derrière les apparences et aliénation de Duroy dans son rapport à l’argent). Une idée principale sera suggérée pour englober les idées secondaires trouvées à l’aide des passages analysés : l’ambition de Duroy conduit à une destruction de soi.

Cours 6 :

Au sixième cours, il s’agit de répéter le même scénario, mais dans une démarche inversée. L’enseignante proposera une idée principale qui sera à prouver par les élèves : le personnage se dégrade parce que son ascension sociale s’accompagne d’un avilissement moral. En équipe de trois, les apprenants auront à trouver trois idées secondaires à partir de passages ciblés (la mort de Forestier, l’évanouissement de Madame Walter, le mariage de Duroy) À la fin de cette période-atelier, chacune des équipes sera invitée à partager avec toute la classe le fruit de son travail.

Après la lecture :

Cours 7 :

L’enseignant/e fera une synthèse de l’ensemble des analyses qui ont été faites en classe en présentant le plan de la dissertation complète sur transparents. Il sera tout simplement expliqué que la réussite de Duroy est un échec sur le plan personnel parce qu’elle provoque l’anéantissement total de sa personne : ce dernier entre dans le jeu complexe de l’être et du paraître, faisant de sa vie un tissu d’apparences qui l’empêche de devenir quelqu’un, et il adopte une démarche purement individualiste qui l’amène à s’avilir moralement.

Pour conclure l’ensemble de la séquence, une table ronde permettra aux élèves d’échanger sur le sens de l’œuvre, sur la critique sociale qu’on retrouve dans Bel-Ami. En fait, l’auteur fait de son personnage un symbole : celui de l’effondrement des valeurs morales et sociales du monde contemporain. Le héros est animé par un désir commandé par l’imitation des modèles extérieurs et, ainsi, met à jour les failles et les défauts d’un corps social, la bourgeoisie, dont l’avènement semble avoir généré une concurrence impitoyable pour la détention de l’argent, donc du pouvoir.

Cours 8 :

Les élèves auront, en classe, à rédiger une préface de Bel-Ami en 800 mots. Ils pourront poursuivre ce travail à la maison. Dans cette préface, il s’agira pour eux de présenter l’œuvre de Maupassant en la rattachant au réalisme et en définissant le sens de la critique sociale qui s’y trouve.

Bibliographie

VANDENDORPE, Christian, « Notes sur la figure de l’ironie en marge de La chute d’Albert Camus », La revue canadienne d’études rhétoriques, vol.12, sept.2001, p.43-62.



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